
La contestation à l’égard du pouvoir en place ne cesse de s’accentuer depuis la mort jeudi dernier de l’opposant Mohamed Brahmi, abattu devant chez lui.
Cet assassinat d’une figure de l’opposition laïque au nouveau pouvoir en place à Tunis intervient seulement six mois après celui d’un autre opposant, Chokri Belaïd.
Dans les deux cas, les autorités tunisiennes accusent les militants extrémistes salafistes tandis que l’opposition estime que ces meurtres sont imputables au parti Ennahda.
Selon eux, la formation islamiste a créé depuis son accession au pouvoir un sentiment d’impunité pour les activistes radicaux. Des manifestations ont commencé à se former vendredi dernier à Tunis, rassemblant quelques centaines de personnes mais le mouvement s’est amplifié pour atteindre près de 20.000 mardi.
Ce regain de tension vient perturber la fragile transition démocratique à l’œuvre en Tunisie alors que l’assemblée constituante a besoin de quelques semaines supplémentaires pour finaliser un projet de Constitution.
Ce regain de tension est exacerbé par le fait que chaque camp considère être engagé dans une lutte pour sa survie politique et que les crispations se font plus évidentes.
Selon Monica Marks, une spécialiste de la Tunisie, les dirigeants en particulier ceux de l’opposition pourraient contribuer à apaiser les tensions en employant un discours plus conciliant. «Au lieu de cela, ils attaquent à la carotide», note-t-elle.
La famille de Mohamed Brahmi a refusé la présence de représentants du gouvernement dirigé par le parti Ennahda dont les adversaires ont promis un enterrement prochain.
Face à la contestation, Ennahda a offert des concessions et s’est dit ouvert à l’idée d’un nouveau gouvernement mais a en revanche fermé la porte à toute modification de l’assemblée constituante.
Le règne de Zine ben Ali a laissé des stigmates profonds aussi bien chez les islamistes qui furent alors persécutés que chez les opposants de gauche accusés aujourd’hui de collusion avec l’ancien régime.
Malgré les affirmations de l’opposition, les observateurs internationaux estiment ne pas avoir assisté à une radicalisation dans le pays au cours des derniers mois, alors que la Tunisie travaille à l’élaboration de sa nouvelle Loi fondamentale.
Bien qu’à l’origine du Printemps arabe, les Tunisiens ont fait montre d’une forme de retenue face aux turbulences politiques même si partisans et adversaires du nouveau pouvoir s’affrontent verbalement.