Les intervenants à un colloque, organisé à l'occasion du lancement de la plateforme « Aswat Al Atlas » (Voix de l'Atlas), sous le thème « Approches modernes de la gestion et de la numérisation du patrimoine culturel au Maroc : préserver la mémoire et construire l'avenir », ont indiqué que le patrimoine culturel constitue un pilier fondamental de l'identité nationale, une source riche de connaissances, de valeurs et de symboles, et un élément important du développement durable.
A cet égard, Mme Meriem Sahli, professeure à l'Université Al Akhawayn, a affirmé que cet événement s'inscrit dans le cadre du lancement de la plateforme numérique ''Les voix de l'Atlas’’, qui vise à promouvoir le patrimoine culturel riche en littérature orale, poésie, contes et histoire locale de la région de l'Atlas en particulier.
Elle a ajouté, dans une déclaration à la MAP, que cette plateforme rassemble une trentaine d'entretiens avec des personnalités de la région, parmi lesquelles des professeurs d'université, des agriculteurs et des artistes travaillant dans le domaine de la chanson, dans le but de constituer une base de connaissances mettant en lumière la littérature orale locale.
Ces entrevues ont porté sur la relation entre l'homme, l'eau, la forêt et la terre dans les traditions et coutumes locales, ainsi que sur la mémoire collective de la période coloniale, en évoquant les formes de résistance menées par les hommes et les femmes de la région contre le colonialisme, a-t-elle poursuivi, notant que dans le cadre du lancement de cette plateforme, l’un des symboles de la résistance dans la région de l'Atlas, El Haj Araba, a été honoré en reconnaissance de son parcours de lutte.
Pour sa part, le chercheur en patrimoine culturel, Abdessalam Amarir, a expliqué que le patrimoine culturel immatériel revêt une importance croissante dans les sociétés contemporaines, son rôle ne se limitant plus à la mémoire et à l'identité, mais touchant désormais à des questions majeures liées aux changements climatiques, au développement durable et au soft power.
Il a estimé que l'inventaire du patrimoine constitue une étape fondamentale pour découvrir sa richesse et sa diversité, et contribue à l'élaboration de politiques et de plans visant à le protéger et à le promouvoir.
L’expert a également insisté sur l'importance de collecter et de faire connaître le patrimoine en le numérisant, en le documentant et en le diffusant via des plateformes spécialisées.
Mohamed Joudat, professeur d'enseignement supérieur à l'Université Mohammed V de Rabat et président de l'Organisation internationale pour la protection du patrimoine, a, quant à lui, mis en lumière la problématique de la préservation du patrimoine culturel face à l'effacement culturel causé par «la domination des grandes cultures mondiales, en particulier dans l'espace numérique».
Il a précisé que la culture orale a historiquement joué un rôle central dans la construction des valeurs depuis l'éducation sociale, mais que la puissance de la numérisation a entraîné de profonds changements qui ont conduit au déclin de ces rôles au profit de valeurs universelles, ce qui constitue une menace sérieuse pour l'identité culturelle.
A cet égard, l'universitaire a appelé à l'adoption de stratégies académiques modernes et d'une théorie numérique pratique qui contribuent à orienter le destinataire dans un contexte national qui redonne à la culture nationale sa symbolique, soulignant la nécessité d'investir dans les dimensions numériques pour préserver le patrimoine et reconstruire une identité culturelle harmonieuse.
Pour sa part, Laila El Majid, directrice de l'espace de mémoire de la résistance et de la libération à Azrou, a mis en exergue l'interaction entre la mémoire nationale et la mémoire spatiale dans la compréhension du parcours de la résistance dans le Moyen-Atlas.
Elle a relevé que la commémoration de la résistance ne saurait être complète sans la restauration des espaces qui ont constitué sa structure symbolique et matérielle, à savoir les sentiers de montagne, les villages fortifiés, les forêts et les zones naturellement protégées.
Et de rappeler que les tribus du Moyen-Atlas s'appuyaient sur une connaissance approfondie du terrain et des ressources naturelles, mettant l’accent dans le même contexte sur le rôle essentiel de la mémoire orale et des récits locaux dans la préservation de ce patrimoine de lutte et le renforcement des valeurs d'appartenance nationale.
De son côté, le professeur et chercheur Mohamed Adiouane a insisté sur l'importance de reconstituer le patrimoine populaire dans toutes ses composantes, en particulier les proverbes et les contes, en raison de leur valeur historique et symbolique, appelant à l'adoption d'une méthodologie scientifique fondée sur une collecte exhaustive avant sélection, tout en préservant l'identité culturelle et en évitant sa disparition.
Il a souligné que la culture populaire représente une conscience collective accumulée et regorge d'un immense patrimoine de textes fondamentaux, ce qui nécessite d'ouvrir la voie aux chercheurs et aux jeunes pour l'étudier et l'enrichir dans un cadre scientifique sérieux.
Selon les organisateurs, cette rencontre s'inscrit dans le contexte des profondes transformations que connaît le secteur de la gestion du patrimoine culturel au Maroc, ainsi que des défis cognitifs, technologiques et sociétaux qui l'accompagnent. Ces défis imposent de repenser les mécanismes de préservation de la mémoire collective et de conservation de ses composantes matérielles et immatérielles, afin d'assurer leur pérennité et leur transmission aux générations futures.









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