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L’ancien Premier
ministre guinéen, Kabiné Komara, a participé à une conférence au Forum de la paix en Normandie sur le thème “Les chemins de la paix : erreur et succès 2019”. Il a traité de la
problématique de la gestion de l’eau entre les pays, une ressource indispensable et un facteur potentiel de conflit entre les individus
et les nations.
Libé : Lors de votre intervention au Forum de la paix en Normandie, vous avez soulevé l’enjeu vital de l’eau dans les relations internationales. Vous avez présenté le cas de la crise entre l’Egypte et l’Ethiopie. Cela menace-t-il la paix dans cette région africaine ?
Kabiné Komara : La question se pose dans plusieurs régions du monde. Quand il y a un problème mal réglé dès le début, cela peut soulever des réactions. De plus, dans le bassin du Nil, c’est l’Angleterre qui a fait ce partage unilatéral de l’eau dans la région. Les pays de cette région ont été colonisés dans le passé et aujourd’hui certains ne se sentent pas concernés par le partage fait par les Britanniques à l’époque coloniale. C’est le Soudan qui a réagi le premier. L’Angleterre a donc modifié son partage en donnant davantage d’eau au Soudan, mais cela avait touché d’autres pays de la région en amont.
Après l’indépendance de ces pays, chacun a commencé à réclamer plus de quantité d’eau. Ils ont créé une organisation des pays du Bassin du Nil mais sans avoir intégré l’Egypte qui n’a pas accepté les changements au niveau des quantités d’eau distribuées entre ces pays. Cette situation a bloqué les décisions et les autres pays ont évolué sans l’Egypte. L’Ethiopie est en train de s’allier avec de nombreux pays. Il n’y a pas de solution pour le moment. De plus, les études montrent que, dans quelques années, les quantités actuelles d’eau ne vont pas couvrir 60% des besoins de ces pays. Il faudra donc coopérer.
Y a-t-il un danger de conflit dans la région du Bassin du Nil ?
Pour le moment, il y a beaucoup d’initiatives dans la région pour l’éviter. Le président égyptien est allé en Ouganda l’année dernière afin que ce pays joue le rôle de médiateur entre les pays du Bassin du Nil. Il y a d’autres initiatives comme celle de la Banque mondiale qui a fait des études. Des projets se mettent en place mais la solidarité fait défaut entre les pays du Bassin du Nil.
Vous avez dirigé l’organisation sous-régionale, l’OMVS, c’est-à-dire la mise en valeur du fleuve Sénégal qui regroupe la Guinée, le Mali, le Sénégal et la Mauritanie. C’est un exemple de coopération et de gestion des eaux transfrontalières. Est-ce un modèle aujourd’hui de la gestion transfrontière ?
Je peux dire que c’est le modèle idéal pour la gestion de l’eau au niveau transfrontalier, que j’ai eu l’honneur de présider pendant 4 ans.
Ces pays ont créé l’OMVS en 1972 pour gérer l’eau du fleuve. Grâce à cette organisation, le problème a été résolu. Le fleuve Sénégal fait 1800 km de long : il prend sa source en Guinée, traverse le Mali et la Mauritanie et son cours s’achève au Sénégal. Ces pays ont décidé que ce fleuve devienne international et que l’ensemble de ses ressources soient gérées par les quatre pays. Aucun ouvrage ne peut être construit sans l’accord de ces pays.
Vous avez beaucoup travaillé sur ce sujet. Comment voyez-vous l’avenir pour le partage de l’eau en Afrique d’une façon équitable vu la croissance démographique ?
C’est exactement là le problème pour le bassin frontalier. Il faut créer des organismes de gestion, dans chacun des bassins frontaliers. Il y en a environ 59 en Afrique. Il faut encourager le partage et la gestion commune de ces bassins.
Certains pays sont dans une situation de force, d’autres le sont moins, mais je ne crois pas qu’il y ait des conflits d’eau, mais seulement des tensions. Ces tensions ne peuvent être résolues que par la négociation. Mais le plus grave, est ce qui se passe à l’intérieur de certains pays : il y a des déplacements de population et des problèmes interethniques. Les hommes recherchent l’eau et des terres arables.
L’eau est à la fois une ressource indispensable et un facteur potentiel de conflit entre les individus et les nations. Les réserves d’eau douce sont inégalement distribuées. A l’horizon 2030, le changement climatique et les pressions démographiques seront susceptibles de renforcer ces tensions . Une collaboration accrue entre les Etats pour la préservation des ressources en eau est donc indispensable.
ministre guinéen, Kabiné Komara, a participé à une conférence au Forum de la paix en Normandie sur le thème “Les chemins de la paix : erreur et succès 2019”. Il a traité de la
problématique de la gestion de l’eau entre les pays, une ressource indispensable et un facteur potentiel de conflit entre les individus
et les nations.
