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En effet, l’Egypte et le Soudan avaient, auparavant, fermement rejeté la décision d’entamer, sans accord préalable, cette seconde phase de remplissage, craignant pour leurs ressources en eau. Quelques jours avant la tenue de la réunion du Conseil de sécurité, l’Egypte avait annoncé avoir été informée par Addis-Abeba du début de la seconde phase de remplissage du barrage, érigé par l’Ethiopie en amont du Nil. Dans la foulée, le Soudan a affirmé avoir reçu la même notification.
La capitale éthiopienne n’a pas officiellement confirmé cette opération mais un responsable éthiopien a indiqué, sous couvert d’anonymat, qu’elle aurait bien lieu « en juillet et en août » et que l’ajout d’eau était un processus naturel, en particulier pendant la saison estivale des pluies.
Dans un communiqué, l’Egypte rejette « fermement cette mesure unilatérale », a déclaré son ministre de l’Irrigation, en dénonçant « une violation du droit et des normes internationales, qui régulent les projets de construction sur des bassins partagés de rivières internationales.
Le ministère soudanais des Affaires étrangères a également relevé une « violation flagrante du droit international ».
Deux jours avant la réunion du Conseil de sécurité autour de cette question, le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukri a rencontré, à New York, son homologue soudanaise, Mariam Al Mahdi.
Les deux responsables ont exprimé, dans un communiqué commun, leur « strict rejet » de l’initiative de remplissage et appelé le Conseil de sécurité à « soutenir leur position sur un accord contraignant sur le remplissage et l’exploitation du barrage ».
Par ailleurs, on a appris, de sources diplomatiques, que la Tunisie a remis à ses 14 partenaires du Conseil de sécurité un projet de résolution réclamant l’arrêt du remplissage du réservoir et dans lequel il est demandé à l’Egypte, au Soudan et à l’Ethiopie de reprendre leurs négociations (…) afin de finaliser sous six mois le texte d’un accord contraignant sur le remplissage et la gestion du GERD.
Ce même texte précise, là-dessus, que l’objectif en est de «garantir la capacité de l’Ethiopie à produire de l’hydroélectricité à partir du GERD tout en évitant d’infliger des dommages à la sécurité en eau des Etats en aval ».
En outre, ce projet de résolution prévoit que le Conseil de sécurité réclame aussi « aux trois pays de s’abstenir de toute déclaration ou mesure susceptible de compromettre le processus de négociation ».
Alors que l’Egypte accusait vivement l’Ethiopie de menacer son existence, l’ONU a affirmé qu’un accord sur le barrage éthiopien controversé sur le Nil demeure possible entre l’Ethiopie, l’Egypte et le Soudan, avec la confiance réciproque.
« Un accord sur le GERD peut être atteint », a affirmé, de son côté, Inger Andersen, directrice du programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), lors de la réunion du Conseil de sécurité. « Pour parvenir à un accord optimal, la confiance, la transparence et un engagement seront essentiels », a-t-elle ajouté.
« Bien que des progrès aient été réalisés dans de nombreux domaines lors des négociations, aucun consensus n’a été atteint concernant certains aspects critiques, notamment les dispositions pour la gestion de sécheresses prolongées, l’aménagement en amont et en aval du GERD et un mécanisme de règlement des différends », a toutefois regretté la directrice du PNUE.
Le barrage GERD « est une menace existentielle » pour l’Egypte, a martelé son chef de la diplomatie, Sameh Choukry, en réclamant « un accord légalement contraignant permettant à l’Ethiopie de réaliser des objectifs de développement ». La gestion de la crise par l’Union africaine est dans l’impasse, a-t-il estimé en réclamant l’adoption du projet de résolution tunisien par le Conseil de sécurité car, selon lui, ce texte est « équilibré et constructif ».
Ledit texte exige, en effet, un règlement du conflit dans les six mois, un arrêt par l’Ethiopie du remplissage du réservoir du barrage et une inscription au programme du Conseil de ce dossier en souffrance depuis 2011.
« Si sa survie est menacée, l’Egypte n’aura d’autres choix que de défendre et protéger son droit inhérent à la vie, garanti pas les lois », a renchéri Sameh Chouri (….)
Pour sa part, son homologue soudanaise, Mariam Al-Sadek Al Mahdi, a indiqué, sans évoquer le projet de résolution, que son pays « demandait l’aide » du Conseil de sécurité pour trouver un accord légalement contraignant et de mettre en garde contre le silence qui serait, selon elle, interprété comme un feu vert à l’Ethiopie à poursuivre le remplissage du réservoir du barrage.
L’Ethiopie, à l’inverse, a estimé que le conflit ne menaçait pas la paix et la sécurité internationales et regretté que le Conseil de sécurité en débatte. Elle avait choisi tout de même de se faire représenter par son ministre de l’Eau, de l’Irrigation et de l’Energie.
Par ailleurs, le Gabonais Parfait Onanga-Anyanga, envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la Corne d’Afrique, a appelé « toutes les parties à traiter la question de manière constructive et à éviter toute déclaration qui augmenterait les tensions dans une région déjà soumise à une série de défis » (…)
Le grand barrage de la Renaissance GERD est, en tout état de cause, une source récurrente de vives tensions dans la région. Le conflit autour de ce gigantesque ouvrage revêt d’ores et déjà un caractère beaucoup plus complexe que la géographie, la démographie et la survie économique. Il s’agit, en fait, de rocambolesques tiraillements mais aussi de rivalités géostratégiques avérés quant à l’avenir de cette région.
L’eau, cette matière vitale et précieuse, est au centre des préoccupations existentielles de la majeure partie du continent africain. Indispensable, somme toute, pour la survie agricole et la promotion de l’hydroélectricité, entre autres, elle pourrait dégénérer vers une guerre qui ne dira pas son nom.
Après les conflits pétroliers et la bataille arabe du pétrole de la seconde moitié du siècle écoulé, une « guerre de l’eau » se profile-t-elle à l’horizon africain de ce siècle ?
Rachid Meftah