Réussira-t-on à aller au-delà de quelques bonnes intentions
-
Les partis politiques se félicitent de l’approche participative de SM le Roi pour l’actualisation et la formulation détaillée de l'initiative d'autonomie
-
Le Groupe socialiste se félicite de la victoire diplomatique à l’ONU et met en avant le nouvel élan de développement dans les provinces du Sud
-
Le Sénégal déterminé à consolider son partenariat stratégique avec le Maroc
-
Nasser Bourita : Les relations entre le Maroc et le Sénégal, une référence pour SM le Roi en matière de liens maroco-africains
Ce sommet majeur vise à replacer la lutte contre le changement climatique au centre des préoccupations internationales, avec des discussions clés portant sur l’adaptation, la transition équitable et la réalisation des objectifs globaux de l’Accord de Paris. Lula invite à saisir cette occasion pour traduire les promesses en actions concrètes, espérant ainsi tourner une nouvelle page historique dans la mobilisation mondiale pour le climat.
Quels sont les enjeux cruciaux de la COP30 à Belém ?
A la COP30, plusieurs dossiers prioritaires s’imposent. D’abord, la lenteur et l’insuffisance des nouveaux engagements nationaux. En effet, les Etats devaient remettre leurs nouvelles cibles révisées avant l’hiver dernier. Seuls 15 l’ont fait dans les temps. Le Canada, par exemple, a transmis la sienne juste après la date limite. Aujourd’hui, seulement 74 pays sur 197 ont actualisé leurs objectifs, ce qui complique la transparence et la reddition des comptes.
Ensuite, le financement climatique, talon d’Achille des COP. A Bakou l’an dernier, les pays riches ont promis de mobiliser 1.300 milliards de dollars d’ici 2035 pour soutenir les pays vulnérables. Une promesse récurrente, trop souvent non tenue. Le défi consiste désormais à passer de l’engagement verbal aux mécanismes concrets permettant de débloquer réellement ces fonds.
Enfin, décarboner et s’adapter simultanément. Les négociations doivent inclure une vision plus intégrée : réduire les émissions et renforcer la résilience.
Comme l’explique David Waskow, du World Resources Institute (WRI), protéger les forêts permet non seulement d’absorber le CO₂, mais aussi de limiter l’impact des catastrophes climatiques — feux, canicules, inondations. Comprendre ces synergies est essentiel pour accélérer l’action climatique.
Qu’en est-il de la cible de +1,5 °C?
Au vu des trajectoires actuelles, le dépassement du seuil de +1,5 °C semble inévitable d’ici la fin de la décennie. Faut-il alors abandonner cet objectif ? Pour Camille Martini, chercheuse en droit international de l’environnement, la réponse est claire : non. La Cour internationale de justice a d’ailleurs rendu un avis historique cette année, confirmant que les Etats ont l’obligation juridique d’agir contre les changements climatiques, et que l’objectif central demeure celui de stabiliser la hausse à +1,5 °C.
L’experte du WRI partage ce point de vue : à l’image d’une fièvre, chaque dixième de degré compte. Les vagues de chaleur record de 2025 en Europe, les inondations meurtrières au Texas ou encore les incendies massifs en Méditerranée rappellent que l’inaction ou la lenteur se paient cash.
Et l’Accord de Paris?
Dix ans après la COP21, qui avait vu naître l’Accord de Paris et suscité un immense espoir, le bilan est contrasté. Les ambitions affichées en 2015 peinaient à masquer une réalité désormais implacable: les émissions mondiales continuent d’augmenter, tout comme les températures moyennes de la planète. Malgré une mobilisation internationale sans précédent, la trajectoire climatique demeure très éloignée des objectifs que la communauté internationale s’est elle-même fixés.
L’Accord de Paris repose sur un principe central : chaque Etat fixe ses propres objectifs de réduction des gaz à effet de serre, avec obligation de les actualiser tous les cinq ans. L’idée était d’entraîner une dynamique progressive, chaque nouvelle cible devant être plus ambitieuse que la précédente.
Toutefois, selon un récent rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), même si l’ensemble des pays atteignaient leurs objectifs nationaux, le réchauffement se situerait entre +2,3 °C et +2,5 °C — loin du seuil de +1,5 °C considéré comme vital pour éviter les pires impacts climatiques.
