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Le président de l’OMP, Abdellatif Rafoua, a souligné dans son intervention que la question des peines alternatives à la détention constitue un axe principal dans l’action et les activités de l’Observatoire, notant que depuis sa création, il « a tenu à adopter une approche des droits de l'Homme fondée sur les pactes, conventions, règles et principes internationaux concernant les questions relatives aux droits de l'Homme et aux prisons ».
« L'Observatoire met l’accent sur l'importance et la légitimité d'adopter des alternatives aux peines privatives de liberté, en particulier dans des circonstances faisant l’objet d’efforts et d’aspirations à réformer la législation pénale, afin d'établir une justice qui mette, avec courage, toutes les peines privatives de liberté dans la place qui leur convient loin de toute logique de répression ».
Abderrahim Jamai : Le gouvernement va commettre une erreur stratégique, voire historique s’il présente ce projet de loi indépendement des autres lois concernant la politique pénaleIl y a lieu de rappeler que le ministère de la Justice a présenté récemment un projet de loi relatif aux peines alternatives à celles privatives de liberté. Ces peines sont définies comme étant des sanctions non privatives de liberté pour les délits dont les peines ne dépassent pas 2 ans d’emprisonnement. Le condamné est tenu de respecter les engagements qui lui ont été assignés pour préserver sa liberté.
Il s’agit en l’occurrence du travail d'intérêt général, de l’amende journalière, de la surveillance électronique, de la limitation de certains droits ou de l’imposition de mesures restrictives, thérapeutiques ou de réhabilitation.
Dans son intervention lors de la conférence de l’OMP, Me Abdelkébir Tabih, avocat au barreau de Casablanca, a pointé du doigt plusieurs lacunes dans ce projet de loi, soulignant que l’une d’entre elles est qu’on ait passé sous silence l’assentiment de la personne à laquelle on devrait appliquer une peine alternative.
« Figurez-vous que l’on exige à un président d’une commune qu’il effectue un travail d'intérêt général dans sa commune, est-ce qu’il va accepter ? », s’est interrogé Abdelkébir Tabih non sans une certaine ironie.
Il a affirmé que le Maroc a pris du retard dans l’adoption des peines alternatives. « Nous ne devons pas attendre l’élaboration d’une loi parfaite, mais il faut mettre en œuvre ce projet de loi, car c’est dans la pratique qu’on va déceler ses défauts et, partant, les corriger », a-t-il mis en avant.
Le bâtonnier Me Abderrahim Jamai a, quant à lui, tiré à boulets rouges contre le ministre de la Justice qui a préféré présenter ce projet de loi séparément des autres textes du Code pénal et du Code de la procédure pénale. «On va commettre une grave erreur si l’on présente ce projet de loi séparément des autres lois concernant la politique pénale», a martelé Me Abderrahim Jamai. Et de s’adresser au gouvernement, notamment au ministère de la Justice : «Vous allez commettre une erreur stratégique, voire historique en soumettant au débat une loi composée de quelques articles intimement liés à la politique pénale».
Abdelkébir Tabih Nous ne devons pas nous attendre à l’élaboration d’une loi parfaite, mais il faut mettre en œuvre ce projet de loi, car c’est dans la pratique qu’on va déceler ses défauts et, partant, les corrigerLe représentant du ministère de la Justice a, pour sa part, affirmé que le législateur marocain «a adopté la même approche de législation comparée en mettant en place des peines alternatives».
Il a relevé que le diagnostic établi par le ministère sur la réalité de la politique criminelle montrait «l'existence d'un ensemble de crises, dont la plus importante est peut-être celle des peines privatives de liberté de courte durée ».
Le représentant du ministère de la Justice a également souligné que la pratique a prouvé que les peines privatives de liberté «manquent d'efficacité pour corriger le comportement du délinquant, tout en pesant sur le budget de l'Etat avec la construction de prisons, la fourniture de nourriture pour les prisonniers, etc.».
Il a rappelé que les données statistiques disponibles montrent que la moitié de la population carcérale « avait fait l'objet de peines privatives de liberté n'excédant pas deux ans. Cette situation a grandement contribué à la surpopulation des établissements pénitentiaires en l'absence de réelles alternatives aux peines précitées», mettant en avant que la question des peines alternatives «a retenu l'attention du ministère, qui travaillait à l'élaboration d'un projet de loi relatif aux peines alternatives, indépendamment de la révision de la politique pénale, afin de gagner du temps législatif».
«Le ministère de la Justice a pris cette décision, étant donné que soumettre le projet de loi de procédure pénale nécessitera beaucoup de temps dans le circuit législatif, ce qui l’a poussé à prendre l'initiative de préparer un projet indépendant concernant les peines alternatives, compte tenu de l'importance de celles-ci », a-t-il précisé.
Mourad Tabet