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La Chine traque les voyageurs en provenance de l'épicentre du virus


Mardi 4 Février 2020

La Chine traque les voyageurs en provenance de l'épicentre du virus
Délations rémunérées, interrogatoires serrés... Les natifs de Wuhan, la ville au coeur du nouveau coronavirus, sont parfois traqués dans le reste de la Chine comme des criminels.
Ce week-end, la fin des longs congés du Nouvel an lunaire a suscité de nouvelles inquiétudes, la population redoutant une recrudescence de la propagation du virus à la faveur du retour des habitants partis loin de chez eux.
A Pékin, certains quartiers se sont barricadés - parfois derrière des barrages improvisés - pour contraindre les visiteurs ou toute personne de retour à fournir l'historique de son voyage.
Un quartier de Shijiazhuang, une ville située au sud-ouest de Pékin, offre même 2.000 yuan (260 euros) pour tout signalement de personnes ayant été à Wuhan au cours des deux dernières semaines.
Dans certains quartiers et villages, les habitants revenant de la province centrale du Hubei, dont Wuhan est la capitale, sont ostracisés.
A l'entrée d'un quartier de Pékin, un agent de sécurité interrogé sur la politique qu'il applique aux personnes de retour du Hubei, ne cache pas que "même si vous vivez ici, vous ne pouvez pas entrer".
Ils "pourraient ramener l'infection ici", a-t-il soutenu à l'AFP et "si vous venez du Hubei, vous devez en informer le comité de quartier".
A travers tout le pays, des mesures radicales ont été prises ces dix derniers jours pour tenter de juguler l'épidémie qui a fait 361 morts dans le pays.
Sur les plus de 17.000 personnes contaminées détectées à travers le pays, 11.177 vivent dans la province du Hubei et sa capitale Wuhan coupées du monde depuis le 23 janvier.
Lundi, sur les 57 nouveaux décès enregistrés, 56 avaient eu lieu dans cette province. A titre de comparaison, Pékin n'a fait état que de 191 cas de contamination.
La semaine dernière, la commission sanitaire chinoise a appelé les villages à ne rien négliger pour vérifier où les personnes se sont rendues.
Si le Hubei est de facto en quarantaine, cinq millions de personnes auraient quitté la ville avant le Nouvel an lunaire, selon le maire de Wuhan.
Ainsi, un peu partout, les gouvernements locaux subissent des pressions pour expulser les personnes venant de la province du Hubei.
"Si je ne les connais pas ou s'ils traînent une valise, je leur demanderai de s'enregistrer", explique une femme travaillant dans un complexe d'habitations à Pékin.
Une fois les personnes venant du Hubei ou de Wuhan recensées, elles font l'objet d'un contrôle strict. "Ils ne peuvent ni entrer ni sortir", déclare Mme Xu Aimin, secrétaire du parti d'un quartier de Pékin. S'ils ont besoin d'acheter de la nourriture, le comité de quartier peut le faire à leur place, a-t-elle affirmé à l'AFP.
Les habitants venant du Hubei reçoivent également des appels téléphoniques quotidiens et doivent enregistrer leur température pendant une quarantaine de deux semaines, a-t-elle ajouté.
Selon Mme Xu, son comité de quartier, qui gère un complexe d'appartements représentant 2.400 ménages, a frappé à chaque porte pour vérifier le dossier des habitants.
"Nos informations viennent de la base", souligne-t-elle à l'AFP, avant de préciser que le comité de quartier vérifie les antécédents de voyage.
"Nous voulons que chacun devienne une source d'information", souligne Mme Xu. Si les habitants "ne font pas confiance à la personne d'à côté, ils doivent immédiatement appeler" le comité de quartier.
En dépit des mesures drastiques prises par Pékin, le virus s'est largement répandu à travers la Chine.
Dimanche, la métropole de Wenzhou, une ville portuaire de plus de 9 millions d'habitants située à quelque 800 km à l'est de Wuhan, a rejoint la liste des villes confinées.
Les autorités s'inquiètent cependant de cette manière de boucler certains quartiers à tout visiteur extérieur: Pékin a rappelé samedi aux responsables de quartiers qu'ils n'avaient "aucun pouvoir" pour empêcher les gens d'entrer une fois leur température contrôlée.
Cela n'a pas empêché Gou Hairong, une Pékinoise revenant de la province du Sichuan, de se voir refusé l'accès à son domicile.
Bloquée à la gare de Pékin-Ouest, la jeune femme de 24 ans est prête à repartir "s'ils ne me laissent vraiment pas rentrer".
Ce rejet dont font l'objet les habitants du Hubei suscite des inquiétudes quant aux risques de stigmatisation.
"La manière dont vous considérez Wuhan, c'est ainsi que le monde verra la Chine", a écrit une personne sur Weibo, la plateforme de microblogs.
Lucy Huang, une réalisatrice de documentaires vivant à Pékin et native de Wuhan, se dit "très blessée". Cette femme de 26 ans a expliqué à l'AFP comprendre la nécessité de faire preuve de prudence, mais "notre ennemi a toujours été le virus et cela ne devrait pas être le peuple Hubei ou le peuple Wuhan".

L'épidémie contamine les marchés boursiers

Après dix jours d'interruption, les Bourses chinoises ont dévissé d'environ 8% lundi, leur plus fort plongeon depuis cinq ans, paniquées par l'impact économique de l'épidémie de pneumonie virale malgré des mesures de la banque centrale pour rassurer les marchés.
Le plongeon était attendu: du fait des traditionnelles vacances du Nouvel an lunaire, les marchés de Shanghai et Shenzhen étaient fermés depuis le 24 janvier, soit au lendemain du confinement de la ville de Wuhan, foyer du nouveau coronavirus.
Or, pendant ce temps, les indices boursiers mondiaux ont piqué du nez depuis dix jours, effrayés par les conséquences de l'épidémie sur la croissance de la Chine, deuxième économie mondiale, où l'activité reste encore largement paralysée.
D'où l'effet de rattrapage: l'indice composite shanghaïen a clôturé lundi sur une chute de 7,72% à 2.746,61 points, tandis que la Bourse de Shenzhen, deuxième place de Chine continentale, finissait en repli de 8,41% à 1.609,00 points. C'est leur plus forte baisse depuis le krach boursier de l'été 2015.
"La panique des investisseurs s'est propagée sur l'ensemble de la cote, elle dominera le marché à court terme", observe Yang Delong, économiste du fonds d'investissement First Seafront.
Presque 3.500 titres ont chuté de 10%, seuil à partir duquel les échanges sont automatiquement suspendus sur l'action concernée, selon un décompte Bloomberg.
L'épidémie, qui a désormais fait plus de morts (362 décès confirmés) que le virus du Sras en 2002-2003, pesait également sur les marchés chinois des changes et des matières premières, eux aussi rouverts lundi.

 


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