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Driss Lachguar à l’ouverture du VIIème Congrès des femmes ittihadies

“Nous voulons davantage de démocratie, de modernité, de justice sociale et de dignité”


Libé
Mardi 24 Décembre 2013

Driss Lachguar à l’ouverture du VIIème Congrès des femmes ittihadies
En ouverture des travaux 
du VIIème Congrès 
des femmes ittihadies, 
le Premier secrétaire 
de l’USFP, Driss Lachguar, 
a prononcé une allocution dont voici la traduction :
 
“Au nom de la direction de l’Union socialiste des forces populaires, des congressistes, des militantes et militants de notre parti, et en mon nom propre, je vous souhaite la bienvenue au Congrès des femmes ittihadies.
Je vous remercie d’avoir répondu présent à notre invitation.
Les femmes ittihadies et toutes les femmes du Maroc, je vous souhaite la bienvenue même si vous êtes chez vous.
Mesdames et Messieurs, chère assistance
Le Congrès des femmes ittihadies se tient dans un contexte international, régional et national qui diffère de celui du précédent Congrès.
Les évènements et les changements survenus dans la région à laquelle nous appartenons ont eu des répercussions et un effet positif sur le Maroc. Ils ont donné lieu à une nouvelle dynamique, plaçant l’agenda politique du pays sur la voie des réformes constitutionnelles et politiques qui étaient en arrêt en dépit de notre requête permanente à ce sujet. La dynamique a eu lieu pour donner un nouvel élan dans le sens du changement, de la réforme et du progrès dans notre pays.
Notre parti a vécu ces événements en  tant qu’un acteur actif et responsable, en ce qui concerne tout ce qui s’est passé sur la scène nationale.
Le Congrès des femmes ittihadies se tient après notre IXème Congrès du parti   dans lequel l’USFP a décidé de donner de nouvelles réponses à de nouvelles questions qui s’imposent  à notre pays. Nous y avons demandé une nouvelle génération de réformes politiques, sociales et culturelles.  Nous n’avons pas demandé ces réformes pour des réformes, mais parce que nous voulons davantage de démocratie, de modernité, de justice sociale et de dignité. 
Notre expérience nous a permis de connaître les dysfonctionnements de la gouvernance dans notre pays ainsi que les défaillances fonctionnelles et les entraves  de la bonne gouvernance.
L’expérience de l’alternance nous a convaincus de la nécessité  vitale pour notre pays de procéder à de profondes réformes constitutionnelles  visant à :
-Veiller à la séparation nette  des pouvoirs, à leur équilibre, à leur coopération et à leur contrôle ;
-Veiller  à consolider les acquis concernant les droits des citoyens, particulièrement  des femmes, les libertés et les garanties  de la protection des citoyens. 
Mesdames et Messieurs
La question féminine apparaît, aujourd’hui plus que jamais, au cœur de la problématique de la modernisation sociétale et politique. Et ce, soit en ce qui concerne son rôle dans les structures sociales, comme la famille, soit en ce qui se rapporte à la hiérarchisation des positions au sein  de la société. De même que pour ce qui est de la contribution dans le champ de la créativité sociale et culturelle ou dans les domaines de l’élaboration des décisions structurantes des pouvoirs politique, juridique et social.
La femme marocaine est au cœur de la lutte entre des projets sociétaux opposés. Pour cela, le projet social-démocrate ne peut progresser et gagner de nouveaux secteurs sans que les femmes n’adhèrent massivement, tout en étant convaincues du projet social-démocrate et moderniste. De même que les femmes doivent avoir des positions de leadership dans le parti et dans le mouvement populaire. Partant de là, nos programmes organisationnels et politiques proposés doivent précipiter l’intégration de la femme dans les rouages décisionnels du projet sociétal moderniste, à travers l’élargissement du champ des droits, l’ouverture du monde de la connaissance, l’encouragement de la créativité et de l’innovation sociale et culturelle et le dépassement des entraves financières et morales en vue de faire adhérer les femmes dans l’édification d’une société moderne.
Si l’acquis de la constitutionnalisation d’un ensemble de droits est une reconnaissance des revendications sociales, le difficile défi reste la réconciliation économique, sociale et politique en faveur des femmes de ce pays, lequel considère la démocratisation des politiques publiques et l’adoption du genre dans les dépenses publiques comme son préambule. 
Où est la femme marocaine dans les politiques publiques ?       
Mesdames et Messieurs
