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Babylone s’offre une cure de jouvence


AFP
Lundi 15 Juillet 2013

Babylone s’offre une cure de jouvence
Les jardins suspendus de Babylone étaient l’une des sept merveilles de l’Antiquité. Une ONG américaine tente de restaurer la cité endommagée par la guerre et les constructions de Saddam Hussein pour lui faire reprendre sa place dans le patrimoine de l’Humanité.
Un ouvrier fait glisser le disque de sa scie sur le sol de béton pendant que ses collègues le réduisent en morceaux à l’aide de burins: difficile à croire, mais la restauration de la porte d’Ishtar est un travail d’orfèvre.
Coulées à l’époque de Saddam Hussein (1979-2003), les dalles en béton recouvrent l’espace entre deux murailles de briques décorées de bas-reliefs, représentant des dragons et des taureaux.
Cette aberration a sérieusement esquinté le monument vieux de 2.500 ans et “accéléré le processus de dégradation du site. Nous essayons d’arrêter ou tout du moins de ralentir les mécanismes qui poussent la porte à s’affaisser”, explique Jeff Allen, chef des travaux de rénovation sur le site.
Babylone, avec sa ziggourat qui pourrait avoir inspiré le mythe de la Tour de Babel, était le symbole de la grandeur de l’empire qui a connu son apogée sous Nabuchodonosor II au VIe siècle avant J.C.
L’ONG américaine Fonds mondial pour les monuments (Word Monument Fund, WMF) coopère avec la Commission irakienne des antiquités et du patrimoine pour restaurer le site et préparer un dossier pour obtenir son inscription dans le patrimoine mondial de l’Unesco.
Le projet, baptisé Future of Babylon, est essentiellement financé par le gouvernement américain.
La Porte d’Ishtar, à ne pas confondre avec celle exposée au musée de Pergame de Berlin, est l’une des huit portes qui menaient à la cité intérieure de Babylone.
En retirant le béton sur la Porte d’Ishtar, “le sol va pouvoir respirer et l’eau s’évaporer. A l’heure actuelle l’eau ne peut pas s’échapper, elle emprunte donc le chemin le plus simple pour passer à la surface”, en remontant par la porte elle-même, explique Jeff Allen. Les dalles ne sont pas la seule malédiction à frapper la Porte d’Ishtar. Une couche de béton a été coulée à la va-vite sur le dessus de la porte et s’est transformée en une rigole qui dirige l’eau de pluie sur les murs.
La porte est aussi truffée de briques posées récemment et qui devront être remplacées par d’autres, plus respectueuses de l’histoire du monument.
Enfin, un long mur de très piètre facture a été érigé le long de la Voie des Processions qu’a foulée Alexandre Le Grand.
“C’est vraiment du très mauvais travail. (Ce mur) est construit directement sur le monument original”, se lamente Jeff Allen.
Ces ajouts remontent aux années 1970, mais se sont multipliés sous l’égide du dictateur Saddam Hussein, poursuit-il.
“Saddam Hussein avait donné l’ordre de rendre Babylone +présentable+ pour un festival qu’il comptait y organiser”, raconte-t-il. “C’est un désastre du point de vue de la préservation du patrimoine”.
Sur l’une des collines qui surplombent Babylone, l’ancien dictateur renversé par une opération militaire américano-britannique en 2003, s’était fait construire un palais. Aujourd’hui, le bâtiment à l’abandon est couvert de graffitis laissés par des intrus.
Saddam se voyait en héritier de Nabuchodonosor II, qui a fait de Babylone la capitale d’un grand empire incluant la Syrie et la Palestine. Mais il a fini pendu en décembre 2006 après avoir été condamné par la Justice de son pays.
Le despote déchu n’a pas le monopole du massacre de Babylone, tombé dans l’oubli avant d’être redécouverte par l’archéologue allemand Robert Koldewey à la toute fin du XIXe. Bien avant lui, les Britanniques n’ont pas hésité à y faire passer une ligne de chemin de fer. Des routes l’ont traversée, tout comme trois oléoducs.
Trois parkings en dur se trouvent sur le site de Babylone et ont servi de base aux troupes américaines et polonaises dans la foulée de l’invasion de l’Irak en 2003.
“Cela fait des décennies et des décennies que ce site est maltraité. Ça suffit!”, s’échauffe Jeff Allen.
“Aujourd’hui, le problème, ça n’est plus Saddam ou l’occupation militaire. Ce sont les gens qui construisent des maisons sur tout le site et personne ne lève le petit doigt parce que le gouvernement est incapable d’appliquer les lois en vigueur”, explique-t-il.
Les nouvelles habitations sont en total décalage avec la majesté du site. Elles constituent aussi un énorme risque pour les vestiges qui reposent encore sous terre en raison des infiltrations des eaux usées.
Le Fonds mondial pour les monuments veut également renforcer la capacité des Irakiens à gérer leur patrimoine culturel.
L’Irak a tenté, en vain, de faire entrer Babylone au Patrimoine mondial de l’Unesco.
“Notre travail consiste à restaurer Babylone et à faire en sorte que le site soit reconnu comme Patrimoine mondial”, mais l’entreprise s’avère coûteuse, reconnaît Hussein al-Amari, chef du département des Antiquités dans la province de Babylone.
Et le gouvernement irakien ne s’est pas montré spécialement généreux jusqu’à maintenant.
“Le financement des travaux d’archéologie est largement déficient”, regrette Jeff Allen.


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