"J e n'arrive pas à y croire", "un mauvais rêve": l'Argentine pleurait mercredi son idole Diego Maradona, décédé d'une crise cardiaque à 60 ans après une carrière qui a déchaîné les passions jusqu'à la vénération. "Maradona sera une part indélébile de la mémoire collective de l'Argentine. C'est une immense idole. Nous lui serons éternellement reconnaissants", a résumé le président argentin Alberto Fernandez qui a décrété trois jours de deuil national. Dans les rues de la capitale du tango, une infinie tristesse se lisait sur les visages. "Je n'arrive pas à y croire, c'est incroyable", répète hébété Francisco Salaverry, 28 ans. "J'ai l'impression d'un mauvais rêve. J'ai l'impression que c'est une blague. Je veux croire que c'est une blague", se lamente auprès de l'AFP le jeune homme, qui n'avait que quatre ans quand Maradona a offert son deuxième titre mondial à l'Argentine. Gabriel Oturi, 68 ans, a "du mal à en parler", il se dit "totalement choqué, meurtri". Nicolas Luna lui non plus n'a "pas de mots" : "J'ai du mal à marcher, ma voix tremble quand je parle, j'ai peur de me mettre à pleurer", hoquète-t-il. "Je suis effondré, ça fait très mal, il va me manquer", dit Carlos, ému aux larmes. L'église maradonienne, formée de fidèles qui vénèrent le "dieu" Maradona, a appelé à un rassemblement à la mémoire de la star argentine au pied de l'Obélisque, en plein centre de Buenos Aires, traditionnel lieu de rendezvous des célébrations sportives. Quelques supporteurs se sont rassemblés devant la maison où "El pibe de oro" (le gamin en or) a rendu son dernier souffle, à Tigre, commune du nord de Buenos Aires. Des policiers gardaient la vaste entrée de la résidence face à des journalistes venus en masse. Dans le quartier de la Boca, où Maradona a évolué dans le club de Boca juniors, Patricia estime avoir perdu "comme un père" car "ici Maradona était tout pour nous". "Je préfère ne pas parler", pleure à chaudes larmes Guillermo Rodriguez, 42 ans, fan éperdu de Maradona qui s'était fait tatouer le 30 octobre le dixième tatouage rendant hommage à son idole, "un cadeau" en l'honneur du 60e anniversaire de l'ancien champion. Guillermo ne pourra jamais réaliser le rêve de sa vie, celui de "prendre dans (ses) bras" le célèbre numéro 10 dont l'effigie recouvre son corps. La date des obsèques n'a pas encore été fixée, mais la veillée funèbre devait avoir lieu jeudi à Buenos Aires à la Casa rosada, le palais présidentiel. Malgré les excès en tous genres, Maradona reste pour plusieurs générations d'Argentins un emblème de leur identité. Quatre ans après la guerre des Malouines (1982), il marque le but de la victoire face à l'Angleterre, un des plus beaux si ce n'est le plus beau but de l'histoire du football, après celui inscrit de la fameuse "main de Dieu", gonflant de fierté tout un peuple. Avant de le rendre hystérique en soulevant la Coupe du monde à Mexico-1986. "Rarement dans ma vie j'ai ressenti la douleur qui m'envahit aujourd'hui, rarement j'ai ressenti autant de joie qu'en ce 29 juin 1986 où nous avons touché le ciel avec nos mains, ce même ciel qui aujourd'hui s'assombrit et nous remplit de larmes", a écrit Mauricio Passadore, un adorateur du N.10, en évoquant ce match historique. Sur les réseaux sociaux s'étalait la peine des Argentins. Beaucoup ont souligné qu'"il est mort le même jour que Fidel Castro", le dirigeant cubain, décédé le 25 novembre 2016. Les deux se vouaient une admiration mutuelle. La mort de Maradona dans un pays passionné de football aura un impact majeur sur l'humeur des Argentins, déjà durement éprouvés par la pandémie de coronavirus et la crise économique. "Une autre douleur pour cette m… année 2020", écrit Isabel Puente, 70 ans. Maradona était "un Dieu errant, sale et pécheur. Le plus humain des dieux", a écrit un adorateur anonyme dont le texte est devenu viral.