La place de la femme marocaine dans les politiques publiques a souffert d’un ensemble de facteurs qui ont miné l’efficience de ces politiques. Si l’impact des crises politiques et des tensions ont retardé  la réforme politique en faveur du genre, les crises économiques et  la faiblesse de l’immunité de la décision souveraine  lors d’étapes difficiles de l’histoire du Maroc ont contribué à complexifier la situation économique et sociale de la femme marocaine et et partant à renforcer sa marginalisation. 
Nous sommes une société où les femmes subviennent aux besoins des familles sans droit.  Elles prennent en charge 19,3% de familles résidant dans les villes et 12,3% de familles rurales. 83% de ces femmes sont analphabètes et 71,7% sont divorcées ou veuves, outre le manque d’encadrement puisqu’elles n’ont ni  la capacité de diversifier les sources de leurs revenus, ni de couverture sociale, ni de protection juridique. 
Notre société n’éprouve aucune gêne à ce que ses femmes se déploient à fond, sans droit ni titre. Et pour cause, le travail non rémunéré n’est pas reconnu. C’est le  cas de toutes ces femmes marocaines au foyer qui triment et se tuent à la tâche sans que l’Etat ne leur accorde la moindre considération ni indemnité.    
Nous sommes une société qui n’est nullement gênée d’exploiter ses femmes en toute injustice, à cause de l’insuffisance de la mise en application des lois.  En effet, le secteur informel demeure celui qui attire le plus de main-d’œuvre féminine, sans protection sociale ni juridique, les salaires des femmes sont inférieurs de presque 1/3 à ceux des hommes; 90% d’entre elles ne disposent de contrat de travail et 39,9% des femmes diplômées sont en chômage.  La loi prive toujours les ayants droit de la pension de la femme décédée et de la couverture médicale dans le cas des maladies chroniques ou suite aux violences à caractère juridique ou étatique. 
Cette société n’entreprend rien face aux défaillances de sa politique sanitaire, lesquelles se traduisent par la faiblesse et la disparité  au niveau d’accès à la santé procréative d’une part et l’augmentation  des taux de mortalité maternelle et des enfants âgés de moins de 5 ans dans le monde rural en particulier. 
Nous sommes une société où s’accumulent  les causes de l’abandon scolaire dues à   l’échec de toutes les politiques publiques relatives à l’éducation de par leur nature sectorielle, complexe et contraignante. Une situation amplifiée davantage notamment chez les filles à cause de l’insécurité,  de la pauvreté et de l’absence d’infrastructures routières. De ce fait,  les filles sont souvent victimes du mariage précoce sous la couverture de fatwas obscurantistes et des interprétations erronées de la religion.  
Notre société s’est habituée aux crimes de la violence faite aux femmes dans les foyers, les rues, les lieux de travail et les établissements scolaires et à toutes les formes de violence physique, verbale et psychique, et ce au nom de la famille, des relations conjugales et professionnelles, et parfois au nom de la religion et de la loi.  Le droit pénal marocain ne protège pas la femme marocaine contre la  violence  à différents niveaux alors que la justice pénale en faveur des femmes est inexistante.
Notre société est incapable de contrer ses sombres phénomènes sociaux. Elle est l’otage des tabous et des lignes rouges. On sait qu’au moins 600 femmes meurent à cause de l’avortement clandestin, et que la traite des êtres humains notamment des femmes  ronge ses valeurs et sa stabilité, et que les femmes sont un maillon dans la chaine des maladies sexuellement transmissibles, et que l’indigence intellectuelle et culturelle et la pauvreté matérielle accentuent les pannes de la société et entravent la voie de l’équité…..
Pour toutes ces raisons et autres, le gouvernement de l’Alternance a ouvert des chantiers pour réaménager les infrastructures : routes, électrification du monde rural, approvisionnement en eau potable, augmentation du taux de scolarisation, dépassement des effets négatifs du PAS sur la société et notamment les femmes et les enfants par des projets de réforme qu’il a lancés. Aujourd’hui, nous sommes dans l’opposition, et nous constatons les régressions que notre pays a enregistrées sous ce gouvernement. Nous luttons aux côtés de la femme marocaine et avec elle pour l’instauration des politiques publiques avec les mécanismes juridiques qui garantissent les droits politiques, économiques et sociaux des femmes marocaines, à commencer par :
- L’harmonisation du cadre juridique national avec les conventions et les traités nationaux ;
- L’annulation de l’ensemble des lois discriminatoires  à l’encontre des femmes ;
- Le changement de l’approche  relative au Code de la famille et de le considérer comme une affaire en introduisant des amendements pour garantir l’égalité entre les femmes et les hommes, interdire la polygamie et incriminer le mariage des mineures ;
