Ripostant à la campagne du PJD contre le concert de la star de la musique pop : Mawazine précise qu’il ne lui appartient pas de juger la vie privée d’Elton John


M’Hamed Hamrouch
Mardi 11 Mai 2010

Ripostant à la campagne du PJD contre le concert de la star de la musique pop : Mawazine précise qu’il ne lui appartient pas de juger la vie privée d’Elton John
A l’approche du concert d’Elton John, le 26 mai sur le site OLM, au quartier Souissi à Rabat, la campagne haineuse contre cette légende vivante de la musique pop et contre le festival Mawazine qui l’invite atteint des sommets. Ici, des appels à l’interdiction du concert ; là, des feux nourris sur « l’homosexualité » de la guest-star ; ailleurs, des incitations déguisées et néanmoins dangereuses à la haine et à la violence. Une véritable campagne enragée orchestrée par la nébuleuse islamiste est engagée publiquement, par médias interposés, ou sous la coupole de l’Hémicycle. En ligne de mire, le Festival Mawazine dont le « tort », paraît-il, est de favoriser, par l’invitation d’Elton John, « l’homosexualité » et plus généralement la « débauche ». « Elton John a une vie privée. Il n’appartient pas au Festival Mawazine de juger la vie privée d’Elton John et ce n’est pas sur la base de cette vie privée que cette icône de la musique pop a été invitée », riposte le directeur artistique de Mawazine, Aziz Daki, dans une déclaration hier à « Libé ». « Le critère, le seul, l’unique, sur lequel Elton John a été invité, est celui de sa qualité artistique », précise M. Daki, pas à court d’arguments pour justifier ce « choix purement et simplement artistique ». « Elton John est une véritable icône et une légende vivante de la musique pop au monde ; il a à son compteur quarante ans de carrière, vend plus de 100 millions de disques et avant et après tout, il a de nombreux fans au Maroc », martèle M. Daki. « C’est pour ces qualités artistiques, et seulement ses qualités artistiques, qu’Elton John a été invité», tranche le responsable artistique du Festival. « Je ne veux pas entrer dans une polémique inutile avec les contradicteurs, mais je dois préciser que Mawazine est un Festival d’art et de culture. Il tient à le rester. Le festival ne saurait en aucun cas devenir une tribune de débat politique ou de polémique. Parce que son rayon d’action, sa raison d’être, c’est la promotion des arts et de la culture », certifie-t-il. Mais voilà, Elton John ne serait-il pas un « prétexte » pour les défenseurs auto-désignés de la bonne morale pour diaboliser une fois de plus les festivals ?
La présente campagne de discrédit rappelle, curieusement et étrangement, bien d’autres. Les festivals ayant un succès populaire certain sont particulièrement visés par cette campagne. Le Festival Gnaoua Musiques du monde d’Essaouira a déjà prêté le flanc à des critiques d’une violence inouïe de la part des islamistes, qui l’accusaient de véhiculer une « culture de débauche » ! L‘Boulevard, festival de l’undeground musical casablancais, est quant à lui brocardé pour être, disent-ils, « un vecteur du satanisme » ! Nombre de festivals de Marrakech, « paradis du tourisme sexuel !», sont condamnés sans appel pour être « l’œuvre du diable » ! Le concours « Miss Beauté » de Sefrou n’a pas échappé non plus aux feux croisés de la vulgate obscurantiste ! Que reste-t-il encore ?
On pourrait allonger la liste des anathèmes, mais abrégeons. En quoi ces festivals dérangent les islamistes ? Pourquoi ces derniers ont-ils peur de ces formes modernes de la fête ? Le débat sur les festivals devrait-il se poser de manière à dire qui est « licite » et qui ne l’est pas ? Les jeunes, et plus encore leurs familles, ne sont-ils pas finalement mûrs pour choisir par eux-mêmes et décider d’eux-mêmes, en dehors de toute interférence idéologique ou plus encore politicienne ?  De quel droit et du haut de quelle irresponsabilité certains peuvent-ils s’autodéclarer « plus musulmans » que d’autres ? La censure est-elle le meilleur moyen pour « remettre le commun des fidèles dans le droit chemin » ?
La campagne anti-festive soulève un véritable « festival » de questions, mais sans que les auteurs de cette campagne soient capables d’apporter la moindre réponse convaincante en dehors des jets d’anathèmes, la diabolisation, ou encore ces appels à l’interdiction anachroniques avec le projet de société moderne, progressiste et démocratique que le Maroc d’aujourd’hui fait sien.
Quelle alternative les islamistes peuvent-ils prétendre pouvoir donner à ces millions de jeunes, ainsi qu’à leurs familles ? Dire que ces islamistes sont à des années-lumière des véritables besoins et des réelles préoccupations de ce Maroc qui bouge et avance inlassablement dans le but légitime de rejoindre d’autres nations plus développées. 


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