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E.E.P gloutons : Benchaâboun soucieux de mettre de l'ordre dans ces établissements et entreprises publics budgétivores pour pas grand-chose


Hassan Bentaleb
Jeudi 13 Août 2020

Mohamed Benchaâboun veut remodeler les établissements et entreprises publics (EEP). Son objectif est de les transformer en des organismes regroupés sous forme de pôles plus spécialisés et plus efficients  (industrie, mines, transport et logistique, finances...). Mieux, le ministre de l'Economie, des Finances et de la Réforme de l'administration ambitionne de faire disparaître nombre d'organismes publics dont les missions sont achevées mais qui continuent à engloutir de l'argent public. 
«Si cette initiative peut être considérée comme importante, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un dossier épineux qui remonte à plusieurs années. Ce dossier a déjà fait l'objet de rapports de la Cour des comptes et du CESE.
A rappeler également que lors du Printemps arabe, plusieurs voix se sont levées pour évoquer le problème de la gouvernance de ces EEP », nous a indiqué Hicham Attouch, professeur d’économie à l’Université Mohammed V Agdal de Rabat,  qui estime, cependant, que cette sortie de Mohamed Benchaâboun suscite moultes  questions. D’abord au niveau de son timing. «La rapidité avec laquelle cette initiative a été mise sur l’agenda public laisse perplexe puisqu’elle intervient quelques jours seulement après  le discours du Trône qui a appelé au lancement d’une réforme profonde du secteur public afin de corriger les dysfonctionnements structurels des établissements et des entreprises publics et de garantir une complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives et, in fine, rehausser leur efficience économique et sociale», nous a-t-il précisé. Et de poursuivre : «Cette rapidité suscite la question des études de faisabilité sur lesquelles s’est basé le ministre des Finances avant de lancer son initiative.  Soit ces études existent déjà,  soit l’initiative a été prise à la hâte», nous a-t-il indiqué. 
Ensuite, au niveau de son sens profond, notre source se demande si l'argentier du Royaume compte procéder à un simple remembrement des EEP ou s’il s'agit plutôt d’une fusion stratégique. «Serons-nous face aux mêmes structures avec une seule direction ? Va-t-on plutôt se diriger vers la création d'une nouvelle entité ou vers la prise de contrôle d'une entreprise par une autre ? A rappeler qu’en 2014, le Maroc avait initié l’expérience du regroupement des universités de Casablanca et  Rabat qui s’est soldée par la préservation des mêmes structures et la mise en place d’une seule direction. A rappeler également, qu'en 2001, il y a eu  l'idée de regrouper les établissements publics de la protection sociale en un seul organisme et que rien n’a été fait pour concrétiser ce projet».
Il y a également la question du sort qui sera réservé aux employés de ces EEP et des conditions de l'opérationnalisation de leur remodelage. «Benchaâboun  n’a rien clarifié concernant ces deux points même s’il a assuré que les effectifs de ces EEP seront redéployés dans l'administration publique. En effet, ces derniers ont un statut particulier et ne sont pas considérés comme les autres fonctionnaires de l’Etat», nous a précisé notre source.
Enfin, au niveau de la finalité de cette réorganisation des EEP, notre interlocuteur se demande si cette volonté de remodeler les EEP ne prépare pas le terrain vers un nouveau partage des rôles entre les secteurs public et privé ou plutôt vers un retrait de l’Etat  des secteurs où il a le monopole. En fait, Hicham Attouch pense qu’il y a du changement au niveau du rôle de l’Etat. Il observe que l’Etat assume, aujourd’hui,  de plus en plus un rôle stratégique  en occupant  peu à peu moins d’espace.
Hicham Attouch, pense, enfin, qu’au-delà de toutes ces questions, aucune réforme des EEP n’est possible ou envisageable sans une véritable réforme de l’administration qui doit accompagner ce changement de cap. En effet, la question de l’efficience et de la compétitivité de l’administration publique se pose avec acuité puisque la valeur et l'efficacité des administrations publiques se mesurent aujourd’hui à l’aune de leur contribution au  renforcement de la compétitivité de leurs pays respectifs et  à les mettre en capacité de livrer la rude bataille de captation des investissements, des compétences et des capitaux. Cette efficacité dépend aussi de l’aptitude des organes administratifs à ouvrir de nouvelles perspectives de développement économique et social et à créer des opportunités d’emploi, notamment au profit des jeunes.  

