Plaidoyer pour la création d’un institut de recherches dédié aux études africaines


​Mourad Tabet
Vendredi 25 Février 2022

Plaidoyer pour la création d’un institut de recherches dédié aux études africaines
Un parterre de chercheurs universitaires a appelé à la création d’un institut national dédié spécialement aux études africaines, et ce lors d’une conférence organisée mardi dernier par la Fondation Fikr pour le développement, la culture et les sciences sur le thème «Les études africaines: l’importance et les perspectives».

«Je ne veux pas laisser passer cette occasion sans formuler un vœu qui nous berce depuis longtemps, à savoir la création d'un institut national des études africaines en se basant sur les acquis de la recherche au Maroc sur l'Afrique subsaharienne. Je mets l’accent sur le terme « national » car cet institut devrait être un centre national, et non pas universitaire ou un centre de recherche comme c'est le cas dans les universités marocaines », a affirmé d’emblée le directeur de la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (BNRM), Mohamed El Ferrane, dans son intervention lors de cette conférence, tout en critiquant le précédent gouvernement qui a tout bonnement supprimé l’Institut des études africaines qui dépendait de l’Université Mohammed V de Rabat.

Il a souligné que la recherche scientifique dans le domaine africain a un grand rôle à jouer pour explorer la réalité, d'une part, et dessiner les perspectives de l'avenir sur la base d'études et de recherches qui «ne se limitent pas à identifier les faiblesses et les raisons de la régression, mais ouvrent la voie pour des perspectives de coopération constructive, d’autre part. C'est ce qui a poussé de nombreux grands pays à créer des instituts spécialisés dans les études africaines pour réfléchir à l'avenir de l'Afrique afin d'y identifier les opportunités d'investissement ».

Mohamed El Ferrane a, à cet égard, rappelé d’éminents professeurs marocains qui ont œuvré inlassablement à «consolider les études africaines dans le domaine de la recherche scientifique au Maroc. Il a cité, entre autres, le regretté Mohamed Hajji, Ahmed Toufiq (l’actuel ministre des Habous et des Affaires religieuses) et le premier directeur de l'Institut des études africaines de Rabat, Halima Farhat ainsi que Fatima Harrak, Bouazza Benachir, Mouassaoui Ajlaoui, Khalid Chegraoui, Hassan Sadki, Rachid Benlabbah et Ahmed Choukri.

Pour sa part, Mohamed Derouich, président de la Fondation Fikr, a passé en revue la politique africaine du Maroc, notamment depuis l’intronisation de S.M le Roi Mohammed VI, saluant la «décision Royale sage et importante» de réintégration du Royaume au sein de l'Union africaine (UA) qui représente, selon lui, un tournant historique dans les relations afro-marocaines.

Il a fait savoir que « cette réintégration a pris de court les ennemis du Royaume ainsi que d'autres pays ».

Mohamed Derouich a également souligné que la création de l'Institut des études africaines sur instructions de Feu S.M le Roi Hassan II en 1987, était une décision allant dans le sens de garder le contact entre le Maroc et le reste des pays africains, tout en mettant l’accent sur la nécessité de prendre en compte toutes les initiatives et décisions de S.M le Roi Mohammed VI envers l'Afrique dans le processus de construction d'une institution nationale de recherche pour accompagner les politiques publiques mises en œuvre envers le continent africain.

Wail Benjelloun, ancien président de l'Université Mohammed V de Rabat, a, quant à lui, précisé que les relations du Maroc avec le continent africain sont anciennes et historiques, notant notamment le rôle joué par le Maroc au niveau de l’appui aux mouvements de libération dans le continent africain, en Angola et en Afrique du Sud, à titre d’exemple, ainsi que le rôle joué par le Royaume après l’indépendance pour créer une organisation unissant le continent africain.

L'ancien président de l'Université Mohammed V a également mis en avant que S.M le Roi Mohammed VI, depuis son accession au trône, s'est efforcé d'approfondir les relations avec les pays africains, rappelant, à cet égard, que le Souverain a effectué 40 visites dans le continent africain entre 2001 et 2016.

