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Retrait des spécialités pharmaceutiques à base de Pioglitazone : Le débat sur le système debpharmacovigilance refait surface


Hassan Bentaleb
Jeudi 16 Juin 2011

Notre système de fabrication, de contrôle et de distribution des médicaments est-il viable ? La sécurité de nos produits pharmaceutiques est-elle garantie ? Sommes-nous à l’abri du danger ?
Oui, disent les professionnels du secteur, réunis le 14 juin à Rabat, lors d’un atelier d’information et de communication sur le médicament, organisé par la Société marocaine de pharmacovigilance sous le thème : « Place des journalistes dans la pharmacovigilance ».   Pour eux, le Maroc dispose d’un ensemble de procédures de fabrication, de contrôle et de distribution qui répondent et respectent les normes et les standards internationaux.
« Le médicament fabriqué au Maroc dispose des mêmes critères de qualité que celui produit en Europe, comme en témoigne, d’ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé (OMS)  elle-même. Ceci d’autant plus que nous sommes le seul pays africain qui fait partie du réseau européen des laboratoires officiels de contrôle des médicaments (OMCL)», a précisé A. Mahly, responsable du Laboratoire national de contrôle du médicament, avant de poursuivre : «  Nos laboratoires nationaux sont l’objet de contrôles réguliers du réseau et on passe chaque mois un test de qualification ».
Alors si notre système est si performant, comment peut-on expliquer ces retraits des médicaments du marché local? Pour répondre à cette question, Pr R. Soulaymani, directrice du Centre antipoison et de pharmacovigilance, part d’un constat : le risque zéro n’existe pas et tout système court le risque, un jour ou l’autre, de tomber en panne et le Maroc ne constitue pas une exception.
Cependant,  elle a tenu à préciser que le retrait d’un médicament de commercialisation n’est pas lié uniquement  à un danger et que le risque médicamenteux est variable d’un pays à l’autre. «Le fait qu’un médicament soit retiré de la commercialisation en France ou en Angleterre, ne veut pas dire qu’il est aussi dangereux au Maroc », a-t-elle révélé.
Mais pourquoi donc le retrait d’un médicament suscite-t-il tant d’inquiétude et de suspicion ? Pour Dr R. Lamrini, président du Conseil de l’ordre des pharmaciens fabricants répartiteurs (COPFR), les confusions font que beaucoup de gens ignorent les processus et les mécanismes de retrait d’un produit pharmaceutique.
A cet effet, il a expliqué que  la décision de retrait du marché d’un ou de plusieurs médicaments, doit être prise en raison de la mise en évidence ou la suspicion d’anomalie. « Mais anomalie ne veut dire en aucun cas danger ou intoxication. Le rappel est déclenché dès la moindre alerte et très souvent par mesure d’extrême précaution. Mais, il reste que les risques pour les patients qui ont consommé le produit en question sont quasiment nuls en général», a-t-il précisé. Le président du COPFR a noté également que la procédure de rappel des lots qui fait partie des procédures les mieux maîtrisées par l’industrie pharmaceutique et les plus regardées lors des inspections et des audits, exige beaucoup de temps pour être déclenchée.  «Toute une chaîne de personnes doit être informée et plusieurs réunions doivent être tenues avant chaque retrait. Cela peut prendre des mois et du coup, si un médicament est déjà retiré dans un pays, il demande de 3 à 5 mois avant de procéder de même au Maroc », a-t-il souligné.
Mais, il a tenu à préciser, par ailleurs, qu’il y a trois niveaux dans le rappel d’un lot. « Il y a le premier niveau, très simple, qui ne concerne que le laboratoire et les grossistes, suite à un défaut de fabrication. Il y a le deuxième niveau, un peu plus élevé et qui concerne les pharmaciens et les médecins et enfin, le troisième niveau à haut risque, donc l’existence d’un danger », a-t-il noté.
Le président du COPFR a expliqué également que la confusion et les rumeurs naissent lorsqu’il y a rupture de stock, « alors que plusieurs facteurs objectifs peuvent être à l’origine de cette rupture », a-t-il avancé.
Il évoque ainsi la non-conformité du produit qui peut générer une rupture le temps de faire les investigations nécessaires et fabriquer un nouveau lot, le retard sur la réception et le dédouanement d’une matière première rentrant dans une spécialité pharmaceutique, les ventes nettement supérieures aux prévisions suite à une épidémie ou à une demande importante du marché et qui n’était pas prévisible et enfin la difficulté à réapprovisionner le marché suite à un rappel de lots.
Néanmoins, M. Lamrani ne se cache pas la face. Il a reconnu qu’il y a de grandes difficultés de communication : « Aujourd’hui, on a des problèmes pour communiquer en temps et en heure sur la rupture de stock. On a peu de moyens de communication. Je crois qu’il est temps de réagir et je pense que la presse peut jouer un rôle crucial dans ce sens », a-t-il conclu.

Forces et faiblesse

Il convient de rappeler que l’atelier d’information et de communication sur le médicament, organisé par la Société marocaine de pharmacovigilance, a coïncidé avec la décision du ministère de la Santé de suspendre, à titre préventif, les autorisations de mise sur le marché des spécialités pharmaceutiques à base de Pioglitazone, traitement indiqué en deuxième intention chez les patients diabétiques.
Ce département a également procédé à l’interdiction immédiate de la commercialisation de ces spécialités et au rappel et retrait des lots disponibles sur le marché tout en informant l’ensemble des professionnels de la santé de cette décision.

Défaut de communication

L’information a été mise mardi 14 mai sur le site du ministère. Cependant, elle n’a rien d’extraordinaire car depuis quelques mois, il ne se passe pas un jour sans qu’on entende parler de retrait d’une préparation pharmaceutique ou d’une autre du marché national. Le défaut de communication de certains laboratoires et de l’administration suscite néanmoins le désarroi et sème le doute dans l’esprit des malades et pousse même certains d’entre eux à adopter des comportements aux conséquences graves pour leur santé tels que l’arrêt de traitement ou la substitution d’un médicament par un autre, etc.
Une situation qui perdure bien que le Maroc ait, depuis plusieurs années, mis en place un système de vigilance sanitaire afin d’assurer la sécurité d’emploi des produits de santé. Le fonctionnement global du système national de pharmacovigilance repose sur un système de collecte et d’analyse des informations assuré par le Centre national de pharmacovigilance (CNPH) en présence d’organes de consultation et de décision représentés respectivement par le Comité technique de pharmacovigilance et la Commission nationale de pharmacovigilance.
Le CNPH a pour principale mission de recueillir et d’analyser les effets indiscernables ; il est également un centre d’information sur le médicament.
Après évaluation du rapport bénéfice-risque du médicament, l’alerte aboutira soit au retrait de ce médicament si ce rapport est défavorable, soit à une révision de la notice et une information des professionnels de santé.
Ceci en théorie. Car la remontée d’information fait défaut. A titre d’exemple, seuls 5% de pharmaciens ont émis des alertes et saisi ledit centre. De plus, rares sont les professionnels de santé qui reçoivent en temps opportun les alertes émises par le CNPH ou les avis de retrait du marché émis par le ministère de la Santé. 


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