
La surprise pour ainsi dire de la cuvée 2011, c’est bien plus le nombre de lauréates que la qualité de leur prestation. Si La présidente du Libéria Ellen Johnson Sirleaf, 73 ans à la fin du mois, était fortement pressentie à cette récompense, la chaîne norvégienne TV2 qui par deux fois a pronostiqué les vainqueurs précédents, Liu Xiaobo 2010 et Barack Obama en 2009, l’a considérée même comme “lauréate la plus probable”, ce n’était nullement le cas de sa jeune compatriote ni encore moins celui de la journaliste yéménite qui symbolise au mieux les printemps arabes aux yeux du jury Nobel cette année (composé de quatre femmes sur ses cinq membres).
La Présidente de la République du Libéria depuis le 16 janvier 2006, est récompensée, on va dire, pour l’ensemble de son œuvre. Celle, à qui le footballeur et ballon d’or Georges Weah avait disputé, très fair-play d’ailleurs, l’élection présidentielle, a eu l’honneur d’être la première femme élue au suffrage universel (60%) à la tête d’un État africain. Ellen Johnson Sirleaf est une grande économiste formée aux Etats-Unis où elle y effectua toutes ses études. Elle est aussi membre de Alpha Kappa Alpha Sorority, Incorporated, une organisation à action sociale, la première sororité bâtie par des femmes noires (créée en 1908).
Sa compatriote Leymah Gbowee, qui a œuvré dans son sillage, en récolte les dividendes. Responsable de l’organisation du mouvement pacifiste Women of Liberia Mass Action for Peace, elle est récompensée pour son travail de mobilisation et d’organisation des femmes de toutes ethnies et de toutes religions pour mettre fin à la seconde guerre civile du Libéria et garantir la participation des femmes aux élections. Pour ce qui est de la journaliste yéménite Tawakkul Karman, il semblerait que le comité Nobel ait voulu distinguer une femme qui a oeuvré pour la paix, la démocratie et les droits des femmes avant et pendant le “printemps arabe”. Tawakkul Karman est membre du parti islamiste Al Islah et fait partie d’un groupe de défense des droits de l’Homme. Fondatrice en 2005 de « Femmes journalistes sans chaînes », elle reçoit pourtant menaces et offres de corruption pour renoncer à défendre sa raison d’être, la liberté de pensée et d’expression. Elle fait face à l’interdiction de la création d’un journal et d’une radio. Régulièrement tout au long du soulèvement du peuple yéménite, elle a appelé et participé aux différentes manifestations et sit-in sur la place de la Liberté à Sanaa. A travers Tawakul Karman, le jury a voulu récompenser les printemps arabes. D’autres sommités arabes au même titre auraient pu y prétendre, nous n’en retiendrons que la cybernaute tunisienne Lina Ben Mhenni, l’Egyptienne Esraa Abdel Fattah, inspiratrice du Mouvement du 6 avril, ou son compatriote Waël Ghonim. La militante afghane de la cause féminine Sima Samar faisait aussi partie des prétendantes.
Les trois lauréates ont été choisies parmi 241 organisations et individus, c’est dire la difficulté du choix.