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Accrochages entre autochtones et migrants à Oujda


Hassan Bentaleb
Samedi 4 Septembre 2021

Un regrettable fait divers plutôt que d’y voir quelques relents d’une xénophobie qui n’a pas lieu d’être

Un affrontement a éclaté jeudi à Hay El Bakkay à Oujda entre des migrants subsahariens et des habitants de ce quartier. Selon certaines sources, une discussion entre la propriétaire d’une maison et ses locataires (migrants) a dégénéré en attaque violente contre ces derniers menée par les jeunes du quartier. « Il s’agit d’une simple altercation qui s’est vite transformée en vraie bagarre entre des migrants subsahariens et des habitants dudit quartier. Tout a commencé vers 16h30 lorsque la propriétaire d’une maison à Hay El Bakkay a demandé à ses locataires subsahariens de quitter leur logement. Et pour cause : ces derniers sont accusés d’accueillir trop de monde et de faire du tapage. Un argument qui ne semble pas convaincre lesdits locataires qui ont rappelé à la propriétaire que l’expulsion d’un logement exige au moins un préavis afin qu’ils puissent chercher un autre lieu où se loger », nous a confié une source, témoin des affrontements. Et de poursuivre : « Et il a suffi de peu pour que les esprits se chauffent et les discussions prennent un ton agressif avant que la propriétaire, accompagnée de ses filles, et les locataires n’en viennent aux mains ». Notre source nous a affirmé que cette bagarre a pris, par la suite, une dimension communautaire lorsque chaque partie a fait appel à sa communauté pour se défendre. « Les habitants du quartier El Bakkay à majorité marocaine se sont solidarisés avec la propriétaire de la maison et ont attaqué les migrants subsahariens avec des pierres et des bâtons. Et il a fallu l’intervention des forces de l’ordre pour déloger les jeunes Marocains qui ont assiégé ladite maison où se sont barricadés les migrants qui ont refusé d’en sortir de peur d’être attaqués par une foule immense et déchaînée. La police est intervenue et a arrêté neuf personnes (2 hommes, 2 femmes et 5 mineurs, tous des subsahariens) », nous a-t-elle indiqué. Et de préciser : « L’affrontement a causé une grave blessure à un mineur guinéen et des complications à une femme subsaharienne enceinte ». Pour notre source, ce genre de violence contre des migrants est récurrente dans ce quartier sensible de la ville, densément peuplé, marginalisé où la cohabitation entre migrants et la population oujdie est absente. « Plusieurs témoignages ont rapporté que les migrants sont souvent victimes d’agressions voire de violence dans ce quartier et qu’une grande majorité d’entre eux a été incapable de déposer plainte (peur de police, barrière de la langue, …) ». De son côté, Hassan Amari, militant des droits de l’Homme et spécialiste des questions migratoires, estime qu’il s’agit d’un incident banal qui peut surgir dans n’importe quelle ville au Maroc et qui n’a rien à avoir avec le racisme ou la xénophobie. « Le contexte de crise lié à la pandémie de Covid-19 et l’absence d’une politique publique destinée à offrir du logement aux migrants ont obligé plusieurs d’entre eux à s’entasser par des dizaines dans des logements loin du centre-ville. Des quartiers souvent fraîchement construits, marginaux et où il est difficile de s’intégrer vu la barrière de la langue », nous at-il expliqué. Et d’ajouter : « Le quartier El Bakkay se trouve à 7 km de la ville et il est connu pour les bas prix des loyers. Les migrants préfèrent s’y installer pour bénéficier d’un coût de vie abordable et se soustraire aux contrôles de la police». Concernant les tensions entre migrants et la population locale, notre interlocuteur souligne que les heurts observés en 2002, 2003, 2008 et en 2010 ont laissé place à plus de cohabitation. Selon lui, la situation a beaucoup évolué et la population locale est devenue de plus en plus tolérante, accueillante et solidaire. « Il suffit d’observer les comportements de cette population envers ces migrants (achat de vêtements, distribution de nourriture, accueil des migrants chez soi,…) pour se rendre compte de ces mutations. S’il y a des tensions, c’est plutôt dans les quartiers fraîchement construits », a-t-il conclu. 


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