La riposte subtile et tout aussi cinglante de la Banque mondiale aux divagations algériennes

Le mal, il est en vous pas en nos experts ni dans nos rapports


​Mehdi Ouassat
Vendredi 7 Janvier 2022

La Banque mondiale et le Maroc n’y sont absolument pour rien.
La Banque mondiale et le Maroc n’y sont absolument pour rien.
Qualifié de «complot» par les médias algériens, le rapport de la Banque mondiale sur la situation économique du pays a suscité des réactions aussi hystériques que stupides. Après la publication de ce document qui a mis en garde contre un séisme économique dévastateur qui plane sur l’Algérie, une fièvre délirante s’est emparée de la sphère médiatique algérienne, en premier, avant de gagner le milieu politique aussi.

En effet, quelques heures seulement après la publication dudit rapport, l’Agence de presse officielle (APS), bras médiatique du régime algérien, a diffusé une série de dépêches où elle a mené une campagne de diabolisation et de désinformation à l’encontre de l’institution monétaire internationale. L’agence de presse dont la mission première est de dénigrer toute institution ou organisation internationale qui pointe du doigt les défaillances du système militaro-politique algérien a estimé qu’il s’agit d’un «rapport sans aucune valeur, qui n'a rien de financier, visiblement rédigé sur instigation de certaines parties connues pour leur hostilité à l'Algérie».

De son côté, la Banque mondiale, après avoir opté pour le silence face à l’avalanche de critiques algériennes visant son rapport, a fini par réagir, dans le but de désamorcer une polémique stérile et qui n’a aucune raison d’être.

Dans une mise au point publiée jeudi, l’institution financière internationale basée à Washington a fustigé «des informations factuellement inexactes sur le contenu du rapport, qui a été préparé avec la plus grande rigueur, ainsi que sur ses auteurs, une équipe d’économistes travaillant sur la région du Maghreb».

«Nous tenons à souligner que la Banque mondiale produit régulièrement des rapports économiques pour ses pays membres. Le Rapport de suivi de la situation économique en Algérie est produit deux fois par an», rappelle la même source dans sa mise au point, précisant que le dernier rapport en question, qui «fait l'objet d'un examen de qualité approfondi avant sa publication, est basé exclusivement sur des données publiques, dont la référence figure dans le document, ou sur des données fournies par les autorités des pays membres».  Et d’ajouter que «les conclusions du rapport sont cohérentes avec les données officielles disponibles à la date de clôture des données du rapport (1er novembre 2021)». La Banque mondiale a, par ailleurs, «noté avec regret que certains articles ont adopté un langage qui peut avoir dépassé les pensées de leurs auteurs anonymes. Tout inacceptables qu’ils soient, il ne sera pas répondu à ces propos, tant nous considérons qu’ils ne sauraient porter argument ni ne constituent un élément de débat». 

Tout en rappelant que le Groupe de la Banque mondiale est une institution internationale de développement composée de pays membres, qui s’est fixé comme double objectif de «mettre fin à l’extrême pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée», la mise au point insiste sur le fait que «le personnel et la direction du Groupe de la Banque mondiale servent uniquement les objectifs de l'institution».

Il faut dire que cette campagne de démonisation menée contre la Banque mondiale dépeint, de manière évidente et formelle, la nature du régime politico-militaire algérien, fondé sur la propagande mensongère et trompeuse.    Un régime qui a entraîné le pays dans une crise politique et économique sans précédent et qui est de surcroît profondément impopulaire et confronté à une grogne sociale consécutive à une dépréciation du dinar, une inflation galopante, une dégradation du pouvoir d'achat et à la faillite de milliers d'entreprises. Sans parler des sommes d’argent colossales dilapidées par le régime pour des causes perdues d’avance au détriment de tout un peuple qui suit avec inquiétude les manifestations flagrantes et répétitives de crise qui frappe son régime de plein fouet et qui n’a aujourd'hui que les yeux pour pleurer, en attendant que le fameux Hirak reprend de plus bel et qu’une deuxième vague de ce mouvement contestataire le libère d’un régime, totalitaire et tyrannique, qui n’arrive même pas à garantir au citoyen algérien l'accès aux produits alimentaires les plus élémentaires».

Pour le journaliste et opposant algérien Abdou Semmar, «la Banque mondiale n’a jamais émis le moindre jugement de valeur qui serait  dévastateur pour la réputation de l’Algérie». «Au contraire, dans ce rapport, les spécialistes de la BM expliquent, décryptent, analysent et conseillent le gouvernement algérien», souligne le journaliste algérien, tout en  précisant que «le régime algérien n’accepte pas la vérité, ne tolère pas la critique et refuse qu’un organisme international échappant à son contrôle dévoile la vérité sur ses bilans médiocres». D’autant plus que l’année 2022 s’annonce plus sombre et risque d’être fatale pour la junte militaire algérienne. C’est  en tout cas ce que pense le Parti des Travailleurs (PT), l’une des formations politiques d’opposition les plus influentes du pays. «La situation était déjà catastrophique sur tous les plans en 2021 dont le bilan est un véritable scandale sur le plan des acquis sociaux et démocratiques qui s’annonce encore plus sombre qu’en 2022», a précisé la secrétaire générale du PT, Louisa Hanoune.

Citée par les médias locaux, elle a alerté contre les dangers encore plus importants qui guettent l’Algérie durant cette année en raison, notamment, de la nouvelle loi de finances entrée en application le 1er janvier. «La loi de finances et les lois liberticides promulguées constitueront les deux principales sources de l’aggravation de la situation politique et socioéconomique du pays», a souligné celle qui s’est dite inquiète pour la situation des libertés démocratiques dans le pays. Tout en rappelant la situation «catastrophique» en la matière durant l’année 2021, où plus de 300 détenus d’opinion sont recensés sans compter des milliers d’autres victimes de l’arbitraire, la secrétaire générale du PT estime que désormais, «l’exercice politique est plus que jamais en danger». «Une simple publication sur une page personnelle conduit à la prison», a-t-elle déploré, expliquant que les violations des libertés ont atteint un niveau terrifiant.

La situation économique et sociale en Algérie ne cesse donc de s’obscurcir et cela n’échappe à personne à l’exception, comme par miracle, des dirigeants algériens qui se réfugient dans une propagande haineuse pour détourner l'attention sur les problèmes internes du pays, tout en menant une campagne calomnieuse contre le Maroc, via les médias et les canaux diplomatiques, allant même jusqu’à prétendre que le Royaume serait derrière ce fameux rapport de la Banque mondiale.

Une énième bêtise du pouvoir algérien que le journaliste Oualid Kébir qualifie de «débile». «Il s’agit là d’un vieux remède : celui de la diversion», estime cet Algérien exilé à Oujda. Selon lui, «le régime algérien essaie de détourner l’attention sur d’autres sujets pour dissimuler les problèmes qui rongent le pays de l’intérieur». «Avant même que la BM ne publie ce rapport, les incendies de forêts de l’été dernier en Kabylie ont constitué une illustration caricaturale.

On accuse le Maroc puis on accuse l’allié du Maroc, Israël», explique-t-il, avant de préciser que «les Algériens ne sont pas dupes». «Ils comprennent parfaitement», dit-il. «Ce régime algérien est d’une grande fébrilité. Il sait qu’il est isolé en interne sur le plan politique. Il est contesté par une grande majorité des Algériens. Il n’a plus de légitimité et est dans une sombre impasse. Tout ce qu’il peut faire aujourd’hui, c’est détourner l’attention vers le Maroc et accuser son voisin d’être derrière tous les maux du pays», conclut l’opposant algérien.

Mehdi Ouassat


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