- L’élaboration d’une justice pénale en faveur des femmes et la promulgation d’une loi-cadre contre la violence ;
- L’ouverture d’un débat sérieux relatif à l’héritage ;
- La reconnaissance par l’Etat marocain  du travail non rémunéré des femmes en perspective de l’indemniser ;
- L’adoption d’une politique de l’emploi pour lutter contre le chômage des femmes ;
- L’élaboration de politiques qui consolident l’économie solidaire en faveur des femmes. 
 - Facilitation d’accès des filles à l’enseignement notamment dans les campagnes et les zones marginalisées ;
- Le développement du cadre juridique relatif à la santé reproductive et la garantie de l’accès et de la gratuité ;
- La révision des normes pour bénéficier du régime de l’assistance médicale au profit des femmes pauvres ;
- L’ouverture d’un débat sérieux sur l’avortement dans la perspective de sa réglementation ;
- La reconnaissance des ayants droit dans la retraite des adhérentes aux caisses de retraite en cas de décès ; 
- La pénalisation des écarts de salaire entre les femmes et les hommes dans le secteur privé, et l’adoption des mécanismes d’inspection du travail spécifique ;
- La réforme immédiate de la loi organique des finances par l’institutionnalisation de l’approche genre dans le budget, l’adoption d’un budget favorable au genre dans les dépenses publiques pour garantir l’égalité, et la réforme du Code général des impôts dans le sens d’une justice fiscale au profit des femmes, en plus de l’obligation d’adoption d’un budget-genre dans les budgets locaux.
- L’appui de la participation politique et syndicale des femmes et l’élargissement de leur représentativité dans les centres de décision politique et économique en application du principe d’égalité, en commençant par la révision des lois électorales.
Il est nécessaire de rappeler le calvaire qu’endurent nos sœurs dans les camps de Tindouf et de soutenir leur lutte pour la liberté et l’égalité.
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes un parti d’opposition. Notre rôle est donc, comme le stipule la Constitution, d’observer, de contrôler et critiquer  l’exercice du gouvernement. Tout en sachant que le gouvernement actuel - et son chef tout particulièrement- bénéficie d’un certain nombre d’attributions et de prérogatives, contrairement à tous les  gouvernements qui se sont succédé dans notre pays depuis l’Indépendance. Et ce, dans le but de mettre en place des réformes et de répondre aux attentes des concitoyens. 
Car notre pays a besoin de réformes. Et qui dit réforme dit promulgation de lois. Nous déplorons dans ce sens la déficience notoire de ce gouvernement en matière de législation.
 Gouverner, Mesdames et Messieurs, c’est savoir  prendre des  initiatives appropriées, c’est répondre aux attentes du peuple. Et que constatons-nous malheureusement à l’heure actuelle, après un an? Un marasme politique. Une absence d’initiative, que ce soit  dans le domaine économique, social, culturel ou politique. 
L’essence même de notre combat politique, en tant que parti d’opposition, a toujours été de doter notre pays d’une vraie  Constitution, qui soit  moderne et démocratique. Cette Constitution est  devenue aujourd’hui une réalité. Et nous devons œuvrer pour sa mise en vigueur, dans un contexte de démocratie, d’ouverture, de modernité, et de transparence politique.
Nous voulons redonner à l’engagement politique sa crédibilité, afin que  nos concitoyens se réconcilient avec la chose politique.
Mesdames et Messieurs, 
Notre cause nationale requiert, à l’heure actuelle,  une vigilance toute particulière. Les négociations et les pourparlers non officiels n’ont  malheureusement pas été concluants. Il nous faudra donc  opter pour une nouvelle approche. Nous tenons, à cette occasion, à rappeler aux Nations unies que nous récusons absolument toute révision des attributions actuelles de la MINURSO.
Ces  attributions ne devraient nullement  déborder du cadre qui leur échoit depuis le début des négociations, sous l’égide de Conseil de sécurité.
 Les Nations unies sont donc appelées à assumer leur  rôle d’intermédiaire, dans ce conflit artificiel. D’autre part, notre diplomatie doit faire preuve de vigilance et de persévérance sur la scène internationale, et travailler en collaboration avec toutes les forces vives qui s’investissent pour trouver une issue à ce conflit, sur la base de l’Initiative  marocaine d’autonomie.
Dans ce cadre, nous appelons au renforcement du front intérieur, par le truchement d’une consolidation de la démocratie et de réalisations économiques, sociales, et culturelles dans nos provinces du Sud, et particulièrement en faveur de la jeunesse”. 


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