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Livraisons au compte-gouttes

Sinopharm a envoyé un demi-million de doses de vaccin


Chady Chaabi
Lundi 8 Mars 2021

La rareté est une richesse. Les vaccins reçus dimanche soir par le Maroc en provenance de Chine en sont la preuve. De prime abord, les 500.000 doses envoyées par le laboratoire d’Etat chinois, CNBG Sinopharm, ne payent pas de mine. Mais en ces temps où la course à l’approvisionnement fait rage, ce demi-million de doses représente une aubaine inestimable. Il permettra aux autorités sanitaires d'inoculer une double dose à 250.000 citoyennes et citoyens prioritaires, alors que le stock de première dose était au bord de la rupture en fin de semaine dernière. Jusqu’à dimanche soir, le Royaume avait sous la main 8 millions de doses. De quoi immuniser complètement quatre millions de Marocains dont 3.913.615 avaient reçu la première dose et 578.942 la seconde. Ainsi, il ne restait plus que 86.385 unités dans les magasins. Un différentiel calculé à partir des données officielles fournies par le ministère de la Santé. De fait, le rythme de vaccination de la première dose s’est effondré pour atteindre le nombre de 57.000, vendredi dernier, alors qu’il atteignait 250.000, il y a une semaine. Une situation préoccupante, partiellement atténuée, donc, par les 500.000 doses qui ont atterri sur le tarmac de l'aéroport Mohammed V de Casablanca. Partiellement, car cette livraison ne règle pas le problème majeur de la visibilité en termes d’approvisionnement, malgré les appels du pied incessants du gouvernement marocain à ses fournisseurs en vaccin, AstraZeneca et Sinopharm, qui doivent, en tout, livrer respectivement 20 et 45 millions de doses. Et si la situation est tellement préoccupante, c’est tout simplement à cause des variants qui peuvent non seulement contaminer les personnes qui ont reçu une dose, mais aussi favoriser la propagation de l’épidémie, d’autant qu’il suffit de jeter un coup d’oeil par la fenêtre pour s'apercevoir que les masques et gestes barrières sont du passé. A l’évidence, il est plus difficile de trouver un vaccin que d’en fabriquer en grandes quantités. Et pour cause, 193 pays dans le monde auraient commandé 20 milliards de doses. Or, la capacité de production mondiale de vaccins prévue ne dépassera guère les 9,2 milliards de doses d'ici la fin de l'année. Un écart où prend forme le diktat de certains pays. A commencer par l’Union européenne. Sous l’impulsion de la chancelière allemande, Angela Merkel, Ursula von Der Leyen, la cheffe de l’exécutif européen, a demandé, il y a quelques semaines, à son cabinet de préparer rapidement un texte soumettant les exportations de vaccins vers des pays tiers à une procédure d’autorisation nationale. Concrètement, la procédure devait s'assurer que «les laboratoires, en particulier Pfizer-BioNTech et AstraZeneca, accusés de ne pas tenir leurs engagements, n’exportent pas, notamment vers le RoyaumeUni, des doses qui auraient dû être livrées aux Européens», soulignait le quotidien français “Libération”. «AstraZeneca a des obligations et doit les respecter. Le laboratoire est prêt à livrer un tiers de ce qu’il devait livrer au premier trimestre, il en manque deux tiers. Pour être claire, nous voulons ces vaccins», a indiqué Ursula von Der Leyen dans un entretien accordé à plusieurs médias européens. Puis d’ajouter : «AstraZeneca nous a prévenus de son retard au dernier moment et sans avancer de raisons convaincantes, il faut maintenant de la transparence. C’est pour ça que nous avons adopté un mécanisme de contrôle des exportations de vaccins contre la Covid-19». Un mois plus tard, ce mécanisme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à du protectionnisme d’un autre temps, a fait sa première victime. Vendredi dernier, l'Australie est tombée de haut en constatant que le gouvernement italien avait bloqué l'exportation de quelque 250.000 doses du vaccin d'AstraZeneca qui lui étaient initialement destinées. Dès le 26 février, Rome avait validé l’action auprès de la Commission européenne. Pour sa part, le ministère des Affaires étrangères a expliqué, dans un communiqué, que ce refus d’exportation portait sur 250.700 doses du laboratoire suédo-britannique. Une décision justifiée à la fois par «la pénurie persistante de vaccins et les retards d’approvisionnement de la part d’AstraZeneca dans l’UE et en Italie» et par le fait que l’Australie est considérée comme un pays «non vulnérable» par le mécanisme de l’UE qui a décidé de défendre les intérêts de ses pays membres au mépris de toute considération diplomatique. Mais cela n’explique pas pour autant le retard de livraison dont souffre le Maroc. Du moins, c’est ce que l’on croit. Les vaccins d’AstraZeneca censés être envoyés au Maroc sont fabriqués par le Serum Institute of India. En conséquence, l’UE n’a aucun droit dessus, contrairement au gouvernement indien. Il y a une dizaine de jours, Adar Poonawalla, le directeur général de Serum Institute of India, avait demandé à ses clients dans un tweet d'être patients. “L’Institut a été chargé de donner la priorité aux besoins énormes de l’Inde, tout en assurant les besoins du reste du monde. Nous faisons de notre mieux“, a-t-il expliqué. Finalement, le Maroc ne serait pas en concurrence avec l’Union européenne, mais plutôt avec l’Inde. Ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle. Lancée le 16 janvier dernier, la campagne de vaccination en Inde cible 300 millions de personnes. Aujourd’hui, un peu plus de 11 millions d’Indiens ont été vaccinés. Un retard qui, de toute évidence, risque d’avoir un impact sur la campagne de vaccination au Maroc. Si ce n’est déjà le cas. 


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