​La recette de Benchaâboun

Mohamed Benchaâboun a tenu, mardi à Rabat, une conférence de presse au cours de laquelle il a fait savoir que l'analyse du secteur des EEP a permis de relever que malgré les différents apports, son développement demeure entravé par un certain nombre de fragilités et d'insuffisances. Pour les EEP non marchands et sociaux, il sera procédé à la réintégration aux ministères concernés de certaines missions après liquidation/dissolution des EEP dont le maintien n'est plus nécessaire, au regroupement de certains EEP dont le maintien serait justifié et à la liquidation/dissolution des EEP dont la mission n'est plus avérée, a-t-il expliqué.
S'agissant des EEP marchands et financiers, le ministre a mis en avant le renforcement de la pérennité du modèle économique et financier à travers la réduction de la dépendance envers le Budget général de l'Etat - BGE (capitaux, garantie, etc), une meilleure contribution au BGE (dividendes et redevances, etc), la valorisation du patrimoine, les partenariats public-privé (PPP), etc.
Il sera également question de la création de groupes/holdings sectoriels homogènes répondant à des impératifs de taille critique, d'optimisation de la gestion (flux, trésorerie, coûts, etc), d'attrait pour le marché financier et de concrétisation des nouvelles opportunités offertes par l'intelligence artificielle, la digitalisation, l'économie circulaire, a-t-il détaillé.
Parallèlement, Mohamed Benchaâboun a mis l'accent sur la création d'une Agence dédiée à la gestion active des participations marchandes et financières de l'Etat.

​Les EEP au Maroc

Le Maroc compte  212 établissements publics, couvrant majoritairement sept groupes sectoriels opérant dans les domaines clé de l’économie nationale, à savoir l’agriculture, la santé, l’éducation, l’urbanisme et l’aménagement, les infrastructures, l’énergie et le secteur financier.  Il faut également ajouter 44 entreprises publiques à participation directe du Trésor, représentées majoritairement (37 unités, soit 84%) par les sociétés à participation publique du Trésor de grande importance : OCP SA, HAO, ADM, CAM, MASEN, RAM et Barid Al-Maghrib.
Les EEP opérant dans les secteurs socioéducatifs représentent 30% du portefeuille public, suivis de ceux agissant dans le secteur de l’habitat, de l’urbanisme et du développement territorial avec 21%. Le secteur de l’agriculture et de la pêche maritime est présent à hauteur de 12%, alors que la composante ressources naturelles (eau, énergie et mines) absorbe 15%.
Par ailleurs, certains de ces EEP détiennent des filiales ou des participations au nombre total de 442 unités dont 236 sont détenues majoritairement (participation publique directe et indirecte supérieure ou égale à 50%) et 206 sont détenues minoritairement (participation publique directe et indirecte inférieure à 50%). Le portefeuille public se distingue, en particulier, par une forte implantation aux niveaux régional et local avec 172 EEP (145 Etablissements publics, 9 entreprises à participation directe du Trésor et 18 entreprises relevant des collectivités territoriales).
Cette distribution reflète ainsi une contribution substantielle du portefeuille public au développement territorial du pays et une réelle implication dans le renforcement de la déconcentration et de la décentralisation de l’action publique.
Source : Entreprises et établissements publics (EEP): Quelle contribution pour le développement régional et la compétitivité territoriale au Maroc ? Ibtissam BENERRAMI

Mohamed Benchaâboun : Le Fonds d'investissement stratégique veillera au soutien des activités productives

Pour opérationnaliser les Hautes 
orientations Royales, des mesures 
immédiates seront prises dans le cadre d’une mise 
en œuvre intégrale des orientations 
de S.M le Roi 

