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Dakhla : l’enfer dans un coin de paradis


Par Hamada Eddarouiche
Vendredi 30 Septembre 2011

Dakhla : l’enfer dans un coin de paradis
Oui, jusqu’à quand la cécité va-t-elle frapper ?
Dakhla à feu et à sang?  
Dakhla l’emblème béni, Dakhla la cité radieuse sortie de terre, rebâtie et embellie par le génie et la volonté marocaine ? Dakhla dont les images sublimes faisaient blêmir nos ennemis!
Je suis désolé et en colère à l’instar de tous ceux qui éprouvent une  aversion profonde pour la pagaille, le vandalisme et la criminalité.  
Je suis désolé et en état de grande tristesse lorsque je vois les fruits  de tant d’efforts s’abîmer sans que des solutions radicales soient  trouvées!
Je suis en colère ! La colère d’un homme qui avec d’autres, a tout quitté pour une idée : celle de contribuer à l’édification moderne d’un grand pays, d’un espace maghrébin prospère et paisible !
Les démons de la discorde, de la stupidité se sont emparés de certains de nos compatriotes et l’injustifiable, la démence a submergé les cœurs effarés. Un vent de folie vient de balayer la cité de Dakhla, la perle des provinces du Sud, bâtie sur la plus belle baie de notre façade atlantique.
Lucifer a fait une entrée triomphale dans les rues de Dakhla, l’enfer au paradis, les actes démoniaques dans une cité réputée paradisiaque.
L’enfer c’est surtout l’appartenance au même corps des auteurs des actes macabres !
«Depuis six mille ans la guerre plait aux peuples querelleurs,  et Dieu perd son temps à faire les étoiles et les fleurs… » (Victor Hugo)
La preuve est donnée que la beauté des lieux ne suffit pas, que les efforts des hommes à construire du bâti ne suffisent pas, que les ronds-points, les jets d’eau et les fleurs, ne suffisent pas !
Que l’homme serait bien inspiré aujourd’hui de réviser de façon déchirante ses concepts de développement et de cultiver une autre manière d’être au monde, une autre manière d’être ensemble, une autre manière de savoir être et de chercher du sens !  
 Il nous faut en urgence trouver les outils pour vivre côte à côte sur la même terre et avec le même projet !
Il y a plus de trois décennies était organisée la Marche Verte ! Ce tsunami sans dégâts et fertilisant, épique et transcendant, d’une puissance symbolique inouïe, a redonné du souffle pour un siècle à une grande Nation tant malmenée par la prédation colonialiste!  
Cette marche qui a émerveillé le monde après 35 ans d’efforts de développement, de sacrifices et de labeur, son souvenir est encore prégnant dans l’esprit de tous !
Peut-on se permettre de laisser l’héritage de nos pères et ancêtres se dissoudre dans l’ignorance, le laxisme, l’irresponsabilité et nous conduire à la dislocation du tissu social et l’installation de la haine ?
La confiance, cette confiance précieuse, qui signifie partager la même foi, en son Dieu, en sa patrie en son Roi, ce ciment irremplaçable des grandes Nations, que nous devons consolider et renforcer, en réponse aux appels de Sa Majesté le Roi, au moment où des mutations politiques profondes s’opèrent, cette confiance irremplaçable se trouve malmenée.
Dakhla, notre orgueil national !  Les mêmes scènes de barbarie ont été déclenchées il y a quelques mois, au moment où des artistes de renommée internationale, devaient enchanter la jeunesse de la ville au climat doux. Le concert du «Zoulou blanc» Johnny Clegg, l’artiste blanc non raciste d’Afrique du Sud avait été annulé pour raison d’escarmouches entre des concitoyens que la race, la religion, la langue ne différencient point…Quelle cruelle coïncidence ! Quelle cruelle démission d’une société, toutes composantes confondues, qui devait se réveiller et éradiquer le mal qui couvait pour prévenir toute métastase !  Aujourd’hui, un pas de plus est franchi, des frères, des enfants de la famille Maroc, condamnés à vivre, travailler, procréer, mourir ensemble sur le même territoire, des compatriotes armés de gourdins, de pierres, de machettes, se sont affrontés et nous pleurons des vies humaines et des dégâts matériels importants.