Camille Martini tempère cependant cette lecture pessimiste. Sans l’Accord, rappelle-t-elle, la planète se dirigerait vers un réchauffement proche de +4°C, un scénario catastrophique aujourd’hui écarté. «L’Accord de Paris a produit des résultats concrets si l’on observe la trajectoire mondiale. C’est un progrès majeur, même s’il reste largement insuffisant au regard de l’urgence», insiste-t-elle
Faut-il attendre grand-chose de la COP30 ?
Les COP constituent l’un des derniers forums internationaux où chaque Etat, riche ou pauvre, dispose d’une voix égale. Une rareté dans la gouvernance mondiale actuelle. Mais contrairement à d’autres accords internationaux, l’Accord de Paris ne prévoit aucune sanction contre les Etats qui ne respectent pas leurs engagements.
Cela ne signifie pas pour autant l’absence de pression : la dynamique politique créée autour des COP, l’attention médiatique et les attentes citoyennes forment un écosystème dans lequel les dirigeants sont poussés à agir. Les politiques climatiques nationales adoptées depuis 2015 témoignent de ce mouvement. Elles constituent aussi un nouveau levier : de plus en plus de citoyens saisissent les tribunaux en invoquant le non-respect des engagements climatiques de leurs gouvernements.
Malgré les retards, les tensions géopolitiques et les promesses non tenues, la fenêtre d’action n’est pas fermée. Pour les chercheurs comme pour les diplomates mobilisés à Belém, l’essentiel est de maintenir la cible de +1,5 °C comme ligne directrice, non comme un slogan, mais comme la condition d’un monde encore vivable.
Qu’en est-il de la menace du retrait américain des travaux de la COP30 ?
Le retour du désengagement américain constitue un choc géopolitique majeur. Pour la deuxième fois, l’administration Trump a enclenché la procédure de retrait de l’Accord de Paris. Pire, elle a refusé d’envoyer une délégation de haut niveau à la COP30 et relancé, par décrets, la production nationale de pétrole, de gaz et de charbon.
Selon Camille Martini, le danger est plus grand que lors du premier mandat : cette fois, Washington cherche activement à dissuader d’autres pays d’agir, via des incitations commerciales et des pressions directes ou indirectes.
Pour autant, les dynamiques mondiales semblent désormais plus robustes. Plus de 160 pays, dont 60 chefs d’Etat, sont présents à Belém. Selon David Waskow, la croissance des énergies renouvelables, des véhicules électriques et des batteries est désormais irréversible.
Quant à la Chine, premier émetteur mondial, elle reste fortement dépendante du charbon mais avance rapidement sur les technologies propres. Cette année, elle a annoncé sa volonté de réduire ses émissions de 7 à 10% d’ici 2035, une première dans son histoire climatique.
Qu’en est-il des engagements du Maroc ?
Le Maroc a présenté lors du Sommet des dirigeants sur le climat à Belém, en amont de la COP30, une nouvelle méthodologie ambitieuse dans sa Contribution Déterminée au Niveau National (CDN 3.0). Cette mise à jour renforce significativement les engagements du pays en matière de lutte contre le changement climatique, avec un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre porté à 53% d’ici 2035, contre 45,5% dans la précédente version. La CDN 3.0 ne se limite pas à un simple relèvement quantitatif des ambitions : elle intègre pour la première fois une approche méthodologique novatrice visant à articuler la performance économique, la rentabilité financière et les retombées sociales et environnementales des politiques climatiques.
Le plan marocain mise notamment sur le triplement des capacités installées en énergies renouvelables d’ici 2030, l’abandon progressif du charbon d’ici 2040 (sous réserve d’un soutien international fort), et le développement de projets d’efficacité énergétique dans l’industrie. Par ailleurs, la méthodologie dévoilée souligne l’importance de l’adaptation aux impacts climatiques, avec la définition précise d’une centaine d’objectifs sectoriels ciblés pour 2035, ainsi que d’une série de projets concrets dressant les pertes et dommages liés au changement climatique.
En présentant la CDN 3.0 à Belém, le Maroc affirme son rôle pionnier en Afrique dans la transition énergétique et le développement durable, tout en appelant à une coopération internationale renforcée, notamment en termes de financements, pour garantir la réussite de ces objectifs ambitieux. Cette nouvelle contribution vise à être non seulement une promesse, mais aussi un plan d’action cohérent, intégré et mesurable, dans la continuité de la Stratégie nationale bas carbone 2050 et du Nouveau modèle de développement.
Hassan Bentaleb







