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Un boulet et moult défis sécuritaires à relever

Le retour des jihadistes à leur pays d’origine, un retour de tous les dangers


Mourad Tabet
Jeudi 25 Avril 2019

L’Institut royal des relations internationales-Egmont (think tank belge) et la Fondation allemande Konrad-Adenauer-Stiftung  ont rendu public un rapport dans lequel ils ont mis en garde contre le retour des jihadistes maghrébins des zones de conflit, notamment en Syrie et en Libye.
Selon ledit rapport, le Royaume rend officiellement publiques des statistiques concernant ceux de ses citoyens qui se trouvent en pareille situation. Selon celles-ci, 1664 Marocains se sont rendus en Iraq et en  Syrie entre 2013 et 2017, dont 285 femmes et 378 enfants, alors 596 personnes ont perdu la vie dans les combats ou au cours des attaques-suicide. 213 personnes ont pu regagner la mère patrie, dont 52 femmes et 15 enfants et presque toutes les personnes qui sont retournées au pays (à peu près 200 personnes) ont été condamnées à des peines allant de 10 à 15 ans de prison.
Le rapport a aussi mis en exergue le fait que le Maroc a accumulé une expérience probante en matière de lutte contre le terrorisme. En effet, il a modifié sa législation antiterroriste en prévoyant  des peines allant de 5 à 15 ans de prison et de lourdes amendes contre les personnes qui rallient ou tentent de rallier les groupes jihadistes.
Les autorités marocaines ont également procédé au lancement d’un programme de réconciliation (Moussalaha) visant à déradicaliser les détenus condamnés dans des affaires de terrorisme.
Selon un document de la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion en 2017, ce programme « repose sur une approche scientifique innovante qui s’intègre dans les efforts multidimensionnels déployés dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme et la protection de la société marocaine de leurs effets néfastes. Ce programme est mis en œuvre suivant une approche proactive qui s’appuie sur l’immunisation spirituelle et la lutte contre la précarité». Et le même document souligne que «ce programme s’articule autour de trois axes principaux : la réconciliation avec soi; la réconciliation avec les textes religieux et la réconciliation  avec  la  société».
Le rapport du Centre Egmont et de la Fondation Konrad-Adenauer-Stiftung souligne, par ailleurs, que «de tous les pays étudiés dans ce rapport, le Maroc est de loin le plus avancé dans le traitement des rapatriés. Il a pris des mesures juridiques et renforcé son action services de sécurité en conséquence. Il a également développé des programmes de déradicalisation en prison et travaille sur d'autres initiatives avec d'anciens radicaux». Et d’ajouter : «En revanche, la Tunisie et l’Égypte sont beaucoup moins transparentes et systématiques dans leurs approches. Il semble que leurs capacités soient limitées et leur approche très étroite axée sur la sécurité».
Malgré l’efficience de la politique marocaine de lutte contre le terrorisme, les rédacteurs de ce rapport estiment qu’à l’exception du programme Moussalaha, il n’y a pas d’autres programmes visant la réhabilitation des personnes condamnées. «Il n’y a rien de spécifique pour les personnes qui sont retournées des zones de conflit puisqu’elles sont logées à la même enseigne que les autres terroristes. Rien également  n’a été prévu concernant les femmes et les enfants».
Pourtant, le rapport souligne que « le Maroc est le pays dans la région le plus préparé» à affronter le problème des jihadistes revenus des zones de conflit.
Selon le même document, le retour des jihadistes maghrébins à leur pays d’origine ne constitue pas un défi pour les seuls pays maghrébins, mais c’est aussi un défi sécuritaire pour l’Europe. «Les inquiétudes suscitées par le retour des combattants étrangers ne sont pas spécifiques au Maghreb. La chute du califat est un défi mondial aux ramifications transnationales et régionales», a mis en garde ledit rapport. Et de préciser : «Le succès ou l'échec des pays nord-africains à contrer la menace des personnes revenues à leur pays d’origine aura des effets évidents, à long terme, sur la sécurité en Europe. La proximité géographique fait que l’instabilité aux frontières de l’Europe n’est dans l’intérêt de personne. Le développement de réseaux djihadistes ou, pire, le renforcement d’un front jihadiste plus proche du Vieux Continent est une perspective inquiétante. Alors que le califat est tombé et que l'Etat islamique a perdu ses dernières parcelles de territoire, il est possible que le djihad ressuscite dans d'autres régions telles que la Libye ou le Sinaï ».
Le rapport a également mis l’accent sur un autre point important. En l’occurrence «les liens historiques et personnels entre l’Afrique du Nord et les communautés de la diaspora en Europe. Nombre de combattants européens qui ont rejoint la Syrie et l'Irak étaient d'origine marocaine ou tunisienne. De nombreux combattants nord-africains et européens combattaient côte à côte et certains étaient intégrés dans les mêmes unités. Certains Européens se sont également rendus en Afrique du Nord et y sont restés avant de se rendre en Syrie. Ces liens se sont inévitablement approfondis dans le contexte syrien», a souligné ledit document. Et de préciser que ces liens ne datent pas d’aujourd’hui, car les relations entre les jihadistes de l’Afrique du Nord et ceux de l’Europe remontent à plus de deux décennies.


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