Quand l’emploi devient politique

L’USFP transforme la colère sociale en motion parlementaire


Mohamed Assouali
Lundi 26 Mai 2025

Quand l’emploi devient politique
Dans un contexte national marqué par une montée alarmante du chômage, notamment chez les jeunes diplômés et les femmes, le débat sur l'efficacité des politiques publiques en matière d'emploi s'impose avec acuité.

Quand l’emploi devient une question politique brûlante

Le contraste est saisissant: d’un côté, les discours officiels vantent l’émergence de grands projets structurants censés impulser la croissance économique ; de l’autre, les chiffres témoignent d’un faible impact de ces projets sur la création d’emplois durables et décents. Ce décalage entre promesses d’émergence et réalité sociale nourrit la défiance des citoyens et alimente la crise de confiance envers les institutions.

C’est dans cette conjoncture critique que l’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP) a pris l’initiative courageuse de proposer une motion de censure, non pas comme un simple geste symbolique, mais comme un appel démocratique à la reddition de comptes. En initiant cette démarche, le parti entend forcer le gouvernement à sortir de son silence et à venir s’expliquer devant les représentants de la nation — et à travers eux, devant l’opinion publique — sur l'échec flagrant de sa politique de l’emploi. Il ne s’agit pas d’une manœuvre politicienne, mais d’un acte de responsabilité nationale face à une crise sociale profonde.

L’objectif de cette motion est clair : poser la question qui dérange mais que tout le monde se pose — comment expliquer l’inefficacité des grands projets à absorber le chômage? Pourquoi les milliards investis dans les infrastructures, les zones industrielles et les méga-programmes ne se traduisent-ils pas par des opportunités concrètes pour les Marocains en quête d’avenir? Cette interpellation vise à replacer l’humain au cœur des priorités, et à rappeler qu’aucun développement ne saurait être qualifié de réussi s’il ne se traduit pas par une amélioration tangible des conditions de vie des citoyens.

Un mal persistant qui n’étonne plus personne

Au Maroc, parler du chômage est devenu une constante. Une réalité que tout le monde connaît, mais que personne ne règle vraiment. Depuis des années, les gouvernements promettent de réduire le nombre de chômeurs. Mais à chaque fois, les chiffres sont là pour rappeler l’échec. En 2025, le taux de chômage a atteint 13,3%. Chez les jeunes entre 15 et 24 ans, il frôle les 38%. Les femmes et les diplômés sont aussi durement touchés: près d’un sur cinq est sans emploi.

Ces chiffres ne sont pas que des données techniques. Ils sont le miroir d’un malaise social profond, d’un modèle de développement qui ne fonctionne plus, et d’un pouvoir politique qui refuse de changer de cap. Car ce n’est pas un hasard si la situation stagne : c’est le résultat de choix politiques qui ne répondent ni aux besoins du pays ni aux attentes de sa jeunesse.

Des solutions temporaires pour des problèmes de fond

Pour calmer la colère et montrer qu’elle agit, l’actuelle majorité a mis en avant des programmes comme Awrach ou Forsa. Sur le papier, ils visent à créer de l’emploi. Mais sur le terrain, ces initiatives n’ont rien changé de fondamental. En 2022, Awrach a touché un peu plus de 100 000 personnes, avec des contrats précaires. En 2023, le nombre a même chuté. Rien n’a été pensé pour assurer la stabilité ou l’insertion durable.

Ces programmes sont devenus des outils politiques, utilisés pour redorer une image ou gagner du temps, sans jamais s’attaquer aux vraies racines du chômage : la déconnexion entre l’école et l’économie, l’absence de politique industrielle, et l’abandon des territoires en dehors des grandes villes. On répète les mêmes erreurs, sans tirer de leçons du passé.

Une agriculture incapable d’absorber la crise

Quand le chômage augmente, le gouvernement pointe souvent du doigt le climat. La sécheresse est devenue une excuse toute trouvée. Pourtant, même lorsque la pluie revient, le chômage ne baisse pas. Cela prouve bien que le problème est ailleurs.

