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Les relations migratoires à l’image de toutes les autres relations Nord-Sud


Hassan Bentaleb
Lundi 26 Août 2019

Les relations migratoires à l’image  de toutes les autres relations Nord-Sud
La question migratoire continue à faire partie des éléments centraux qui fondent les relations entre le Maroc et l’Espagne. Elle prend actuellement et de plus en plus la forme d’une délégation du contrôle migratoire madrilène par Rabat. En effet, le gouvernement espagnol vient d’approuver l’octroi d'un montant de 32,2 millions d'euros pour aider le Royaume dans ses efforts visant à contrôler l'immigration irrégulière.
Pour Madrid, ce montant est considéré comme une aide budgétaire du ministère de l’Intérieur qui s’inscrit dans le cadre de la coopération policière internationale visant à contribuer au financement des efforts déployés par les autorités marocaines en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et le trafic d’êtres humains. Déjà le 19 juillet dernier, le Conseil des ministres espagnol avait autorisé l’octroi d’une rallonge budgétaire de 30 millions d'euros au ministère de l'Intérieur afin qu’il puisse  contribuer au financement des efforts marocains. Ces fonds s'ajoutent à ceux octroyés par l'Union européenne (140 millions d'euros, dont l'Espagne a déjà déboursé 26 pour financer l'achat d'un parc de véhicules).
Selon le journal ibérique « El Pais », les autorités espagnoles considèrent la coopération avec les pays tiers comme l'un des axes transversaux de la politique d'immigration espagnole et qualifié le Maroc de  partenaire stratégique qui a permis la réduction de 39% les entrées irrégulières  depuis le début de l’année grâce à l’amélioration du contrôle des frontières dans la zone du Détroit de Gibraltar et de la mer d’Alboran. Mieux, ajoute « El Pais », cette coopération a permis la réactivation des accords maroco-espagnols considérés comme obsolètes, à l’instar de celui qui autorise le retour rapide des migrants subsahariens qui ont franchi les barrières de Sebta et Mellilia. 
En outre, cette coopération a permis à Madrid de déléguer au Maroc le contrôle de la voie maritime puisque toutes les opérations de sauvetage en mer sont désormais placées sous responsabilité marocaine via la Marine Royale, laquelle débarque souvent les naufragés dans leur point d’embarquement.
Mais peut-on parler dans ce cas de coopération bilatérale win-win ou de partenariat d’égal à égal ? Dans son article : « Les enjeux de la sécurisation de la question migratoire dans les relations de l'Union européenne avec l'Afrique : Un essai d'analyse », Lorenzo Gabrielli estime que la question migratoire dans l’espace euro-africain renvoie à une configuration complexe des relations de pouvoir et de dépendance conséquentes comme le souligne A. Sayad (1991,270), « on ne comprendrait rien à la nature de ce phénomène [...] si on ne se souvenait que l'immigration consacre la relation de domination qui l'a produite et qui l'entretient ».
Lorenzo Gabrielli va plus loin en considérant que les termes de dialogue ou de partenariat utilisés par l'UE pour définir les négociations avec les pays tiers en termes de coopération dans la politique migratoire semblent se référer plutôt à la phase d'implémentation des politiques qu'à celle d'élaboration. A ce propos, il cite l’exemple du plan d'action pour le Maroc élaboré par le HLWG (High level working group on migration and asylum) qui a été élaboré et présenté sans aucun dialogue direct avec le pays impliqué, fait qui a provoqué une réaction très négative de la part du gouvernement marocain qui s'est considéré insulté par le contenu de la présentation.
Pourtant, il a tenu à préciser que ce déséquilibre des rapports de force ne doit pas occulter le fait que les pays d'Afrique n'ont pas de marge de négociation ou qu'ils n'utilisent pas la question migratoire pour atteindre d'autres objectifs. « Les migrations représentent sans doute un enjeu important dans la relation des pays africains avec l'Europe, ne serait-ce que pour récupérer grâce à elles une partie de l’intérêt que les pays européens ont perdu à leur égard, après la fin de la guerre froide et l’élargissement à l'est de l'UE », explique-t-elle. Et de conclure : « Comme le souligne A. Bensaad (par exemple, les régimes maghrébins voient dans leur rôle de supplétif de la répression « un moyen de marchandage avec les pays européens et [...] après l'avoir nié, ils mettent en exergue la forte présence de migrants sur leurs territoires ». La protection de l'Europe devient ainsi une sorte de rente géographique ».





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