Ces sacrifices incommensurables, au lieu d’être consentis à une cause nationale, creusent un fossé entre nos communautés et fissurent l’édifice de notre cohésion nationale.
Les sinistres évènements de Laâyoune en novembre de l’année dernière auraient dû, eux aussi, nous imposer une réflexion profonde, sereine et objective sur les causes et conséquences de tels événements pour mettre en place un arsenal de mesures propres à éradiquer le mal.
Jusqu’à quand va-t-on se contenter de demi-mesures? Jusqu’à quand va-t-on regarder la réalité avec une vision étriquée, celle de myopes qui regardent les évènements de trop près et n’en voient qu’une infime partie, incapables qu’ils sont à en saisir tout l’ensemble et la gravité du mal?  Pas de bon diagnostic, pas de bon remède ! C’est aussi simple que cela !
L’ampleur du désastre de Laâyoune aurait dû entraîner un sursaut national et il aurait fallu mobiliser toutes les forces vives de ce pays pour dire : « Plus jamais ça ! »
Réfléchissons aux causes du malaise qui doit être traité d’urgence, nous n’avons aucune raison de laisser les pyromanes, les illuminés, les envieux, les apôtres de la pauvreté d’esprit, les indigents en idées fédératrices, tenir le haut du pavé dans nos villes !
Nous avons le devoir et la responsabilité de rechercher les solutions radicales pour bannir à jamais des scènes récurrentes aussi détestables que celles que nous venons de vivre à Dakhla.  Par un débat ouvert, franc et sincère, nous arriverons à dépister les maux et à trouver la meilleure prophylaxie pour les enrayer.
Prenons le taureau par les cornes, regardons la réalité en face ; elle ne nous fait pas peur ! Lui tourner le dos aujourd’hui serait décider  en toute conscience, l’installation durable de la discorde, du désordre, de l’anarchie et du chaos. La peste et la haine sont aux portes de nos cités, le fléau est contagieux, fulgurant.  
Aux grands maux, les grands remèdes !
Aucun observateur averti ne peut reprocher à l’Etat une forme d’austérité quelconque dans la mobilisation des moyens voués au développement des provinces du Sud, depuis trois décennies. Le reproche serait dans la répartition de la manne, la hiérarchisation des priorités, la naissance de véritables cartels voraces et usurpateurs qui ont spolié l’Etat et la population. Dans ce domaine, les correctifs son relativement faciles, la volonté politique de l’Etat est réparatrice.
La grande difficulté réside dans le domaine de l’invisible, les rapports humains, le lien social, les sentiments, la chaleur humaine et les rapports de bonne citoyenneté à tisser entre les hommes que tout unit et rien ne sépare.  Nous vivons un déficit de communication très grave entre les différentes composantes de la population des provinces du Sud et ce dysfonctionnement est source de méfiance. Il élève un mur de béton entre des frères et empêche l’interpénétration, la symbiose et cloisonne des groupes sociaux que rien ne différencie. Le corps social au Sud n’est plus vascularisé, il n’est pas oxygéné et s’atrophie.  
A la jeunesse, on n’inculque plus de grandes choses, les élus cultivent le clientélisme mais n’ont pas pour idéal de former le citoyen, d’élever les âmes, de transcender les cœurs, d’enrôler les esprits dans un  projet commun : l’édification d’un grand pays !
Les activités associatives, culturelles, sportives, excellent moyen de créer des relations d’amitié, de convivialité entre les voisins et résidents d’une même zone urbaine ne sont pas assez favorisées, elles sont un outil de vulgarisation des percepts de la citoyenneté dont l’absence occasionne l’irrespect de la chose publique et privée. Le déficit en communication est un cadeau fait aux détracteurs de notre intégrité territoriale, qui sont champions dans la gestion du «ministère de la parole et de la propagande», ils n’ont d’ailleurs que ça à faire.
Pour nos jeunes, en urgence, vite ! A toute vapeur, éducation, éducateurs de rue, sport à outrance, scoutisme, citoyenneté, règles de vie, repères, acteurs sociaux…Toutes les techniques qui recréent du lien social aujourd’hui, doivent être notre absolue priorité !
