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Scandales immobiliers à répétition : L’affaire Bab Darna aura eu le mérite de secouer le cocotier

Le Conseil de gouvernement s’est penché hier sur les garanties relatives à la restitution des échéances payées en cas de non exécution des contrats VEFA


H.T
Vendredi 3 Janvier 2020

Il aura fallu près de quatre ans et plusieurs scandales immobiliers pour que le gouvernement enrôle en sa réunion d’hier le tant attendu projet de décret relatif aux conditions et modes de présentation des garanties pour la restitution des échéances payées en cas de non-exécution du contrat de vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement (VEFA).
Un dispositif sans lequel le Dahir n° 1-16-05 du 3 février 2016 portant promulgation de la loi n° 107-12 modifiant et complétant la loi n° 44-00 relative à la VEFA ne pouvait devenir entièrement opérationnel.
Force est de rappeler à ce propos que le fait de légiférer a pris du temps. Peut-être plus qu’il n’en fallait si l’on prend compte que cette mouture avait été précédée, en 2002, par une autre qui avait débouché sur un échec patent.
Certes, le nouveau Dahir a introduit un dispositif qui, malgré ses imperfections, instaure une sorte d’équilibre dans les relations entre le promoteur immobilier et l’acheteur.
Ainsi, a-t-il prévu l’établissement et la signature obligatoires d’un contrat préliminaire qui décrit en détail le bien acheté et qui est accompagné d’un certain nombre de pièces et documents dont la présentation par le promoteur est obligatoire.
Et pour boucler le déroulement de l’opération de vente, ledit Dahir a mis en place un système de garanties destiné à préserver les intérêts de l’acheteur en imposant au promoteur immobilier de lui  fournir soit une garantie d’achèvement des travaux, soit une garantie de restitution des montants payés en cas de non-exécution des termes des contrats. Le projet de décret soumis hier au Conseil de gouvernement en a précisé les contours et les termes ; une tâche qui n’a pas dû être facile puisqu’elle a, dès le départ, provoqué une certaine levée de boucliers de certaines parties prenantes.
Le passé étant le passé, force est de rappeler, néanmoins, que le vide juridique qui existait avait nourri les appétits de quelques promoteurs avides de gains faciles et de quelques escrocs aux dents longues.
Le dernier scandale qui a défrayé la chronique à ce propos n’est autre que celui de "Bab Darna" qui a, de l’aveu même du président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), porté un coup dur à la réputation de tout un secteur dont la contribution au PIB national dépasse les 6%.
"L'image du promoteur immobilier est ternie par ce genre de pratiques et de scandales à répétition. Nous n'allons pas laisser passer cela", a déclaré le vice-président de la FNPI à la télévision, en rappelant que cette dernière a exprimé à maintes reprises ses inquiétudes quant à ces pratiques et appelé à l'assainissement du secteur à travers sa professionnalisation.
"Il ne s'agit pas là de promoteurs, mais de personnes qui se prétendent ainsi et qui arborent cette casquette pour porter atteinte aux victimes. Nous en sommes aussi des victimes collatérales, notre image est affectée. Non seulement la confiance des acquéreurs est entamée, mais l'image du pays et de son économie en sort également touchée", a-t-il précisé.
Projet résidentiel qui proposait, depuis 2013, des logements dans toutes les villes du Royaume moyennant des contrats de réservation avec avance, Bab Darna a collecté près de 400 millions de dirhams auprès de plus d’un millier d’acquéreurs sans qu’aucun logement ne voie le jour. Six personnes sont actuellement poursuivies en état d'arrestation, à leur tête le PDG de Bab Darna, Mohammed El Ouardi, de même que son adjoint qui vient d’être appréhendé à Abidjan.
Ce n’est malheureusement pas le seul  scandale à avoir fait les choux gras de la presse durant les derniers mois de l’année écoulée.
Un autre a, en effet, secoué Asilah et fait plus de mille victimes, dont des étrangers et des Marocains résidant à l’étranger (MRE).
L’affaire remonte à 2003, année où ce «projet» a été lancé, à l’instar de celui de Bab Darna, avec des publicités alléchantes encourageant les clients à verser entre 60.000 et 100.000 dirhams pour réserver leur appartement dans ce complexe qui n’a même pas vu le jour.
En fait, le promoteur n’a bâti que 100 appartements, alors qu’il en avait vendu plus de 600.
Face aux réclamations, le promoteur immobilier s'est contenté de leur faire des promesses avant de disparaître dans la nature. Ce qui a poussé les victimes à saisir le parquet de Tanger qui a ordonné l’ouverture de l’enquête et l’arrestation du mis en cause.
La sixième audience de ce procès, qui a eu lieu le 16 décembre dernier, a été reportée au 11 février 2020.
 Le point commun entre ces deux affaires : la publicité mensongère qu’aucune loi ne réprime encore au Maroc.