Le secteur agricole, pourtant vital pour le Maroc, est en crise. Il offre des emplois saisonniers, mal payés, sans avenir. Le Plan Maroc Vert, censé transformer la filière, a surtout profité aux grandes exploitations. Les petits agriculteurs, eux, continuent de survivre, sans soutien, ni outils modernes. Pire encore, les subventions publiques sont parfois détournées, comme dans l’affaire des "farkachia", où des millions ont été gaspillés pour des résultats invisibles.

Il est temps de le dire clairement : l’agriculture marocaine ne peut plus être un pilier de l’emploi tant qu’elle exclut les petits producteurs et ne se met pas au service du développement rural. Elle a besoin d’être repensée pour créer de la valeur, de la stabilité, et de l’inclusion.

Un territoire à deux vitesses, des jeunes sans boussole

Le Maroc n’est pas un pays égal. Dans certaines régions comme Drâa-Tafilalet, le chômage peut atteindre 60 à 70%. Pendant que les grands projets se concentrent à Casablanca, Rabat ou Tanger, d’autres provinces sont oubliées. Sans routes, sans usines, sans écoles adaptées, ces régions deviennent des zones de départ, vidées de leur jeunesse.

Le système éducatif n’aide pas non plus. Il forme des jeunes à des métiers qui n’existent pas, ou qui ne répondent pas aux besoins du marché. Résultat : des milliers de diplômés se retrouvent chaque année sur le carreau, frustrés, déçus, tentés par l’exil ou le désespoir.

Le lien entre formation, économie locale, et emploi est quasiment inexistant. Et tant qu’on ne mettra pas en place une stratégie nationale de formation utile, moderne, et territorialisée, le chômage des jeunes continuera d’augmenter.

Ce qu’il faut vraiment changer

Le Maroc ne manque ni de ressources, ni de talents. Ce qui manque, c’est une vision. Une vraie stratégie de long terme, qui commence par:
- Une réforme profonde de l’enseignement et de la formation professionnelle, pour qu’ils soient enfin connectés aux réalités économiques du pays.
- Un soutien massif à l’industrie locale, aux métiers verts, au numérique, aux énergies renouvelables. Ce sont ces secteurs qui peuvent créer demain des milliers d’emplois stables.
- Un changement de politique fiscale, pour alléger les charges des petites entreprises et les aider à embaucher.
- Une décentralisation du développement, pour que chaque région ait les moyens de construire son avenir, en fonction de ses richesses et de ses besoins.
- Une agence nationale indépendante pour évaluer les politiques d’emploi, suivre les résultats, et sanctionner l’inefficacité.

Un choix politique, pas une fatalité

Le chômage au Maroc n’est pas une malédiction. Il est le résultat de choix politiques, de priorités mal placées, d’une absence de courage. Tant qu’on dépensera l’argent public dans des projets inefficaces, tant qu’on préférera des effets d’annonce aux vraies réformes, rien ne changera.

Mais le peuple a le pouvoir de dire stop. En 2026, avec les prochaines élections législatives, une occasion s’ouvre pour changer de cap. Comme en 2021, où les électeurs ont sanctionné un parti qui les avait trahis, ils peuvent aujourd’hui faire confiance à des forces progressistes, claires, honnêtes, qui placent la dignité et le travail au centre de leur projet.

Parmi ces dernières, l’Union Socialiste des Forces Populaires qui a toujours défendu l’idée d’une politique au service du citoyen, non pas au service des chiffres. Elle porte un projet concret pour l’emploi, la justice sociale, et l’égalité entre les territoires.

Changer les choses ne se fait pas en un jour. Mais cela commence par un geste simple et fort : voter. Non pas pour des promesses vagues, mais pour un projet sérieux, porté par des gens engagés, compétents, et proches des réalités du terrain.

Par Mohamed Assouali
Membre du Comité national d’arbitrage et d’éthique du parti


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