La présentation pertinente de Lamia Berrada-Berca, écrivaine et journaliste littéraire, a permis au public participant de découvrir progressivement le répertoire unique, riche de tradition du terroir, innovant dans la narration et dans l’improvisation, de cette personnalité singulière de Tanger, révélée par l’Américain Paul Bowles au cours des années 60.
L’intervention de Mrabet, présent à ce rendez-vous littéraire, nous a régalés d’un certain nombre d’histoires simples, pittoresques, où se mêlaient le talent de l’auteur actualisant ses cabrioles du réel à l’irréel et la spontanéité de son expression française élémentaire qui le rendait plus vivant, plus authentique. Il n’y a aucun décalage, aucune perte d’identité, entre l’homme qui est parti jeune de chez son père pour vivre sa vie, pour s’en sortir comme tous ceux qui n’ont pas le sou, et le conteur qui est resté fidèle aux vraies valeurs de son monde fait de simplicité, du bonheur d’avoir une famille, du besoin de retrouver sa ville, son quartier. Il aime plus que jamais la pêche, élément déterminant de toute son œuvre littéraire et picturale, la mer et le poisson qui l’aide à raconter ses histoires et à dessiner ses muses.
Simon-Pierre Hamelin, au cours de son intervention, nous a fait part de ce choix difficile d’accompagnement de ce prodigieux conteur dont l’œuvre est comme il le dit dans l’introduction de ce livre « un patrimoine d’une grande richesse ». Un travail à deux, concentré sur l’écoute, la répétition indispensable pour le respect des idées en privilégiant la gestuelle du conteur sur les mots. Un engagement cadencé de rencontres régulières sur quatre années afin d’étudier l’homme, d’explorer son univers créatif, de se familiariser avec lui pour retranscrire le plus fidèlement possible ses histoires.
Un résultat indubitablement révélateur d’une sensibilité réciproque, une œuvre pleine de messages, des illustrations ondoyantes qui reflètent une vitalité exceptionnelle.