Le Covid-19 ne cible pas uniquement le système respiratoire humain !


Par Fadi Oukili Asraoui *
Mardi 21 Avril 2020

Le Covid-19 ne cible pas uniquement le système respiratoire humain !
En décembre 2019, plusieurs cas de pneumonie évolutifs sont apparus en  Chine, ce qui a contraint le pays à prendre plusieurs mesures draconiennes de précaution, de confinement et de désinfection pour limiter au maximum l’étendue du virus sans même connaître son origine. Ces cas ont été confirmés par les autorités chinoises le 7 janvier 2020 en affirmant qu’il s’agissait bien d’un nouveau virus de la famille des coronavirus baptisé ainsi définitivement Covid-19 ou SARS-CoV-2 et qui provoque des maladies allant d’un simple rhume à des pathologies plus sévères qui entraînent principalement des infections respiratoires fébriles.
Et à partir du début mars, l’Afrique du Nord a suivi l’Europe et l’Asie en devenant de nouveaux foyers du Covid-19. Le Maroc ne fait pas l’exception. En effet, le premier cas confirmé de ce virus est apparu le 1er mars 2020. Dès lors, le Royaume a commencé à renforcer le contrôle épidémiologique ainsi que celui des personnes infectées pour éviter la propagation de la pandémie. Les mesures préventives prises par le Royaume ne se limitent pas à ce niveau. Mais il a pris d’autres décisions consécutives. Ainsi, le gouvernement marocain a procédé à la fermeture totale des frontières, à l’arrêt des écoles, au confinement graduel interne et à l’activation du Plan national de préparation et de riposte selon la situation pandémique actuelle. Il faudra aussi noter que la démarche participative et de contribution des citoyennes et citoyens s’est avérée amplement importante à travers le respect des mesures générales d’hygiène préconisées par le ministère de la Santé.
Cependant, des questions s’imposent : Ces mesures préventives sont-elles suffisantes pour éradiquer cette pandémie  et maintenir un niveau minimal de la croissance économique ?
Le Maroc a été parmi les premiers pays qui ont réagi très rapidement dans le but de limiter l’étendue et les risques de la propagation de la pandémie, mais cette réaction a été très difficile vu la vision floue de l’incident et ses conséquences potentielles. Le volet qui semblait être plus laborieux et exemplaire était bien celui de la communication de l'Etat marocain avec les citoyennes et citoyens, en sensibilisant ces derniers sur la gravité de la pandémie et sa propagation, et en les convainquant de respecter les normes et les règles de sécurité et les mesures de confinement à partir du 16 mars 2020. En même temps, l'Etat a eu la rude tâche  de gérer tous les secteurs économiques et sociaux impactés par la crise pandémique en prenant des décisions à plus faible risque pour une société plus sûre malgré l’ampleur de cette  crise causée par la propagation rapide du Covid-19.
Il s’avère que la situation actuelle a des impacts multidimensionnels, ce qui veut dire qu’il ne faut pas ignorer même le cas pessimiste dans cette période. A cet effet, la dégradation des perspectives de croissance économique nationale en 2020 pourra être très réaliste au moment où le monde entier passe par une crise majeure conjuguée à l’arrêt d’activité de plusieurs secteurs qui connaissent toujours un rendement positif. Ainsi, la pandémie menacera alors non seulement les cellules respiratoires et pulmonaires des êtres humains, mais aussi la croissance économique mondiale. L’espoir d’une reprise économique forte et durable en 2020 s’est amplement atténué avec l’expansion de la pandémie dont l’ampleur de l’impact s’avère de plus en plus pesante et importante.
En tant qu’économie basée sur la consommation, le tourisme, les transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE), le secteur des services et commerce et l’exportation du phosphate, le Maroc ne pourrait pas échapper aux impacts négatifs de cette catastrophe, surtout avec une année de sécheresse. S’ajoute à tout cela une croissance économique qui aurait de nouveau ralenti de 0,7% en 2019, passant de 3% à 2,3%, résultat d’un recul prévu de 5,3% de la valeur ajoutée agricole et d’une augmentation de 0,7% du rythme des activités non agricoles.
Compte tenu de l’impact des conditions climatiques défavorables et de la propagation au niveau mondial de la pandémie du Covid-19, les prévisions de croissance de l’économie nationale en 2020 paraissent difficiles à atteindre car l’année 2019 n’a connu aucune crise majeure.
Tous les secteurs de l’économie se retrouvent perturbés par la situation actuelle : l’agriculture, le tourisme, les transports, l’industrie, les métiers qui dépendent des importations, etc. Selon Bank Al-Maghrib, la valeur ajoutée agricole reculerait de 2,7% avec une récolte céréalière impactée par les faibles précipitations. Aussi selon cette institution, les activités non agricoles ralentiraient à 2,9%, ce qui fait que 2020 sera très difficile sur le plan social.
Sur le marché du travail, le taux de chômage qui a reculé en 2019 de 9,5% à 9,2% connaîtrait notamment une hausse modérée conjuguée à la disparition d’opportunités à cause de la pandémie, notamment l’arrêt des activités des entreprises, le report de tous les concours étatiques et les mesures de confinement qui sont décrétées vu que la population marocaine est obligée aujourd’hui de rester chez elle.  La baisse de la consommation des ménages et de l’investissement restera alors le fait remarquable. On assistera probablement aussi à un ralentissement des exportations suite à la perturbation des chaînes logistique et d’approvisionnement et la baisse des commandes provenant de l’étranger.
Le facteur du temps et l’intelligence collective de l’Etat et du peuple marocains vont jouer un rôle essentiel dans le management des impacts de cette catastrophe mondiale avec des décisions bien calculées pour garder un rythme stable d’une économie menacée.
Face à cette situation, le Maroc doit veiller actuellement à se baser sur la veille économique multidimensionnelle, en exploitant les dernières technologies qui consistent à identifier au préalable les répercussions de cette crise mondiale ainsi qu’à la recherche et les connaissances culturelles de ce phénomène. Cette approche va lui permettre, d’une part, de prévenir les risques relatifs à la santé et à la sécurité politique et monétaire, et d’autre part, d’être prudent face aux pièges artificiels et de savoir exactement sur quel pied danser.
En résumé, on pourra dire que cette crise du coronavirus a montré les fragilités de tous les systèmes et a démontré aussi qu’un grand nombre de pays n’étaient point prêts à faire face à ce type de désastre, d’où un retour à l’Etat social qui s’impose. Des leçons doivent être certainement tirées lorsque la tempête aura laissé place au calme et il faudra valoriser les décisions courageuses prises par l’Etat durant toute cette période et qui ont montré que la santé et le bien-être du capital humain n’ont pas de prix. L’appel de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à la création d’un fonds spécial, dans un contexte exceptionnel, dédié au soutien social et économique du Royaume avec la participation du budget de l’Etat, de plusieurs organismes, fonctionnaires et citoyens a montré un grand signe de solidarité et qu’aux moments de détresse apparaît l’union.
C’est sur les leçons tirées des faiblesses des systèmes constatées lors de la gestion des impacts de la pandémie que notre nouveau modèle de développement doit être basé, d’une manière plus consciente pour faire de notre pays un lieu plus sûr et meilleur.

 * Doctorant en économie


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