Et parmi les aspects qui mettent en lumière les relations profondes du Maroc avec les pays africains, Wail Benjelloun a affirmé que 7.500 étudiants étrangers poursuivent leurs études au Maroc, dont 68% sont issus de pays africains (40 pays), et 85% bénéficient d'une bourse octroyée par l’Agence marocaine de coopération internationale (AMCI).

A l’instar des autres participants à cette conférence, Wail Benjelloun a insisté sur l'importance de créer un institut universitaire national d'études africaines en phase avec la stratégie et la politique de l'Etat marocain envers le continent africain.

Pour sa part, le chercheur spécialisé dans les études africaines, Moussaoui Ajlaoui, a mis l’accent sur l'importance stratégique du continent africain sur le plan international. La preuve en est que la plupart des puissances internationales telles que les Etats-Unis d'Amérique, le Japon, la Chine, l'Union européenne, la Russie et même la Turquie tiennent à organiser des forums avec l'Union africaine, notant que cela est dû à l'importance des ressources naturelles dont regorge le continent africain.

L’intervenant a mis en valeur l’importance de l'Institut d'études africaines au sein duquel il travaillait pendant longtemps, lequel institut a publié près de 200 livres en arabe, français et anglais malgré les faibles ressources qui lui étaient allouées.

Moussaoui Ajlaoui a exprimé son regret pour la décision du précédent gouvernement de supprimer cet institut, décision qui, selon lui, «constitue un message négatif adressé à l'Afrique», d'autant plus que cet institut a été créé par Feu S.M le Roi Hassan II, immédiatement après le retrait du Maroc de l'Organisation de l'unité africaine au début des années quatre-vingt du siècle dernier, afin d'envoyer un message à l'Afrique selon lequel les liens du Maroc avec le continent africain sont pérennes malgré la décision de se retirer de l'OUA.

En ce sens, Moussaoui Ajlaoui a considéré que la création d'un institut national spécialisé dans les études africaines est devenue une nécessité urgente, surtout après le retour du Maroc à l'Union africaine, «un retour qui a bouleversé les rapports de forces dans le continent africain ».

« Le Maroc a besoin d'un grand institut national disposant de toutes les ressources humaines et matérielles pour qu’il puisse accomplir pleinement sa mission, où seuls des chercheurs sérieux de diverses disciplines peuvent y accéder », a insisté Moussaoui Ajlaoui lors de cette conférence organisée en partenariat avec l'Association des régions du Maroc (ARM), la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (BNRM), et l'Observatoire national de l'éducation et de la formation (ONEF).

L’intervention de Rachid Benlabbah était sur la même longueur d’onde. Il a lui aussi plaidé pour la création d’un institut des études africaines, soulignant que « sans une vision cohérente de ce que nous, Etat et chercheurs, voulons faire » et sans des objectifs clairs, ce projet est voué à l’échec.

A ce propos, il a présenté des propositions concrètes. Il a suggéré que cette institution soit autonome ne relevant d’aucune université et qu’elle soit dédiée à la recherche à plein temps. Selon lui, cet institut devrait enseigner des langues africaines comme le Swahili.

Par ailleurs, Rachid El Abdi, président de la région Rabat-Salé-Kénitra, a insisté sur le fait que le sujet de cette conférence intéresse les 12 régions du Royaume, considérant que celles-ci sont des institutions territoriales concernées par la diplomatie parallèle.

D’après lui, les régions du Royaume adhérent pleinement aux grandes orientations de la politique marocaine envers l'Afrique. Par exemple, la région de Rabat établit des accords de partenariat avec des pays africains dans divers domaines. Elle finance un projet avec la Mauritanie dans le domaine de la formation continue et va conclure un accord de partenariat avec la capitale kényane.

Il y a lieu de signaler qu’au terme de cette conférence, la Fondation Fikr a rendu hommage au chercheur marocain Moussaoui Ajlaoui.

Mourad Tabet


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