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Quant à la partie qualitative, des focus groupes ont été organisés entre le 26 février et le 4 mars dernier à Casablanca ont fait l’objet d’enregistrements audio. Cette étude a dévoilé que «les journalistes femmes sont confrontées au quotidien à des situations discriminatoires qui, à force de faire partie du quotidien, deviennent tellement banales que l’on n’y prête plus attention». Et de préciser que «les agissements sexistes et le harcèlement sexuel existent dans presque tous les médias, que ce soit au sein même de la rédaction ou à l’extérieur, pendant les reportages et interviews. Les journalistes préfèrent ne pas trop s’attarder sur ces faits qu’elles disent savoir gérer, voire dépasser».
Dans leurs parcours, les femmes journalistes au Maroc s’achoppent au plafond de verre. En effet, l’étude a souligné qu’«à compétences égales, les hommes sont privilégiés. Les femmes sont jugées moins disponibles en raison de la maternité et l’éducation des enfants. Chacune à son niveau se heurte au fameux «plafond de verre». Elles se trouvent ainsi bloquées dans leur carrière». Et de préciser que «le vrai pouvoir» est aux mains des hommes. Pis encore, quand certaines femmes occupent «des postes de manager» ou de responsabilité au sein d’une rédaction ou quand elles affichent la volonté de progresser dans la hiérarchie, elles sont confrontées «à un manque de légitimité et de prise en considération de leurs paroles». En plus, l’étude a mis en avant d’autres contraintes qui pèsent sur les femmes journalistes. Il est question ici de contraintes «familiales et du regard négatif que porte la société sur ces femmes qui travaillent souvent tard et pendant les jours fériés, confiant leurs enfants aux conjoints ou à leur famille proche. Un regard social qui pèse lourdement et qui aboutit parfois à une forme de culpabilisation. Et face à cette pression, certaines préfèrent s’autolimiter et renoncer à progresser, d’autres rencontrent compréhension et soutien de la part du conjoint et des proches».
Quant aux jeunes journalistes, encore célibataires, elles estiment que «le fait d’être mariée avec un enfant peut interférer dans l’exercice de leur métier». Outre le fait que certaines d’entre elles ont déclaré qu’elles «envisageraient de quitter les médias pour un travail plus classique et sécurisant». Par ailleurs, cette enquête de terrain a mis l’accent sur une situation paradoxale : les personnes sondées confirment que la situation des journalistes femmes dans les médias au Maroc s’est améliorée, mais ont un discours parallèle teinté de notes plutôt alarmistes : 71% des participantes estiment que l’égalité entre les genres n’est pas acquise ; 43% jugent qu’il est plus aisé pour un homme de réussir dans ce métier ; 44% pensent que l’on attend des femmes journalistes plus d’efforts ; 45% disent culpabiliser face aux obligations familiales; 82% estiment que la communication et la sensibilisation au sein de leur structure demeurent insuffisantes.
Cette étude a également dévoilé que le statut de femme mariée ne semble pas constituer un critère de discrimination. «Le fait d’avoir des enfants n’est pas non plus un facteur de discrimination direct, mais les journalistes ayant des enfants en tiennent compte dans leurs décisions de mobilité, de voyages, et donc «s’autorégulent» dans l’exercice du métier». Ainsi, 60% des femmes journalistes ayant des enfants, ont dû faire un choix entre leur vie professionnelle et personnelle et que 48% d’entre elles ont dû renoncer à une offre, contre 16% dans le cas des femmes sans enfants.
Que faire pour améliorer les conditions des femmes journalistes au Maroc ? L’étude de l’UPF-Maroc présente plusieurs recommandations dont la création d’un réseau de solidarité, l’investissement sur la montée en compétences notamment à travers les formations, le renforcement des compétences dans le digital, le partage et le transfert des valeurs et des principes d’une génération à l’autre, et l’instauration d’un contrepouvoir (au féminin) à l’image des sociétés de journalistes, comme il en existe dans d’autres contrées, et ce, dans le but de «défendre le métier, la place des femmes, les conditions de travail, les moyens mis en œuvre pour que la vie privée puisse retrouver sa place : flexibilité et aménagement du temps du travail permettront davantage de motivation, de sens des responsabilités et donc d’engagement».
T. Mourad