
La ville catalane de Figueres, à une vingtaine de kilomètres au sud de la frontière française, s'est réveillée dans un nuage de fumée.
Le clocher de l'église Sant Pere et la coupole du musée Dali étaient noyés dans un halo grisâtre, et on pouvait sentir une forte odeur de brûlé dans les rues de la ville, toute proche des premiers foyers d'incendie.
Pourtant, pour la première fois depuis dimanche, les autorités catalanes laissaient entrevoir une accalmie.
"L'impression est qu'il sera possible d'entrer dans une phase de contrôle dans la journée", a déclaré le ministre catalan de l'Intérieur, Felip Puig. "Nous sommes raisonnablement optimistes", a-t-il ajouté, estimant que les conditions climatiques étaient favorables, avec une baisse des températures, l'augmentation de l'humidité dans l'air et l'absence de vent. Environ 1.500 personnes, pompiers, policiers et militaires, gardes forestiers et volontaires, luttaient mardi contre le feu, appuyés par 25 avions et hélicoptères espagnols et français.
Les bombardiers d'eau ont dû se poser lundi soir en raison du vent mais il "s'est adouci pendant la nuit", permettant la reprise des opérations, a expliqué une porte-parole des pompiers.
A Figueres, les habitants découvraient leur ville sous un jour inconnu.
"Je ne me souviens pas d'avoir déjà vu un tel nuage de fumée sur Figueres, c'est la première fois", note Maria Angels Rodriguez, agent immobilier de 50 ans.
Se rendant au travail près du musée Dali, elle échange des propos avec un marchand de fruits et légumes. "Dimanche, il y a aussi eu de la fumée mais c'était le soir, aujourd'hui c'est très surprenant."
Penchés sur des journaux ouverts aux pages consacrées aux incendies, Cebria Barris, 79 ans, et Isidre Asparo, 55 ans, se souviennent des incendies de 1986, qui avaient déjà recouvert Figueres d'une couche de fumée.
"J'étais trop jeune en 1986 pour m'en souvenir, donc pour moi c'est la première fois que je vois un tel nuage de fumée, mais ça dure depuis dimanche", dit pour sa part Isaac Hernandez.
L'homme de 33 ans, qui nettoie le comptoir du café Xiroi, l'avoue: "Je n'ai pas peur parce que nous sommes en ville, mais je suis triste pour ce qui se passe dans les montagnes".
L'incendie, qui a laissé derrière lui d'immenses étendues de végétation calcinée, ne progresse presque plus depuis lundi, après avoir brûlé environ 14.000 hectares.
Le feu avait démarré dimanche dans le village franco-espagnol du Perthus, avant de se propager, côté espagnol à la ville de La Junquera et à la région catalane de l'Alt Emporda, située au sud.
Attisé par une très forte tramontane, vent soufflant du nord-ouest, le feu a progressé très rapidement vers le sud, jusqu'à ce qu'une accalmie lundi ne freine son avancée.
Trois personnes sont mortes dimanche: un Espagnol de 75 ans, qui a succombé à une crise cardiaque après avoir vu sa maison entourée par les flammes, dans le village de Llers, près de La Junquera, ainsi que deux Français, un homme et sa fille de 15 ans, qui se sont jetés à la mer en voulant échapper aux flammes, dans la localité côtière de Port-Bou, sur la Méditerranée.
Dans 17 villages, les autorités ont recommandé à la population de rester confinées chez elles, portes et fenêtres closes, tandis que la région se transformait en un gigantesque brasier.
Des centaines de personnes évacuées, dont des campeurs, ont aussi été hébergées dans des centres d'urgence, dormant dans des salles sportives comme à Figueres.
L'autoroute qui relie la France à l'Espagne, entre Perpignan et Figueres, a pu rouvrir dans les deux sens lundi, après avoir été fermée à deux reprises depuis la veille.
Les incendies de forêt et de broussailles sont particulièrement nombreux cette année en Espagne, où l'hiver a été le plus sec depuis environ 70 ans. Le plus dévastateur à ce jour a détruit début juillet 50.000 hectares de végétation dans la région de Valence, dans l'est du pays.