Non, on ne pourra jamais s’habituer, à force d’une overdose d’images de l’horreur diffusées par ces télévisions satellitaires qui aiment à faire des taux d’audience sur l’hémoglobine, la mort en direct, les corps chétifs d’enfants calcinés, ensanglantés, d’enfants arrachés à la vie, à l’amour des leurs parce qu’ils étaient Palestiniens. Non, on ne pourra jamais s’habituer à ces images. Ni en détourner le regard en zappant vers d’autres télévisions, d’autres cieux, d’autres pays.
Le compte macabre continue. Gaza est sans eau ni électricité. Et le peuple de Gaza fait la queue dès l’aube pour quelques pains, quand il y en a. La trêve n’est qu’une trêve. Des roquettes sont tirées, des raids répliquent. Et la guerre continue. Sous le regard du monde arabe qui, lui, s’est de nouveau donné en spectacle pour une course dérisoire, futile, malsaine de leadership.
Il a fallu plus de mille morts et trois semaines de guerre –et 48 heures avant un cessez-le-feu préparé en coulisses sur le front diplomatique- pour que les pays arabes convoquent un sommet « extraordinaire ». En rangs dispersés, loin, très loin du drame de la Palestine et des Palestiniens, le sommet arabe de Doha a raté l’essentiel. C’est-à-dire une introspection du corps arabe, un nécessaire et salutaire retour sur soi pour tenter d’analyser, disséquer, peut-être comprendre cette aveuglante absence de solidarité arabe, ces dissensions inter-arabes et cette Nation arabe, dans l’incapacité chronique de parler d’une seule voix. Sous les bombardements israéliens et alors que la Palestine plonge de nouveau dans l’enfer de la guerre, les calculs étriqués, mesquins, insignifiants sont encore la seule réponse que les dirigeants arabes réunis à Doha ont réussi à donner à la rue arabe. L’absence du Roi du Maroc, qui s’en est expliqué dans un communiqué du Cabinet Royal, a alors résonné comme une saine colère, une indignation aussi, contre des palabres arabes absolument formelles.
Pendant ce temps, quelques heures seulement après le cessez-le-feu, se réunissaient dimanche, à Charm Cheikh, en Egypte, six dirigeants européens, le secrétaire général de l’ONU en plus de l’Egypte et la Jordanie. Un sommet international pour que dure une trêve que tous savent précaire et, surtout, pour que les canons de la guerre se taisent. A Charm Cheikh, les faiseurs de paix n’ont pas dit leur dernier mot.