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Leur musique chante la révolte en espagnol. Et après cinq ans de crise, dans un pays frappé par un chômage de 27%, le public est conquis: habillés en noir, les jeunes spectateurs sautent et “pogotent” sur “Familia y Real”, une chanson contre la famille royale espagnole, en pleine crise de popularité.
“Un système illégal, imposé par les fils du fascisme! Le Bourbon me vole toute la journée!”, chante Diego avant de se lancer dans un air entraînant de ska à la trompette.
“C’est une forme très directe de musique, qui parle de sujets de société”, explique Diego, enseignant au chômage de 32 ans, cheveux longs et épaules tatouées.
“Le ska punk n’était pas très répandu en Espagne jusqu’à il y a environ 10 ans”, affirme-t-il en fumant après une heure de concert survolté.
“Beaucoup de nos chansons parlent du chômage, du fait que beaucoup de patrons profitent de la situation, du système politique auquel nous ne croyons pas. On tente d’écrire les chansons en partant de notre expérience: le chômage, ne pas avoir de revenus, devoir rembourser ses prêts”, ajoute-t-il.
Comme bonne partie de la musique indépendante en Espagne, les paroles du groupe de Diego, Oferta Especial, calquent les revendications entendues dans les rues lors des manifestations de ces dernières années.
Les chanteurs dénoncent l’injustice sociale, les difficultés économiques et la corruption chez les politiques. Un fléau qui indigne dans un pays où les scandales se succèdent et touchent jusqu’au chef du gouvernement conservateur, Mariano Rajoy.
“Le Premier ministre, cet enfoiré, pourquoi on l’a élu?”, chante Mala Rodriguez, la princesse espagnole du rap.
Sur ce titre, “La rata” (le rat, ndlr), premier extrait de son album sorti en juin, elle évoque la “crise des valeurs” qui frappe le pays.
“Il y a beaucoup de musiciens engagés en Espagne, qui n’ont pas honte de dire ce qu’ils pensent et de montrer leur indignation”, explique dans son accent andalou la chanteuse de 34 ans, de son vrai nom Maria Rodriguez.
“Le rap était pour moi la seule façon de le faire”, explique La Mala, ou “La méchante”. “C’est dans des moments difficiles comme celui-ci que l’on peut découvrir qui est prêt à se battre.”
Son nouvel album, qui a déjà reçu un Latin Grammy, prix internationaux de musique en espagnol et portugais, “dénonce les attitudes complaisantes face à la crise que traverse notre pays”, analyse la rédactrice en chef de l’édition espagnole du magazine Rolling Stone, Beatriz G. Aranda.
Mais les plus grands succès commerciaux ne sont pas ceux qui dénoncent la crise, le Top-40 espagnol étant dominé par des stars internationales comme Jennifer Lopez ou Rihanna.
“Les groupes qui plaisent aux médias et au grand public ont une vision ingénue et individualiste du monde”, affirme Beatriz G. Aranda. “La chanson engagée est en plus mal vue en Espagne, ce qui n’aide pas.”
Fière de venir d’Andalousie, l’une des régions d’Espagne les plus frappées par le chômage, Mala Rodriguez affirme que son rap est influencé par le flamenco, la musique traditionnelle gitane née sur ses terres d’origine.
“Comme le rock, le flamenco est une musique créée par des exclus et des marginaux”, explique Beatriz G. Aranda. “C’est une musique engagée depuis ses origines”.
Autre artiste andalou, Chico Ocaña mêle depuis le début des années 1990 des rythmes blues et rock and roll aux sonorités flamenco.
Son prochain album, qu’il compte sortir d’ici la fin de l’année, parlera des scandales de corruption et des expulsions de propriétaires surendettés, qui ont mobilisé dans le pays. “Mes chansons parlent de la crise, des manifestations, des coupes budgétaires, de la lutte des riches contre les pauvres”, explique Chico Ocaña qui, à 56 ans, se souvient de son enfance modeste.
“Je suis un enfant de la crise. Quand rien n’est fait, il faut bien tenter de faire bouger les choses. C’est pour ça que je chante.”