Cap 2020, un objectif irréalisable pour le ministre du Tourisme

«Est-ce qu’on va atteindre 20 millions de touristes en 2020? Je ne crois pas», nous a déclaré Lahssen Haddad, ministre du Tourisme, lors d’un point de presse organisé à Rabat pour la présentation des résultats de la saison touristique écoulée. «Vous avez tous pu constater que nous n’avons pu atteindre les objectifs fixés dans le cadre de la Vision 2010 que trois ans après», a-t-il argué avant de rectifier son tir en assurant que l’objectif escompté demeurait réalisable. «Nous sommes bien positionnés pour l’atteindre», a-t-il dit en substance.

Interrogé par Libé sur les causes de l’érosion du rythme de progression des arrivées touristiques durant les trois dernières années (le taux de progression des arrivées touristiques est passé de 11,4% en 2010 à 0,6% en 2011 pour se situer à 0,4% en 2012 selon BAM), le ministre a répondu que ce taux avoisinerait les 10% en 2013. « Je crois qu’avec un rythme de progression des arrivées touristiques moyen oscillant entre 8 et 10%, on pourrait atteindre 18 ou 19 millions de touristes à l’horizon 2020».

Interpellé sur la situation du secteur, dont les arrivées augmentent à un rythme conséquent (7% en 2013 et 10% durant les deux premiers mois de 2014) , alors que les recettes ont baissé (1,3% en 2013 et 0,9% à fin février 2014 selon l’OC), il a imputé cette baisse au fait que le pouvoir d’achat des touristes en provenance des principaux pays émetteurs est en nette dégradation à cause de la crise, ainsi qu’à la situation géopolitique dans la région qui ne cesse de se détériorer selon lui, mais aussi à la stratégie de ciblage adoptée actuellement. Concernant cette dernière, il nous a assuré qu’il y a des niches sur lesquelles le Maroc se concentre plus que sur d’autres. 

Côté chiffres, le ministre a indiqué que les recettes du tourisme ont atteint  60 milliards de dirhams (MMDH) en 2013, et ce contrairement à ce qu’a affirmé l’Office des changes lors de la publication au début de janvier dernier des résultats préliminaires des échanges extérieurs (l’Office les avait évalués à 57,6 MMDH avant de les occulter dans sa publication des indicateurs des échanges extérieurs). 

Les chiffres de cet Office, seul habilité à donner des statistiques du genre, démontrent clairement que les recettes du secteur ont poursuivi le trend baissier sur lequel elles se sont inscrites durant les trois dernières années. En fait, elles ont enregistré en 2013 une baisse de l’ordre de  1,03% par rapport aux 58,2MMDH enregistrés en 2012, soit le même niveau qu’en 2007 mais avec plus de près de trois millions de touristes.

Rappelons qu’en 2007, le Maroc avait accueilli 7,4 millions de touristes en 2007, générant 58 MMDH de recettes touristiques.

En ce qui concerne la conjoncture géostratégique évoquée par le ministre comme cause de la stagnation du secteur, il y a lieu de souligner que la Tunisie, qui vit la même conjoncture voire pire, a pu générer des recettes touristiques en augmentation de 1,7% par rapport à 2012.