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Libération : D’abord, voulez-vous nous parler du rite d’Imaâchar et de sa symbolique ?
Mohamed Cheikh Bella : Imaâchar est une fête collective ancrée dans la tradition locale depuis des siècles. Son origine n’est pas nettement connue ! Certains l’imputent à un vieux rituel religieux (judéo-musulman) ou superstitieux, d’autres l’associent à une coutume païenne… De toute façon, cette tradition fêtée par la population tiznitie étant héritée des ancêtres depuis la nuit des temps, rassemble des éléments alliant des apports culturels et des inspirations superstitieuses provenant de toutes ces sources. Pour les populations l’ayant adoptée, c’est un moment de détente et d’amusement après une saison ardue de labour et de moisson. Les jeunes des villages s’affublent, en cette période d’Achoura, de peaux de mouton et de chèvre; les visages sont déguisés notamment de têtes de bétail ou de marques effrayantes.
La marche en groupements de ces acteurs déguisés se fait pendant la nuit. Dans l’imaginaire collectif, c’est le moment où les revenants sévissent sur terre parmi les survivants. C’est, somme toute, dans le but de susciter la frayeur parmi les spectateurs et donc assurer un meilleur divertissement. Mais aussi pour éviter d’identifier ces acteurs populaires.
Ces spectacles ne sont pas vains ou dénués de sens; lors de cette représentation théâtrale populaire, les Imaâchar bénéficient ainsi d’une large « licence » pour dénoncer les injustices sociales et en tancer les responsables en plein public sans crainte de se faire reconnaître. C’est un moment de revanche sur la répression et abus de pouvoir. Autant dire un moyen de régulation sociale et de maintien de la paix… un exutoire purgatoire… pour éviter les contestations sociales et la Fitna. Voilà pourquoi ces manifestations ont été interdites pour un certain temps par les autorités.
Comment vous est venue l’idée de travailler à travers l’Association Issmoun cette thématique de l’art de la représentation théâtrale populaire, en l’occurrence Imaâchar ?
Imaâchar était célébrée d’une manière désorganisée dans les villages ruraux de la région de Tiznit. Cette fête, ces derniers temps, n’offre plus l’image qui se doit de ce rite populaire didactique si l’on peut le dire. Elle est même en déclin : elle se compromet et perd de son originalité. Au point qu’elle s’est réduite à une triste occasion/prétexte de s’adonner à la collecte d’aumône par nos enfants. Une vile habitude qu’il ne faut pas tolérer. Etant conscient de l’importance de ce patrimoine immatériel et des dangers menaçant sa pérennité, nous avons décidé de créer ainsi un cadre associatif pouvant nous permettre de ressusciter ce legs.
Comment se décline alors votre approche pour la résurgence de cet héritage patrimonial ?
Lorsque nous avons décidé de nous plancher sur cette thématique, nous nous sommes évertués à rétablir d’abord les attendus étymologiques de l’appellation de cet événement social. De ce fait, nous avons procédé à la décortication sémantique du vocable le désignant pour mieux appréhender sa genèse. Avant de passer à l’exploration des mécanismes guidant ses pratiques rituelles dans le but de relever les objectifs derrière l’instauration d’Imaâchar. Nous avons alors compris que ce dernier est un réceptacle qui regorge d’un savoir-faire populaire extraordinaire.
Notamment l’art de l’interprétation des rôles, d’improvisation des discours et réparties, de confection d’habits et masques de déguisement, etc. Une autre importante trouvaille, et non des moindres, Imaâchar, quitte à le ressasser, jouait dans les sociétés antiques le rôle d’une grande et solennelle séance de catharsis. Une cure de purge où les litiges entre familles sont mis sur le tapis et réglés; les débordements des hommes au pouvoir stigmatisés pour les raisonner et les inciter à rétablir la justice, etc. Notre association a donc fait en sorte de recadrer et apporter une correction salutaire à Imaâchar de manière à respecter toutes ces valeurs traditionnelles et œuvrer pour les inculquer et assurer leur assimilation par les générations actuelles et futures.
Mohamed Cheikh Bella : Imaâchar est une fête collective ancrée dans la tradition locale depuis des siècles. Son origine n’est pas nettement connue ! Certains l’imputent à un vieux rituel religieux (judéo-musulman) ou superstitieux, d’autres l’associent à une coutume païenne… De toute façon, cette tradition fêtée par la population tiznitie étant héritée des ancêtres depuis la nuit des temps, rassemble des éléments alliant des apports culturels et des inspirations superstitieuses provenant de toutes ces sources. Pour les populations l’ayant adoptée, c’est un moment de détente et d’amusement après une saison ardue de labour et de moisson. Les jeunes des villages s’affublent, en cette période d’Achoura, de peaux de mouton et de chèvre; les visages sont déguisés notamment de têtes de bétail ou de marques effrayantes.
La marche en groupements de ces acteurs déguisés se fait pendant la nuit. Dans l’imaginaire collectif, c’est le moment où les revenants sévissent sur terre parmi les survivants. C’est, somme toute, dans le but de susciter la frayeur parmi les spectateurs et donc assurer un meilleur divertissement. Mais aussi pour éviter d’identifier ces acteurs populaires.
Ces spectacles ne sont pas vains ou dénués de sens; lors de cette représentation théâtrale populaire, les Imaâchar bénéficient ainsi d’une large « licence » pour dénoncer les injustices sociales et en tancer les responsables en plein public sans crainte de se faire reconnaître. C’est un moment de revanche sur la répression et abus de pouvoir. Autant dire un moyen de régulation sociale et de maintien de la paix… un exutoire purgatoire… pour éviter les contestations sociales et la Fitna. Voilà pourquoi ces manifestations ont été interdites pour un certain temps par les autorités.
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Comment se décline alors votre approche pour la résurgence de cet héritage patrimonial ?
Lorsque nous avons décidé de nous plancher sur cette thématique, nous nous sommes évertués à rétablir d’abord les attendus étymologiques de l’appellation de cet événement social. De ce fait, nous avons procédé à la décortication sémantique du vocable le désignant pour mieux appréhender sa genèse. Avant de passer à l’exploration des mécanismes guidant ses pratiques rituelles dans le but de relever les objectifs derrière l’instauration d’Imaâchar. Nous avons alors compris que ce dernier est un réceptacle qui regorge d’un savoir-faire populaire extraordinaire.
Notamment l’art de l’interprétation des rôles, d’improvisation des discours et réparties, de confection d’habits et masques de déguisement, etc. Une autre importante trouvaille, et non des moindres, Imaâchar, quitte à le ressasser, jouait dans les sociétés antiques le rôle d’une grande et solennelle séance de catharsis. Une cure de purge où les litiges entre familles sont mis sur le tapis et réglés; les débordements des hommes au pouvoir stigmatisés pour les raisonner et les inciter à rétablir la justice, etc. Notre association a donc fait en sorte de recadrer et apporter une correction salutaire à Imaâchar de manière à respecter toutes ces valeurs traditionnelles et œuvrer pour les inculquer et assurer leur assimilation par les générations actuelles et futures.