Les principales dispositions de la loi n° 107-12

-    Modification de la définition de la VEFA comme suit  “toute convention par laquelle le vendeur s’engage à édifier un immeuble dans un délai déterminé et à en transférer la propriété à l’acquéreur en contrepartie d’un prix à payer par ce dernier au fur et à mesure de l’avancement des travaux”   (article 618-1);
-    Institution de la nullité de la VEFA si le contrat n’a pas été conclu conformément aux dispositions de cette loi  (articles 618-2 et 618-3);
-    Obligation de faire légaliser la signature des contrats établis par les avocats, auprès du président du tribunal de première instance du ressort  (art 618-3);
-    Fixation des mentions obligatoires que doit contenir le contrat de VEFA (dont le prix définitif et le délai de livraison)  (art 618-3 bis);
- Interdiction, à peine de nullité, de conclure des contrats d’affectation d’un immeuble en état futur d’achèvement, avant l’obtention de l’autorisation de construire, avec possibilité pour l’acquéreur de  renoncer à l’affectation dans un délai d’un mois et obligation pour le vendeur de lui restituer le montant intégral qu’il lui aurait payé, et ce dans un délai de 7 jours  (article 618-3 bis 3);
- Fixation de la durée de validité du contrat d’affectation à six mois au terme desquels le contrat de VEFA doit être conclu ou la renonciation doit être exercée (art 618-3 bis 3);
-    Versement des montants dus au titre du contrat d’affectation dans un compte bancaire, lesquels montants sont insaisissables ou utilisés par le vendeur jusqu’à l’expiration du délai de renonciation (art 618-3 bis 3)
- Obligation pour le vendeur d’établir et de délivrer à l’acquéreur un cahier des charges conforme au plan établi par l’ingénieur topographe ; avec obligation de dépôt du cahier des charges  accompagné d’un plan ne variatur, soit auprès de la Conservation foncière lorsqu’il s’agit d’immeubles immatriculés, soit auprès du tribunal de première instance lorsque l’immeuble n’est pas immatriculé (art 613-4);
-    Interdiction de conclusion d’un contrat de VEFA avant l’obtention de l’autorisation de construire (art  618-5) ;
-    Fixation des pourcentages des montants à payer par l’acquéreur en fonction de l’avancement des travaux  (art 618-6);
-    Possibilité pour le vendeur de bénéficier d’un délai supplémentaire pour l’achèvement des travaux fixé à six mois, sous réserve d’en informer l’acquéreur (art 618-7) ;
-    Nullité de tout versement effectué avant la conclusion du contrat de VEFA ou du contrat d’affectation  (art 618-8);
-    Fixation des cas où le vendeur est libéré de sa caution vis-à-vis de l’acquéreur (art 618-9) ;
-    Possibilité pour l’acquéreur de faire inscrire une pré notation si les versements qu’il a effectués dépassent les 50% du prix de l’acquisition  (art 618-10);
-    Possibilité pour l’acquéreur de céder ses droits à une autre personne, sous réserve d’en informer le vendeur  (art 618-13) ;
-    Institution d’un droit aux dommages-intérêts en cas de résiliation par l’une des parties, qui varient entre 15 et 20% des montants versés, avec fixation de ces dommages-intérêts à 20 % au profit de l’acquéreur si la résiliation est due au dépassement par le vendeur du délai de livraison  (art  618-14);
-    Soumission de la conclusion du contrat définitif à l’obtention du permis d’habiter ou du certificat de conformité et préparation des titres fonciers et paiement du reliquat du prix (art 618-15 et art 618-16);
-    Sanctions en cas de refus par l’une des parties de conclure le contrat définitif (art 618-18).


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