Le reconfinement est sur toutes les langues. Peut-on y échapper ?


​Chady Chaabi
Dimanche 1 Novembre 2020

On en est pas encore à se ruer sur les hypermarchés pour empiler pâtes, riz et autre boîtes de conserves au fond de nos placards, mais l’atmosphère qui flotte en a tout l’air. Le mot confinement revient de plus en plus dans la sphère médiatique. La raison ? A dire vrai, il y en a plusieurs. A commencer par la situation épidémiologique du pays. A l’heure où l’on écrit ses lignes, 219.084 personnes ont été contaminées par le Sars-Cov2. Samedi soir, le ministère de la Santé dénombrait pas moins de 34.114 cas actifs sur tout le territoire. 814 sont en réanimation dont 69 sont sous intubation et 468 sous ventilation non invasive. En plus de 70 nouveaux décès qui portent le total à 3.695 victimes du Covid-19.

On ne va pas se raconter d’histoires, l’heure est grave. Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, l’a d’ailleurs récemment rappelé. Dès lors, le confinement s’impose comme une évidence, surtout dans la région de Casablanca-Settat où est recensée la moitié des nouveaux cas quotidiens. En outre, l’hypothèse du reconfinement est d’autant plus plausible que plusieurs pays européens, dont la France, y ont eu recourt ces derniers jours. Et pour cause, le Vieux Continent fait face à une mutation génétique du Sars-CoV-2 qui se propage depuis cet été comme une traînée de poudre, en provenance d’Espagne, si l’on en croit des chercheurs de l'Université de Bâle dont les travaux ont été prépubliés sur le serveur MedXriv. Souche dominante dans la plupart des pays qui enregistrent une forte deuxième vague, elle a résulté sur six autres variantes. Inconnue aux prémices de l’été, cette souche concernerait à présent 80% des cas en Espagne et au Royaume-Uni, 60% des cas en Irlande, et 40 % en Suisse et en France.

Loin de tout catastrophisme et en attendant la découverte du vaccin salvateur, on sent bien que les prochains mois s’annoncent brûlants surtout si la souche du nouveau coronavirus précitée s’invite de ce côté-ci de la Méditerranée. C’est donc pour l’ensemble de ces raisons que le reconfinement revient petit à petit dans l’esprit des décideurs marocains. Mais trancher pour ou contre n’est pas aussi simple que cela. Une telle décision aurait des conséquences aux multiples ramifications.

Economiquement, un reconfinement enfoncerait encore plus les entreprises et les personnes qui ont la tête dans l’eau depuis le début de l’épidémie. Pour rappel, l’économie marocaine est en récession. La croissance pourrait même chuter de 7% si reconfinement il y a. Et si l’on ajoute à cela qu’un Marocain sur deux serait aujourd’hui au chômage, et deux tiers des actifs (66,2%) sont en arrêt temporaire de travail, il faut se rendre à l’évidence : le reconfinement aura forcément des répercussions graves sur l’économie nationale. Le pays est-il en mesure de l’assumer et de surmonter une seconde crise économique ? L’avenir nous le dira. En revanche, une chose est sûre : le reconfinement fera beaucoup de mal à la santé mentale des citoyennes et citoyens.

A la suite du premier confinement, le Haut-commissariat au plan avait révélé que l’anxiété est le principal impact psychologique du confinement. Mais malheureusement, l’impact psychologique du confinement ne s’arrête pas là comme nous l’a confié, à juste titre, Rim Akrache, psychologue clinicienne et neuropsychologue en citant l’exemple du personnel soignant : « En première ligne, le corps médical a été exposé fortement aux sentiments d’impuissance, d’insécurité et de peur. La charge de travail a été décuplée». Puis de préciser : « C’est dans ce sens que la prévention des troubles psychiques et du burn-out, en particulier chez cette population, est absolument nécessaire». En effet, si le personnel soignant a été particulièrement mis en avant au début de l’épidémie, aujourd’hui, on a l’impression qu’il n’existe plus. Or, ces hommes et femmes remplissent toujours leur rôle avec autant de vigueur et de dévouement. Par ailleurs, si l’on veut axer le sujet sur le citoyen lambda, «il leur faudra se rapprocher des cellules d’écoute, des professionnels de la e-santé quelles que soient les difficultés», nous explique Rim Akrache.

En clair, le soutien psychologique sera encore plus déterminant si le reconfinement refait son apparition. Enfin, tout dépendra aussi de la nature de cet hypothétique reconfinement. Sera-t-il du même acabit que celui instauré en mars dernier ? Généralisé à l’échelle nationale ou uniquement ciblé dans certaines régions ? Et Quid de la proposition du Haut-commissariat au plan de confiner la population un jour par semaine ? Ce sont là des questions que tout le monde se pose mais auxquelles personne ne peut y répondre formellement pour l’instant.

Chady Chaabi


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