Mary Simon, nouvelle gouverneure du Canada et ardente défenseure de son peuple inuit


Née en 1947 dans un petit village du Nunavik, Mary Simon a grandi sous la tente familiale, suivant un “mode de vie très traditionnel” fait de “chasse et de pêche”

Libé
Mercredi 28 Juillet 2021

Ancienne diplomate, fervente défenseure de l’Arctique et de son peuple, les Inuits, Mary Simon, devenue officiellement lundi la première femme autochtone gouverneure générale du Canada, est considérée comme une “bâtisseuse de ponts”. Peu connue du grand public au Canada, cette femme aux cheveux gris, dont le nom inuit est Ningiukudluk, prend ses fonctions au moment où le pays est secoué par la découverte ces derniers mois de plus d’un millier de tombes anonymes d’enfants autochtones près de pensionnats catholiques. Mary Simon, 74 ans, est la cinquième femme à représenter officiellement Elizabeth II, la reine d’Angleterre et cheffe d’Etat du Canada. Sa nomination est “un pas important vers le long chemin de la réconciliation”, avait-elle salué le 6 juillet. Lundi, elle a expliqué que c’était “avec humilité” qu’elle était “prête à devenir la première femme autochtone gouverneure du Canada”, un “moment historique” selon elle. C’est déjà Mme Simon qui avait reçu en 2008 les premières excuses officielles du gouvernement canadien pour l’enrôlement de force de dizaines de milliers d’autochtones dans ces pensionnats. “Ne nous laissons pas abuser par l’impression que lorsque le soleil se lèvera demain, la douleur et les cicatrices seront effacées”, avait alors déclaré cette mère de trois enfants, aujourd’hui grand-mère et arrièregrand-mère. Vue comme une “bâtisseuse de ponts” entre les cultures par ceux qui l’ont côtoyée dans ces anciennes fonctions, elle a expliqué lors de la cérémonie qu’elle avait appris très jeune à vivre dans des mondes différents et que la réconciliation exige un “effort quotidien”. Née en 1947 dans un petit village du Nunavik, cette vaste région du Grand Nord du Québec, Mary Simon a grandi sous la tente familiale, suivant un “mode de vie très traditionnel” fait de “chasse et de pêche”. Elle rappelle régulièrement avoir pour modèle sa mère et sa grandmère inuites. Jeune adulte, elle fait ses armes en tant qu’animatrice de radio pour la chaîne publique anglophone CBC. Et dès les années 1980, elle s’engage pour la défense des Inuits, à commencer par la protection de leur milieu de vie. En tant que présidente du Conseil circumpolaire inuit (ICC) entre 1986 et 1992, elle dénonce ainsi la pollution de l’Arctique, puis les forages pétroliers. En 1994, elle devient la première Inuite à occuper un poste d’ambassadrice, à la tête des Affaires circumpolaires jusqu’en 2003. Pendant cette période, elle négocie la création du Conseil de l’Arctique et, en parallèle, occupe les fonctions d’ambassadrice du Canada au Danemark, de 1999 à 2001. En 2006, elle prend la tête de l’Inuit Tapiriit Kanatam, la principale organisation inuite du Canada. Pour la protection de la culture de ce peuple et de ses pratiques, elle n’hésite pas à se lancer dans des bras de fer internationaux. Comme quand Bruxelles fait interdire en 2010 le commerce de produits dérivés du phoque en Europe, au nom de la défense des animaux. “Des perceptions coloniales de nos pratiques de chasse”, fustige-t-elle. La gouverneure générale du Canada de l’époque, Michaëlle Jean, mange un morceau de cœur de phoque cru en signe de solidarité. Même chose quand Washington tente de faire classer l’ours polaire comme espèce menacée d’extinction, une “attaque directe contre nos droits, notre culture, nos coutumes de chasse, nos accords sur la protection de la nature”, lance-t-elle. Paradoxalement, c’est aussi dans le domaine de la préservation de certaines cultures qu’elle est désormais attaquée: Mary Simon, bilingue anglais et inuktitut, ne parle pas le français, une des langues officielles du pays, vue comme “menacée” par de nombreux Québécois. Elle s’est engagée, a promis le Premier ministre canadien Justin Trudeau, à prendre des leçons pour “pouvoir bien représenter tous les Canadiens”.


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