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Des absences annoncées au Pacte mondial sur les migrations prévu à Marrakech

La Pologne et Israël renflouent la liste des pays réfractaires


Hassan Bentaleb
Jeudi 22 Novembre 2018

L’avenir du Pacte mondial de l’ONU sur les migrations sera-t-il compromis ? En fait, l’ « effet domino » tant redouté après le retrait américain de ce Pacte en  2017 a fini par advenir. Ainsi, après l’Autriche et la Hongrie, c’est au tour d’Israël, de la Pologne et de l’Australie de déclarer qu’ils ne signeront pas ledit Pacte.  
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien, a ainsi annoncé mardi dernier avoir donné comme instruction au ministère des Affaires étrangères de ne pas apposer sa signature au bas de ce document. Il a également affirmé que son pays est engagé à surveiller ses frontières contre l’arrivée de « migrants illégaux » comme ce fut toujours le cas. Idem pour le gouvernement polonais qui trouve le Pacte inapte à répondre aux exigences de ce pays qui veut de solides garanties pour que chaque signataire ait le droit de décider en toute indépendance quels migrants il accepte de recevoir ou non. Varsovie reproche  également au Pacte de ne pas établir de différence suffisante entre les migrations irrégulières et régulières.
De son côté, l’Australie refuse de signer ce Pacte car elle estime qu’il va à l’encontre de l'intérêt national de l'île-continent puisqu’il risque d'encourager la migration illégale vers le pays.  Le gouvernement conservateur en place  considère l’Australie comme "la nation d'immigration la plus réussie au monde" et estime que le Pacte ne va pas permettre "d'améliorer la capacité du pays à contrôler ses frontières et à gérer avec succès son programme migratoire".
Des prises de positions qui rappellent celles de la Hongrie, dirigée par le gouvernement du souverainiste Viktor Orban qui avait annoncé en juillet dernier son retrait du prochain Pacte et de celui de Washington duquel il s’est retiré fin 2017 alors qu’il était encore en cours d’élaboration au prétexte qu’il comprenait des dispositions contraires à la politique d’immigration de Donald Trump.
Peter Szijjarto, ministre hongrois des Affaires étrangères, a déjà déclaré que le document en question était « dangereux pour le monde et la Hongrie », car il « incitera des millions de personnes à prendre la route ». Il a même indiqué que son pays ne croyait pas au caractère non contraignant du document. En effet, et lors du processus de négociation, Budapest avait exprimé sa préoccupation concernant le fait que l’accord qui sera signé à Marrakech puisse, à terme, forcer les gouvernements à ouvrir leurs frontières aux migrants.
D’autres pays risquent dans les jours qui viennent d’emboîter le pas aux réfractaires. Tel est le cas de la Slovénie dont le Premier ministre a déclaré mardi dernier que la signature de ce Pacte pourrait provoquer un afflux de migrants dépassant les capacités d’accueil de son pays. Le Parti national slovaque (SNS), membre de la coalition gouvernementale, a même annoncé son intention d'empêcher la Slovaquie de ratifier l'accord puisqu’un vote est prévu au Parlement fin novembre ou début décembre. Le principal parti d'opposition, la formation eurosceptique Liberté et Solidarité (SaS) et le Parti populaire (extrême droite) sont également hostiles au Pacte.  
En Belgique, ce texte fait également polémique. Le parti nationaliste N-VA (Nieuw-Vlaamse Alliantie, en français, Alliance néo-flamande ou Nouvelle Alliance flamande) réuni le 19 novembre courant a qualifié ce texte de "très problématique" et s’est déclaré très préoccupé par ses éventuelles implications juridiques tout en précisant qu’il va à l’encontre de sa vision de la migration et de la politique gouvernementale.
Le bureau du parti compte expliquer et défendre cette évaluation au sein du gouvernement. Une position qui ne semble du goût de Charles Michel, Premier ministre qui s’est engagé en septembre dernier à la tribune de l'ONU de signer ce Pacte lors du Sommet de Marrakech sur les migrations prévu en décembre.
Pourtant Mohammed Charef, géographe – urbaniste et expert dans le domaine des migrations et de la mobilité des populations estime que le retrait de ces pays n’aura pas d’impact sur l’adoption dudit Pacte vu son caractère non-contraignant. D’après lui, ce document n’est pas juridiquement opposable. D’ailleurs, son préambule précise que ce document ne représente qu’un cadre de coopération juridiquement non contraignant. Et rien dans le texte ne permet de contraindre un Etat à appliquer les instruments prévus par l’accord s’il ne peut pas ou ne veut pas le faire pour cause de contexte national.
Concernant le retrait de certains pays de ce Pacte, notre source nous a expliqué qu’il s’agit de pays dirigés actuellement par des partis de la droite dure pour ne pas dire l’extrême droite, tout en précisant que leur argumentaire qui repose sur le fait que ledit Pacte risque de leur faire perdre leur souveraineté en matière de gestion de la migration est totalement erroné  puisque le texte n’est pas contraignant . « La raison qui sous-tend la décision de se retrier est à chercher plutôt dans la manière avec laquelle ces pays gèrent déjà la question des migrations et la façon avec laquelle ils traitent les migrants.  L’Australie, par exemple, est régulièrement critiquée par les agences onusiennes pour son incarcération des migrants irréguliers dans des centres délocalisés dans des îles du Pacifique. Une position qui n’a rien de nouveau puisque ce pays a pris l’habitude, depuis 30 ans, de rejeter un grand nombre de recommandations de l’ONU en la matière », nous a-t-elle expliqué. Et de poursuivre : « La position de ces pays trouve également son explication dans leur alignement sur la position des Etats-Unis dont le retrait du Pacte était prévisible vu la position de Donald Trump sur l’accord de Paris et d’autres conventions multilatérales».
S’agissant de l’impact du retrait de certains pays européens sur la position que l’Union européenne devra adopter en décembre prochain, Mohammed Charef nous a affirmé que le Vieux Continent n’a jamais eu de position commune sur la question migratoire et que chaque pays garde sa souveraineté en la matière.


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