La classe politique locale, les décideurs, sont à quelques rares exceptions, les mêmes depuis trente ans. Le Maroc est en mutation depuis une décennie et la classe politique aux commandes appartient à une époque révolue. La vision de ces décideurs est sclérosée ! Ils souffrent de cataracte politique, ce qui les rend largement incompétents !  
Nous ne cherchons pas à faire leur procès, le bons sens et l’air du temps les condamnent à la retraite. Aujourd’hui, ils sont les premiers freins du développement. Le principe est simple : on doit changer une équipe qui perd match sur match. Les nôtres ont trop tendance à marquer contre leur camp.
Les chefs dits traditionnels ont donné la preuve de leur inefficacité et leur manque de crédibilité lors des événements de Laâyoune (G’deim Izik). Ils n’ont rien vu venir, ont été incapables de démanteler une seule tente. Ils ont été désignés par l’administration, sans référence aux véritables critères ancestraux et ne sont pas non plus élus démocratiquement.
Cette ‘’institution ‘’est à réformer d’urgence pour la mettre à niveau et la rendre apte à mieux gérer les problèmes tribaux. Ils sont appelés à solutionner la déconfiture du cocon familial dans une société traditionnelle en profonde mutation où le conflit des générations est en gestation avancée et l’échelle des valeurs sérieusement bouleversée.
La médiocrité des outils didactiques, notamment audiovisuels, laisse  le champ libre aux systèmes peu favorables à notre cause. Les télés étrangères  polluent les esprits de notre jeunesse et dressent des barrières entre nos communautés.
Il faut aussi noter une très faible implication des personnes ressources et des cadres dans la défense de notre cause nationale tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Les critères de participation à ce travail, encadré et géré par les services de l’Etat, ne prennent pas toujours en compte ni la compétence, ni la méritocratie. Ils sont trop souvent le fruit du clientélisme, du tribalisme, du désir de modification des équilibres anciens hérités de plusieurs siècles de cohabitation des populations du Sahara, de la part de responsables mus
par des intérêts sectaires.
Tous ces inconvénients précités sont une conséquence ou ont un lien solide avec la manière de gérer de l’Administration.
Dans ce dossier, nous avons beaucoup d’accumulations et reports, les décideurs laissent à leurs successeurs des instances épineuses qu’ils n’avaient pas voulu ou pu régler.
L’exception sahraouie est un concept qui a souvent été détourné pour masquer un laxisme, justifier un favoritisme, soustraire au droit commun des malfrats, alors qu’il s’agit d’un élan de solidarité magnifique destiné à permettre au Sud de combler son retard et d’effacer les stigmates de la colonisation.
L’assistanat émousse les ambitions, réveille les convoitises, engendre inégalités et abus dont les conséquences sont désastreuses.  
Le meilleur exemple est celui des fonds de solidarité que des élus véreux utilisent pour des besoins électoraux ! Les fonds publics chèrement collectés sont utilisés par des particuliers pour asservir des citoyens, acheter leur conscience, tuer en eux la citoyenneté et le patriotisme. C’est véritablement le pays dans sa substance qu’on assassine !
L’ascenseur social au Sud est devenu l’argent, dans une société au départ immatérielle et ceci a inversé la pyramide sociale et chamboulé l’échelle des valeurs.
L’Etat reste le premier sinon l’unique employeur et donateur au Sud.
La responsabilité de moraliser et d’éduquer est la sienne! Il n’est  jamais trop tard, mais le temps presse et le rafistolage ne sert à rien, il faut une politique de concertation et de rigueur, des mesures  radicales, une reddition des comptes...  Le souvenir des sinistres événements de G’deim Izik est vivace, les fauteurs de troubles et leurs commanditaires ne sont pas au-dessus des lois ! Leur impunité n’est-elle pas une des causes de la récidive?
«La vie n’est pas la joie. C’est tension dans l’effort continu; c’est le labeur physique et le surmenage intellectuel; c’est l’austère accomplissement du quotidien devoir» T. Monod.
Je me permets de répéter un cri lancé dans l’un de mes précédents articles : Ici et maintenant, construisons la Confiance!


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