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Nos forêts se consument

Au faible taux de boisement viennent s’ajouter les conséquences d’un feu ravageur


Hassan Bentaleb
Mardi 3 Septembre 2019

Un été catastrophique pour les forêts marocaines. En effet, de sévères incendies se sont produits ces trois derniers mois détruisant des centaines d’hectares. Ce fut le cas dans la région de Driouch où 500 ha ont été consumés par le feu en  trois jours. Ce fut le cas également pour la forêt d’Ourika (région d’El Haouz) et celle d’Ain Lahcen (région de Tétouan) où 40 ha de forêt sont partis en fumée sans parler de la destruction de 1.000 espèces d’arbres à Errachidia.  Une très mauvaise nouvelle pour notre pays vu le faible taux de boisement et le rôle majeur joués par les forêts et les difficultés de leur reconstitution et régénération dans le contexte socioéconomique et environnemental national.
Pourtant, le Pr Taieb Boumeaza, géographe et professeur à l’Université Hassan II de Casablanca, estime que notre pays demeure chanceux et que le nombre d’incendies enregistrés est minime par rapport à l’année dernière et aux moyennes des superficies incendiées dans d’autres pays, notamment du pourtour méditerranéen, à conditions similaires. Des propos confirmés par des statistiques émanant du Haut-commissariat aux eaux et forêts et à la lutte contre la désertification (HCEFLCD) qui ont indiqué qu’au cours des six premiers mois de l’année en cours, 127 incendies ont eu lieu détruisant 201 ha et les superficies brûlées dans ce laps de temps ont baissé de 60%, en comparaison avec les dix années précédentes.    
La même tendance a été enregistrée en 2018 selon un bilan fourni le 11 avril dernier par le Centre national de gestion des risques climatiques forestiers qui a révélé que la superficie moyenne brûlée a diminué de 13% (3.372 à 2.928 ha/an) et que la superficie moyenne consumée par le feu a, à son tour, baissé de 31% (8 à 5,5 ha/incendie).
Abdeladim Lhafi, Haut-commissaire aux eaux et forêts et à la lutte contre la désertification a indiqué, de son côté, lors d’un point de presse en avril dernier, que le Royaume se trouve en bonne position par rapport aux pays du bassin méditerranéen, en termes de superficies moyennes incendiées, puisque cette  moyenne dépasse les 16ha/incendie. Il a précisé, en outre, que le nombre d’incendies a progressé de 20% par rapport à la moyenne des dix dernières années et que les superficies incendiées sont majoritairement constituées (62%) de strates herbacées et d’essences secondaires.
Sur le long terme, un groupe de chercheurs marocains ont démontré dans un article intitulé « Cartographie du risque d’incendies de forêt dans la région de Chefchaouen-Ouezzane (Maroc) » que l’analyse de la situation des incendies de forêt au Maroc fait ressortir qu’au cours des 50 dernières années (1960-2009), près de 12.912 incendies ont endommagé 149.292 ha de forêts, soit une moyenne de 2.986 ha par an, avec un maximum en 1983 (11.289 ha) et un minimum en 2002 (593 ha). Cette superficie moyenne annuelle représente 0,05 % de la surface totale boisée du pays.
Ils ont indiqué aussi que le nombre des incendies et les superficies incendiées en forêts marocaines sont jugés relativement élevés, eu égard au taux de boisement très faible du pays (8%), à l’aridité du climat et aux contraintes rendant extrêmement difficile la reconstitution des espaces boisés (reboisement, régénération).
Concernant les causes responsables du déclenchement de ces incendies, le Pr Taieb Boumeaza insiste énormément sur le facteur humain, notamment dans le cas des forêts situées au Nord du Maroc. « L’origine préméditée de ces incidents dans le Nord est indiscutable. En fait, les facteurs de propagation des feux (structure et composition du couvert végétal, sa combustibilité, le vent, l’humidité, la nature des terrains…) sont beaucoup élevés dans la région de l’Oriental et pourtant aucun incident n’y est enregistré ou peu. Idem dans la région du Moyen Atlas. C’est pourquoi il est légitime de se demande pourquoi il y a tant de feux de forêt dans cette région», s’est-il interrogé. Des affirmations que partagent plusieurs rapports et enquêtes des services compétents qui ont montré que la majorité des causes sont d’origine humaine et peuvent généralement être dues à la malveillance (carbonisation et utilisation non contrôlée des feux par la population, bergers, apiculteurs et passagers).
Qu’en est-il du changement climatique ? Notre source estime que ce facteur est loin d’être déterminant dans le cas du Maroc et pense que ses effets sur la forêt sont plus palpables au niveau des forêts du pourtour méditerranéen où de graves incendies ont été déclenchés ces dernières années.
Faut-il s’en inquiéter ? Oui, à en croire certains chiffres du HCEFLCD qui ont révélé que le couvert forestier national ne dépasse pas les 9 millions d’hectares, soit 12,7 % du territoire national et que le taux de reboisement reste limité à 8%, alors que le seuil nécessaire à l’équilibre écologique et environnemental est compris entre 15% et 20%. Ceci d’autant plus que la stratégie nationale pour la préservation, le développement des écosystèmes forestiers et la lutte contre la désertification cherchant à atteindre les 60.000 hectares annuellement semble progresser à faible cadence.


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