«La grâce Royale pour les Subsahariens détenus dans les prisons marocaines ». Tel est le vœu exprimé à la veille du 20ème anniversaire de l’intronisation de S.M Mohammed VI par plusieurs organisations, coalitions, et activistes de divers horizons militant en faveur de la défense des droits humains en général et de ceux des migrants en particulier. Dans une lettre en ligne sur Internet, les signataires demandent au Souverain de bien vouloir accorder sa grâce, de manière exceptionnelle, au plus grand nombre possible de détenus subsahariens et de les inclure, dorénavant, dans tous les prochains processus d’octroi de pareille mesure. « Il s’agit d’une demande purement humanitaire, de droit et d’intégration. Nous sollicitons un quota sans revenir pour autant sur les motifs d’incarcération de ces détenus, du déroulement de leurs procès ou des conditions de leur détention. En fait, on estime que la précarité de leur situation serait l’un des facteurs déterminants qui les ont amenés à commettre des actes répréhensibles au regard des lois marocaines», nous a indiqué Younes Foudil, coordinateur de «Plateforme papiers pour tous». Et de poursuivre : «Que l’idée d’octroyer la grâce Royale aux détenus originaires d’Afrique subsaharienne incarcérés dans les prisons marocaines n’est pas nouvelle et qu’une tentative a été initiée en 2009, mais, malheureusement, elle n’avait pas abouti ». Notre source nous a indiqué que ces détenus souffrent de mauvais traitements et même de certaines pratiques à caractère raciste. « Les détenus subsahariens ne bénéficient pas des mêmes conditions d’incarcération que les Européens qui ont la possibilité de contacter leurs familles et leurs chancelleries et qui ont les moyens d’engager des avocats », nous a-telle expliqué. Et d’ajouter : « Les Subsahariens sont laissés à l’abandon par leurs chancelleries qui ne savent rien sur eux dans certains cas». Le bâtonnier Abderrahim El Jamai, vice-président de l’Observatoire marocain des prisons (OMP), nous a indiqué que la Commission de grâce examine les demandes de grâce sans discrimination entre les prisonniers et procède selon les cas. Concernant le cas des détenus subsahariens, il nous a déclaré qu’il est difficile d’évoquer ce sujet en l’absence de données fiables. Pourtant, cela n’empêche pas de dire, selon lui, que certains détenus étrangers ont été arrêtés et condamnés à de longues peines de prison sans avoir bénéficié, pour autant, des conditions d’un procès équitable et sans avoir disposé de moyens de défense adéquats. « Il y a eu existence de procès expéditifs sans traducteurs et en présence d’avocats appelés à la dernière minute et sans même avoir eu le temps de préparer leur défense de manière adéquate ou de l’avoir fait à la hâte », nous a-t-il affirmé. Et de préciser : « Dans les prisons, la situation n’est pas non plus rose. L’environnement de ces établissements pénitentiaires est hostile (manque de communication faute de maîtrise de la langue, problème de contact avec leurs familles, absence de lieux du culte…). On se demande s’il s’agit de prisonniers ou de damnés de la terre». Pourtant, le bâtonnier observe que le travail de cette commission est marqué par l’absence de règles claires encadrant son fonctionnement. « La procédure est moins claire et moins transparente qu’il n’y paraît. A l’inverse des procédures relatives à la mise en liberté conditionnelle, la détention, l’arrêt de détention, la mise en application des peines qui sont des procédures claires et connues par tous, l’opacité règne concernant le fonctionnement de cette commission». Selon lui, une réalité s’impose avec acuité à ce propos. « Il est vrai que la demande de bénéficier d’une grâce Royale peut être déposée, entre autres, par le mis en cause lui-même ou sur proposition de l’administration pénitentiaire et que ladite commission ne décide qu’après examen de la durée de la peine, des charges retenues contre le mis en cause, de sa situation, des effets de l’acte commis et incriminé, mais il n’en demeure pas moins que la transparence fait défaut», nous a-t-il précisé. Et de conclure : « Il faut des règles précises pour faire taire les voix qui protestent chaque année contre les conditions d’octroi de la grâce à certains détenus et pas à d’autres ».