
Lors d’un colloque sous le thème "L'institution artistique, le concept et la réalisation", organisé dans le cadre de la session d'automne de la 46e édition du Moussem culturel international d’Assilah, les intervenants ont abordé diverses questions liées aux institutions artistiques (musées, galeries, résidences artistiques, instituts, ministères, producteurs, etc.), lesquelles, selon eux, possèdent des racines anciennes et se prolongent jusqu’à nos jours.
A cet égard, le secrétaire général de la Fondation du Forum d'Assilah, Hatim Betioui, a souligné que l’art contemporain, à travers toutes ses évolutions, reflète la société, sa culture ainsi que ses grandes questions, notant que, face à la complexification de ces enjeux, les institutions artistiques se sont affirmées comme des piliers essentiels pour soutenir les artistes et les mouvements contemporains à l’échelle mondiale.
Il a fait observer que ces institutions accueillent les expériences nouvelles qui remettent en question les formes traditionnelles de l’art, en offrant des espaces d’exposition ouverts et pluridisciplinaires, relevant qu’elles jouent un rôle crucial tant sur le plan économique qu’esthétique, en proposant des bourses et des résidences qui permettent aux artistes de bénéficier d’opportunités d’expérimentation et d’échanges culturels.
Pour sa part, l'écrivain et critique d'art libanais, Issa Makhlouf, a estimé que la relation entre l'institution artistique et l'art à l'ère moderne a connu une "évolution radicale", entraînant une transformation du "sens culturel", qu’il attribue à de nombreux facteurs, notamment la mondialisation et l’entrée de capitaux dans les industries culturelles.
Il a précisé qu'à l’époque moderne l’art est entré dans une "nouvelle phase", où la création artistique est devenue une "marchandise à commercialiser", faisant désormais partie intégrante de l’économie.
De son côté, l'écrivain et chercheur marocain, Driss Ksikes, a souligné les évolutions majeures qu’a connues le concept d’"industrie culturelle", notamment au début du XXe siècle avec l’émergence de la notion d'"internationalisation de l’industrie culturelle", rappelant que des budgets importants ont alors été alloués à cette approche, favorisant l’émergence de nombreuses institutions investies dans ce secteur.
Le chercheur a également abordé ce qu’il a qualifié de problème complexe nécessitant des solutions innovantes, relatif à la manière d’appréhender la culture, non seulement comme un héritage et un ensemble de déterminants anthropologiques, mais aussi comme une industrie étroitement liée aux modes de gestion artistique.
Quant à l’universitaire et artiste plasticien tunisien, Khelil Gouia, il a précisé que la première institution directement liée à la création est la langue, suivie par l’Etat, puis par le récepteur (le public), soulignant l’existence d’un "passage ontologique" entre le processus individuel de création et la présentation de l’œuvre (cinéma, galeries, espaces d’exposition, etc.).
Il a insisté sur le fait que l’œuvre ne devient véritablement artistique que lorsqu’elle atteint le récepteur, ce qui implique la nécessité d’une institution, quelle qu’elle soit (festival, salles, etc.).
Salima El Aissaoui, commissaire d'exposition a, quant à elle, présenté un exposé sur l’histoire des institutions culturelles au Maroc, mettant en lumière le rôle joué par le Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain dans la production de savoir autour de l’art marocain, notant que ce musée constitue un véritable laboratoire de recherche sur l’art moderne au Maroc, tout en ouvrant des perspectives à toutes les expressions artistiques.
Les autres intervenants ont indiqué que les institutions artistiques encouragent la recherche critique autour des œuvres d’art et participent activement à l’éducation du public, favorisant ainsi le développement d’une conscience artistique à la fois visuelle et intellectuelle, soulignant leur rôle dans le renforcement du lien entre la société et l’art, en faisant de ce dernier un véritable partenaire dans la production de sens.
Ils ont également mis en avant la contribution de ces institutions à la promotion de la justice culturelle, conférant à l’art une dimension à la fois multiforme et mondiale.
Cette session a été marquée par l'organisation de plusieurs colloques consacrés à l’art, notamment une conférence sous le thème "L’art et le pouvoir de la technique".