Libé : Lors de votre intervention au Forum de la paix en Normandie, vous avez soulevé l’enjeu vital de l’eau dans les relations internationales. Vous avez présenté le cas de la crise entre l’Egypte et l’Ethiopie. Cela menace-t-il la paix dans cette région africaine ?
Kabiné Komara : La question se pose dans plusieurs régions du monde. Quand il y a un problème mal réglé dès le début, cela peut soulever des réactions. De plus, dans le bassin du Nil, c’est l’Angleterre qui a fait ce partage unilatéral de l’eau dans la région. Les pays de cette région ont été colonisés dans le passé et aujourd’hui certains ne se sentent pas concernés par le partage fait par les Britanniques à l’époque coloniale. C’est le Soudan qui a réagi le premier. L’Angleterre a donc modifié son partage en donnant davantage d’eau au Soudan, mais cela avait touché d’autres pays de la région en amont.
Après l’indépendance de ces pays, chacun a commencé à réclamer plus de quantité d’eau. Ils ont créé une organisation des pays du Bassin du Nil mais sans avoir intégré l’Egypte qui n’a pas accepté les changements au niveau des quantités d’eau distribuées entre ces pays. Cette situation a bloqué les décisions et les autres pays ont évolué sans l’Egypte. L’Ethiopie est en train de s’allier avec de nombreux pays. Il n’y a pas de solution pour le moment. De plus, les études montrent que, dans quelques années, les quantités actuelles d’eau ne vont pas couvrir 60% des besoins de ces pays. Il faudra donc coopérer.
Y a-t-il un danger de conflit dans la région du Bassin du Nil ?
Pour le moment, il y a beaucoup d’initiatives dans la région pour l’éviter. Le président égyptien est allé en Ouganda l’année dernière afin que ce pays joue le rôle de médiateur entre les pays du Bassin du Nil. Il y a d’autres initiatives comme celle de la Banque mondiale qui a fait des études. Des projets se mettent en place mais la solidarité fait défaut entre les pays du Bassin du Nil.
Vous avez dirigé l’organisation sous-régionale, l’OMVS, c’est-à-dire la mise en valeur du fleuve Sénégal qui regroupe la Guinée, le Mali, le Sénégal et la Mauritanie. C’est un exemple de coopération et de gestion des eaux transfrontalières. Est-ce un modèle aujourd’hui de la gestion transfrontière ?
Je peux dire que c’est le modèle idéal pour la gestion de l’eau au niveau transfrontalier, que j’ai eu l’honneur de présider pendant 4 ans.
Ces pays ont créé l’OMVS en 1972 pour gérer l’eau du fleuve. Grâce à cette organisation, le problème a été résolu. Le fleuve Sénégal fait 1800 km de long : il prend sa source en Guinée, traverse le Mali et la Mauritanie et son cours s’achève au Sénégal. Ces pays ont décidé que ce fleuve devienne international et que l’ensemble de ses ressources soient gérées par les quatre pays. Aucun ouvrage ne peut être construit sans l’accord de ces pays.
Vous avez beaucoup travaillé sur ce sujet. Comment voyez-vous l’avenir pour le partage de l’eau en Afrique d’une façon équitable vu la croissance démographique ?
C’est exactement là le problème pour le bassin frontalier. Il faut créer des organismes de gestion, dans chacun des bassins frontaliers. Il y en a environ 59 en Afrique. Il faut encourager le partage et la gestion commune de ces bassins.
Certains pays sont dans une situation de force, d’autres le sont moins, mais je ne crois pas qu’il y ait des conflits d’eau, mais seulement des tensions. Ces tensions ne peuvent être résolues que par la négociation. Mais le plus grave, est ce qui se passe à l’intérieur de certains pays : il y a des déplacements de population et des problèmes interethniques. Les hommes recherchent l’eau et des terres arables.
L’eau est à la fois une ressource indispensable et un facteur potentiel de conflit entre les individus et les nations. Les réserves d’eau douce sont inégalement distribuées. A l’horizon 2030, le changement climatique et les pressions démographiques seront susceptibles de renforcer ces tensions . Une collaboration accrue entre les Etats pour la préservation des ressources en eau est donc indispensable.