Le Fonds d'investissement stratégique veillera au soutien des activités productives et à l'accompagnement et au financement des grands projets d'investissements, a indiqué, mardi à Rabat, le ministre de l'Economie, des Finances et de la Réforme de l'administration, Mohamed Benchaâboun.
Ce Fonds a pour mission de financer les grands chantiers d'infrastructures à travers des partenariats public-privé (PPP), et de renforcer les capitaux des entreprises ayant des besoins en capitaux propres en vue de contribuer à leur développement et à la création d'emplois, a-t-il souligné lors d'un exposé devant la commission des finances et du développement économique de la Chambre des représentants, concernant le Fonds d'investissement stratégique.
La sélection des projets à financer se fera sur la base de leur impact sur l'emploi, a-t-il relevé, soulignant, à cet égard, la création de fonds sectoriels ou thématiques, destinés à l'investissement dans des projets d'infrastructure et à la promotion des PME et de l'innovation.
Le ministre a également noté que 45 milliards de dirhams (MMDH) seront alloués au Fonds d'investissement stratégique, précisant que dans le cadre de la loi de Finances rectificative (PLFR) 2020, 15 MMDH y seront consacrés à partir du budget général de l'Etat, alors que 30 MMDH seront mobilisés dans le cadre des relations avec les établissements financiers nationaux et internationaux, en partenariat avec le secteur privé.
Mohamed Benchaâboun a ajouté à cet égard que le décret portant création du Fonds d'investissement stratégique intervient en application des Hautes instructions de SM le Roi Mohammed VI contenues dans le discours Royal adressé à la nation à l'occasion du 21ème anniversaire de l'accession du Souverain au Trône de ses glorieux ancêtres, précisant que ce discours est porteur d'une vision stratégique pour la gestion de la crise actuelle liée à la pandémie du coronavirus.
Le Souverain, a souligné le ministre, a mis en avant dans son discours la nécessité de mettre en place un plan ambitieux pour la relance économique et une réforme structurelle majeure dans le domaine social, principalement la généralisation de la couverture sociale et l'accélération de la réforme du secteur public.
Pour opérationnaliser les Hautes orientations Royales, des mesures immédiates seront prises dans le cadre d’une mise en œuvre intégrale des orientations de SM le Roi, a-t-il affirmé, notant que ces mesures s'articulent autour de trois priorités fondamentales, à savoir la généralisation de la couverture sociale, la réforme du secteur public et le lancement d'un plan ambitieux pour la relance de l'économie.
Pour ce qui est du volet social, il sera procédé à la mise en œuvre rapide du chantier relatif à la généralisation de la couverture sociale, qui permettra de généraliser l’Assurance maladie obligatoire (AMO), les indemnités familiales et la retraite pour les familles marocaines ne disposant pas de la couverture sociale, a précisé le ministre.
Le déploiement de cette réforme se fera de manière progressive à partir de 2021, sur une période de 5 ans, et portera sur deux phases, a-t-il dit, notant que la première phase, qui s'étend de 2021 à 2023, sera marquée par le déploiement de l'AMO et des allocations familiales, tandis que la deuxième phase (2024-2025) portera sur la généralisation de la retraite et l'indemnisation pour perte d'emploi.
Le ministre a également fait part de la volonté du gouvernement d'ouvrir un dialogue constructif avec les partenaires sociaux concernant le calendrier, le cadre légal et les modalités de financement et de mise en œuvre des réformes sociales.
Pour garantir toutes les conditions de réussite de ce grand chantier, plusieurs mesures seront prises à cet égard, notamment la réforme du cadre légal et réglementaire, la réhabilitation des unités hospitalières, l'organisation des parcours de soins, la réforme des programmes sociaux en vigueur et la concrétisation du registre social unifié, la réforme de la gouvernance du système de protection sociale, ainsi qu'une réforme fiscale visant l’harmonisation de la cotisation sociale des professionnels.
Quant à la réforme du secteur public, a-t-il ajouté, la priorité sera accordée au règlement des dysfonctionnements structurels des établissements et entreprises publics (EEP), pour plus de synergie et d'harmonie dans leurs missions, et le renforcement de leurs efficacités économiques et sociales, rappelant à ce propos, la création d'une agence nationale chargée de l'évaluation de la performance des établissements publics. 
En ce qui concerne l'aspect économique, il sera procédé à l'élaboration d'un plan global et intégré pour la relance de l'économie comprenant des mesures transversales qui tiennent compte des particularités de chaque secteur, et ce dans le but d'accompagner la reprise progressive des activités des différents secteurs et créer des conditions propices à une reprise économique forte dans la phase d'après-crise, a-t-il dit, rappelant la signature du pacte pour la relance de l'économie et l'emploi et du contrat-programme relatif au tourisme (2020-2022).
En réponse aux interventions des membres de la commission, Mohamed Benchaâboun a relevé qu'un tiers des Marocains disposent d'une couverture médicale, d'où l'importance de la généralisation de celle-ci en vue d'assurer à l'ensemble des Marocains les mêmes prestations de services médicaux et de soins, déjà compris dans l'AMO, qui remplacera le régime d’assistance médicale (RAMED), abstraction faite de leurs catégories socio-professionnelles.
Suite à cette réunion, le ministre a également présenté le décret portant création du Fonds d'investissement stratégique devant la commission des finances et du développement économique de la Chambre des conseillers.  


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