L’intégration tant attendue des médecins du privé au régime de couverture sociale ne semble pas une vraie réussite. En effet, ces professionnels du privé se sentent discriminés. Ils avancent que «la mise en place de ce régime pose un gros problème d’équité relatif au montant de la cotisation et relève une ignorance totale de leurs efforts pour la réussite de l’AMO. Pis, ils estiment «être indexés du plus haut taux de toutes les professions libérales». Dans une lettre adressée dernièrement au chef du gouvernement par la CSNMSP, la SNML, le SNMG et l’ANCP, les médecins du privé soutiennent que le projet de décret 2- 21-290 ne prend pas uniquement en compte leurs spécificités, mais il met en place des bases de cotisations différentes entre les médecins, les pharmaciens et les notaires. Ce qui représente, selon eux, une «inadéquation totale avec les textes législatifs en vigueur». S’agissant des particularités des médecins privés, les centrales syndicales rappellent que lors d’une réunion entre les syndicats des médecins et les responsables du dossier (ministère de la Santé, ministère du Travail, ANAM, CNSS, CNOM), il a été décidé que «des incitations sous forme de réduction du montant de la cotisation due, seraient mises en place dès le démarrage du processus». Les syndicats soulignent, dans ce sens, que «les médecins privés français bénéficient d’une prise en charge de leurs cotisations sociales par la CNAM (équivalent de l’ANAM) pouvant atteindre les 80% puisque les médecins contribuent au quotidien à la réussite de l’Assurance maladie en France». A noter qu’un accord avec les médecins du secteur privé a été trouvé en 2020 après des négociations tendues lancées en 2018. Le compromis trouvé a proposé une cotisation des généralistes comme suit: 4 x Smig (2.638) = 10.552 DH x 6,37%= 672,12 DH, arrondis à 700 DH par mois et par médecin et une cotisation des spécialistes: 5 x Smig (2.638) = 13.190 DH x 6,37%= 840,20 DH, arrondis à 850 DH par mois et par médecin. Une fois adopté, le décret officialisera l’entrée dans le cadre de l’AMO d’une population cotisante comprise entre 11.000 et 12.000 professionnels. L’accord entre les médecins et le gouvernement évoque, également, la proposition de mise en place d’un système d’incitation ou de compensation, dédié aux professionnels qui adhèrent aux programmes visant la répartition des coûts, participent au maintien de l’équilibre financier du régime AMO et encouragent la prévention des maladies. C’est une sorte de système de compensation qui accorde, aux professionnels de la santé, une rémunération directe/ristourne sur cotisation AMO, en fonction d’un certain nombre de critères qui vont dans le sens de l’atteinte des objectifs de santé publique. Le mécanisme n’est pas encore fixé. Ses détails ne seront pas inclus dans le décret qui sera examiné en conseil de gouvernement. Le ministère de la Santé, l’ANAM et la CNSS travailleront sur le dispositif ultérieurement. Les médecins du privé considèrent cet état de fait comme «inacceptable». D’autant plus que la CNSS a déjà commencé à envoyer des numéros d’immatriculation à certains médecins en violation des lois en vigueur. En effet, un SMS informe les médecins et les invite à se connecter pour finaliser leur adhésion alors que la loi 98-15 édicte que «les adhésions se font par déclaration volontaire ou bien par inscription d’office par la CNSS ». L’article 7 de la même loi impose à la CNSS d’envoyer un courrier recommandé (pas de mail ni SMS) invitant les concernés à s’inscrire et quand ils ne le font pas, la CNSS pourra les inscrire d’office le 30ème jour suivant la date de l’envoi de la lettre en question. Et c’est seulement à partir de ce moment que l’intéressé deviendrait débiteur envers la CNSS et jamais avant. « En pratique, nous vous invitons à ne pas renseigner le formulaire requis par la CNSS, qui est en train de violer l’article 7 de la loi 98/15», précise un appel d’urgence adressé aux médecins privés. Que proposent les centrales syndicales ? «Les syndicats signataires de la présente lettre manifestent leur désapprobation unanime quant aux cotisations proposées à l’AMI. Pour reprendre les discussions relatives au contenu de la proposition du décret susmentionné, nous réclamons de reconduire les débats avec toutes les parties en charge de cette problématique. Aussi, pour pouvoir avancer dans ce dossier, cher à notre Souverain, émettons-nous le souhait de vous rencontrer afin de sortir de l’impasse et vous prions, Monsieur le chef du gouvernement, de bien vouloir nous accorder une entrevue dans les meilleurs délais, afin de revoir avec vous, de nouvelles issues à ce dossier, auquel les médecins privés accordent la plus haute importance», soulignent les syndicats. Et de conclure : «Après la parution des textes législatifs organisant l’AMI, nous avions débuté les négociations avec la CNSS au sujet de la cotisation des médecins privés. Notre vision était d’être traités à ce sujet avec l’équité qu’impose l’article 6 de notre Constitution et celle qu’impose tout contrat d’assurance. Nous réclamions également que soit appliqué ce principe d’équité entre les adhérents, comme stipulé dans la loi 15-98. Nous demandions également, que soient mises en place, des incitations valorisant l’effort de tous les médecins».