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Chez Ba Abdellah, un marketing «bédouin made in Rissani»


MAP
Jeudi 6 Octobre 2011

Chez Ba Abdellah, un marketing «bédouin made in Rissani»
A Fès, il est improbable, impensable même, d'être un bon habitué des crémeries et laiteries de la ville, sans avoir, ne serait-ce qu'occasionnellement, succombé à la tentation du menu "Raib-Harcha-Jben-miel" de chez Ba Abdellah "dial" consulat. Une tentation qui peut, même, mener certains à vanter les bienfaits nutritionnels et économiques surtout, de ce menu, que tous les diététiciens du monde pointeraient du doigt.
D'abord, il ne serait pas inutile de mettre au clair une zone d'ombre qui pourrait intriguer plus d'un : la propriété de cette fameuse "Mahlaba" ne revient pas au consulat de France. Elle est seulement la voisine, la "concurrente" en matière de "célébrité" et de repérage.
La parenthèse fermée, il y a lieu de noter que si ce lieu assez banal, où on vient savourer des spécialités authentiquement marocaines bon marché, attire chaque jour une foule nombreuse, c'est logiquement en raison d'un rapport qualité-prix défiant toute concurrence.
Mais sa "notoriété", elle la tire, en premier ressort, de Ba Abdellah, le "charismatique" maître des lieux, qui sait chaque fois surprendre son client par ses techniques marketing avérées et par une langue difficilement classable, qui emprunte de l'arabe, du français, de l'anglais, du dialecte et de l'amazigh.
Enveloppée dans un accent du sud, du côté de Rissani, la langue de Ba Abdellah a le mérite d'être explicite, gaie, directe et croustillante à la fois.  "L'essentiel pour moi, c'est que le client part en bonne humeur et retient l'adresse de la Mahlaba comme celle de sa maison !", lance Ba Abdellah sur un ton sûr, digne de ces commerciaux tirés à quatre épingles et bien sûrs d'eux.
Baignant dans son tablier blanc bien propre, Ba Abdellah ne se lasse jamais de "nourrir" sa fidèle clientèle, tout en créant une ambiance qui rend le sourire aux plus grincheux, ces "créatures" aux visages fermes que Ba Abdellah "reçoit chaque jour un peu plus!".
Pour dire qu'il n'y a plus de beurre, par exemple, il n'y va jamais par un seul chemin : "Désolé mon ami, fin des émissions!", "Nous sommes à Dieu et à Lui nous retournons".
Si cette technique de vente bien expérimentée ne va pas droit au but, en raison d'un client de mauvaise humeur ou à la capacité d'assimilation en souffrance, Ba Abdellah trouvera toujours le moyen d'arracher ce petit sourire, cette "denrée" devenue de plus en plus rare. Alors, avant que le client, ce "roi" exigeant, impatient et volatile dans le jargon du marketing stratégique, ne rebrousse chemin, Ba Abdellah lui tend un bon vert de petit lait. Normal. La fidélisation, c'est sa spécialité. Inutile d'essayer de catégoriser Ba Abdellah dans un courant de marketing ou dans l'autre. Parce que, tout simplement, ni son milieu social ni son niveau d'étude ne lui auraient permis de mettre le pied dans une école de commerce, aussi rudimentaire soit-elle, ou de connaître un Kotler par exemple, ce must du marketing que tout étudiant doit lire absolument. Sa science à lui s'est nourrie jour après jour dans un environnement aride, où les dunes d'Errachidia adoucissent l'âme et apprennent, à qui le veut, à aimer les humains. Tous les humains.
Mises à part ses compétences en marketing, qui ne sont plus à démontrer, Ba Abdellah sait aussi être un bon manager. Sa science de gestion d'équipe est simple : "Servir le client avec le sourire et agir en bon chef d'orchestre".
La traduction de cette "stratégie en manœuvres tactiques", expression chère aux Mercateurs, se fait sans fausse note aucune. Tous les gestes de sa petite équipe bien rodée sont tissés par les mêmes fibres. Tous les regards se croisent dans un même élan. Le résultat : Ba Abdellah est un chef d'orchestre heureux. Aucun élément ne peut alors apporter une fausse note dans ce paysage harmonieux.
Alors que le jour s'apprête à remettre les clefs à la nuit, la laiterie "dial" consulat devient presque déserte de ses clients. Ils sont alors remplacés par des hommes et des femmes, des petits comme des grands, aux yeux presque fermés par la fatigue, le temps et le besoin et aux allures de petites silhouettes prises dans les tourments de la vie.
Ils viennent chaque soir frapper à la porte de Ba Abdellah, qui ôte le tablier du commercial et du gérant pour endosser celui qu'il perfectionne le plus : Ba Abdellah l'homme.


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