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Le dol du siècle : Un deal à la Trump qui donne tout à Israël et rien à la Palestine


Hassan Bentaleb
Jeudi 30 Janvier 2020

Après trois ans de suspense, le plan de paix pour le Proche-Orient dénommé "Deal du siècle" par ses promoteurs, a été enfin dévoilé. Il s’agit d’un document de 180 pages qui propose la «solution à deux Etats la plus réaliste» tel que pompeusement avancé. Une sorte de Plan Marshall entre Israël et ses voisins, ajoutent ses concepteurs.
Que prévoit-il en fait ? Pour les Israéliens, il prévoit l’annexion pure et simple de la vallée du Jourdain, vaste zone stratégique de la Cisjordanie occupée, ainsi que la reconnaissance officielle de Jérusalem comme seule capitale d’Israël. Pour les Palestiniens, il propose la mobilisation d'une cinquantaine de milliards de dollars d'investissement dans les territoires palestiniens et une autonomie plus large en échange du dépôt définitif des armes et de la reconnaissance de l'Etat d'Israël.
A noter que Donald Trump et son gendre Jared Kushner ont refusé jusqu’ici d’utiliser le concept de solution “à deux Etats”, rompant ainsi avec la position traditionnelle de la communauté internationale qui y est favorable.
La carte publiée dans la foulée par la Maison Blanche entérine, en réalité, le grignotage des Territoires palestiniens nés du délitement des accords d’Oslo et d’une décennie de colonisation accélérée, en y ajoutant, en compensation, quelques territoires dans le désert du Negev et le «triangle arabe» du Nord d’Israël, a rapporté le quotidien français  Libération.
Mais qu’en est-il des cinq millions de réfugiés palestiniens ? Pas de «droit au retour» en vue : «Votre plan est clair sur le fait que [ce] problème doit être résolu en dehors de l’Etat d’Israël», martèle Netanyahou.
Quelles conséquences aura ce « deal » pour les Palestiniens ?
Jacques Hubert-Rodier  estime dans Les Echos que, dans les faits, le « Deal du siècle » de Donald Trump met un terme à tout espoir de création de deux Etats vivant en paix, côte à côte, comme l'avait défendue le président George W. Bush junior. Il consacre aussi la division des Palestiniens entre la Cisjordanie, encore dominée par l'Autorité palestinienne, et Gaza, sous la coupe du Hamas.
Dans les faits, il vise surtout à satisfaire l'électorat du président Trump et à donner un coup de pouce à son « ami » Benjamin Netanyahou et non pas à résoudre un conflit qui oppose, dans l'ancienne Palestine mandataire, deux nationalismes antagonistes, juif et arabe, depuis la proclamation, en mai 1948, de l'indépendance d'Israël et le refus par les pays arabes du Traité de partage de ce petit bout de territoire.
  Pourquoi l’annonce de ce «Deal du siècle» aujourd’hui, trois ans après sa mise en bouche par l’administration américaine ? Pour plusieurs observateurs le timing de ce dévoilement s’imbrique stratégiquement dans l’agenda politique et judiciaire de Benjamin Netanyahou et de Donald Trump.  En effet, quoi de mieux que la présentation d’un plan de paix qui se veut à même de résoudre l’un des plus vieux conflits toujours en cours pour faire oublier ses déboires politiques et judiciaires à l’échelle nationale? Telle est d’ailleurs l’analyse qu’en fait un ancien ambassadeur des Etats-Unis en Israël: «Le fait que le dévoilement de ce plan ait lieu au moment des discussions sur l’immunité de Netanyahou à la Knesset et du procès pour impeachment de Donald Trump n’est pas une coïncidence», explique Dan Shapiro au micro d’Army Radio.
D’une part, le président américain profite de la venue de son homologue israélien pour contenter sa base électorale à l’approche de l’élection présidentielle de 2020, et il essaie de faire passer au second plan son procès en mettant sur la table son «Deal du siècle», qui résoudrait supposément un conflit vieux de près de 70 ans. De l’autre côté, Benjamin Netanyahou tente de sauver sa peau, alors qu’il croule sous les accusations de corruption et que des élections générales arrivent début mars alors qu’il est plus fragilisé que jamais.
Qu’en est-il de la position des Palestiniens? Ceux-ci qualifient cet accord de « complot du siècle » et estiment que les mesures unilatérales prises par Washington, notamment la reconnaissance d’Al-Qods comme capitale d’Israël et la suppression des soutiens financiers destinés à l’Autorité palestinienne et à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), portent atteinte à leurs droits légitimes, en particulier celui  d’établir un Etat indépendant sur la base d’une solution à deux Etats.
De son côté, Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, a indiqué à ce propos : «Le plan Trump ne passera pas, […] aucun Palestinien ne peut accepter un Etat palestinien sans Jérusalem» et les Palestiniens sont prêts à parvenir à la paix conformément aux résolutions de la légalité internationale comme ils sont prêts pour des négociations impliquant le Quartette international et d’autres pays. A ce propos, il a déclaré que cette Autorité n’acceptera aucun rôle exclusif aux Etats-Unis dans le processus politique, en raison de leur parti pris flagrant.
Dans le même registre, les Palestiniens  ont appelé à la tenue samedi prochain d’une session extraordinaire du Conseil de la Ligue arabe au niveau des ministres des Affaires étrangères, en présence du président Mahmoud Abbas, pour examiner les répercussions du « Deal du siècle ».
Le secrétaire général adjoint de ladite Ligue a fait savoir, dans une déclaration à la presse, que les Etats arabes ont appuyé la demande palestinienne de tenir cette session extraordinaire.


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