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« Don Rodrigue :
ô Dieu, l'étrange peine !
En cet affront mon père est l'offensé,
Et l'offenseur le père de Chimène !
Que je sens de rudes combats !
Contre mon propre honneur mon amour s'intéresse :
Il faut venger un père, et perdre une maîtresse.
L'un m'anime le cœur l'autre retient mon bras.
Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,
Ou de vivre en infâme,
Des deux côtés mon mal est infini ». (Scène VI Acte premier).
La seconde interprétation de l’amour est représentée par l’exemple de Phèdre de Jean Racine qui met en scène Phèdre, baissant les bras face à son sort, d’avoir aimé son beau fils Hyppolyte, appelle à la mort pour s’en sortir de son labyrinthe et avoue au roi :
«C’est moi qui sur ce fils chaste et respectueux
Osai jeter un œil profane, incestueux.
[…]
J’ai pris, j’ai fait couler dans mes brulantes veines
Un poison que Médée apporta dans Athènes ». (Acte V. Scène VII)
Les personnages, dans les œuvres de Racine, sont tous condamnés, passifs et ne réagissent plus pour pouvoir s’en sortir sauf face à la victoire de leur sentiment amoureux. Parallèlement à cette vision, toujours à la même époque, les personnages de Corneille affirment que l’amour est certes imbattable, mais le choix est attribué aux amoureux de prévoir leur avenir.
Les deux images semblent donner une vision forte de la force de l’amour qui chante victoire au premier coup de foudre. La réaction des personnages est cependant différente. La première propose à l’être d’user de son droit de choisir sa destinée. La seconde est tragique du moment où elle cède à une suite de fatalités. Les deux perspectives ont cependant le même regard envers l’invincibilité de l’amour. Nous pouvons citer à titre d’exemple un passage dans Phèdre, (Librairie Larousse, Paris, 1959), l’Acte premier représentant les deux aveux d’amour lorsqu’Hyppolyte apprend à Théramène qu’il va partir à la recherche du roi Thésée disparu. Il avoue une déclaration d’amour (scène II). La scène montre que même les hommes les plus révoltés se plient à ce sentiment indomptable.
« Moi qui, contre l’amour fièrement révolté,
Aux fers de ses captifs ai longtemps insulté ;
Qui des faibles mortels déplorant les naufrages,
Pensais toujours du bord contempler les orages ;
Asservi maintenant sous la commune loi,
Par quel trouble me vois-je emporté loin de moi !
Un moment a vaincu mon audace imprudente : cette âme si superbe est enfin dépendante ». (Acte II, Scène II, p.61)
L’amour vécu de nos jours entre l’homme et la femme subit le même sort qu’au temps des grecs dans la mesure où l’être humain est soumis entre deux conceptions de voir : agir ou subir. Quoi que le choix de l’une ou de l’autre perspective s’impose, l’amour s’installe de bon gré souvent sous son coup de foudre et se prononce inlassablement vainqueur.
* Faculté des lettres et des sciences humaines, Dhar El Mehraz-Fès (texte dédié à L. Haddad)