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Jusqu 'à quand le blocage des institutions en Irak ?


Libé
Jeudi 31 Mars 2022

Six mois après les législatives, les institutions irakiennes sont à l'arrêt: pour la troisième fois mercredi, les députés ont échoué à élire un président. Or de cette élection dépend la nomination du Premier ministre et le reste du calendrier politique. Et aucune sortie de crise n'est en vue.

A l'origine du blocage se trouvent les lignes de fracture qui traversent la "maison chiite", c'est-à-dire les différents courants politiques du chiisme, religion majoritaire en Irak.
L'incontournable leader chiite Moqtada Sadr affirme depuis le soir des législatives anticipées d'octobre 2021 que son courant a remporté le scrutin avec 73 députés élus, sur les 329 que compte le Parlement.

A la tête de la coalition "Sauvetage de la patrie", façonnée avec le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et des partis sunnites, Moqtada Sadr dit pouvoir rassembler 155 députés et s'imposer au Parlement.

Cette coalition soutient la candidature de Rebar Ahmed, du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), au poste de président, largement honorifique mais dont dépend la désignation du Premier ministre, nommé par la coalition la plus importante.

M. Sadr entend rompre avec la tradition du "gouvernement de consensus", système dans lequel tous les partis chiites se partagent le pouvoir, pour mettre en place un "gouvernement de majorité" et faire nommer son cousin et beau-frère Jaafar al-Sadr, actuel ambassadeur d'Irak à Londres, au poste de Premier ministre.

Son grand rival, le Cadre de coordination, est aussi chiite, mais il compte de nombreux tenants d'une ligne pro-Iran. Parmi eux se trouvent notamment la vitrine politique du Hach al-Chaabi, d'anciens paramilitaires intégrés aux forces régulières, et l'ex-Premier ministre Nouri al-Maliki. Le Cadre de coordination revendique environ 130 députés.

Ces élus ont boycotté les trois dernières séances du Parlement destinées à élire le président de la République, privant l'Assemblée du quorum requis des deux-tiers pour que le scrutin ait lieu. Par leur politique de la chaise vide, ils protestent contre le projet de Moqtada Sadr de constituer un "gouvernement majoritaire" duquel ils seraient exclus.

Après l'échec du vote de mercredi, Moqtada Sadr a de nouveau rejeté toute idée de "gouvernement de consensus" qui signerait, selon lui, "la mort" de l'Irak.

Le Parlement n'a pas fixé de nouvelle date pour une quatrième tentative, ce qui "indique qu'il n'y a aucune perspective de résolution de crise (...). Il n'y a pas de rapprochement entre l'alliance (de Moqtada Sadr) et le Cadre de coordination", estime le politologue irakien Ihsan al-Shammari.

Autrement dit, le blocage peut encore durer plusieurs mois. En attendant, le président actuel, Barham Saleh, candidat à sa succession, et le Premier ministre, Moustafa al-Kazimi, continuer à expédier les affaires courantes.
 
 "A moins qu'il y ait une menace extérieure, comme celle de l'organisation Etat islamique en 2014, qui poussent les responsables politiques à s'unir et à se mettre rapidement d'accord, ils vont continuer tant qu'il le faudra pour obtenir ce qu'ils veulent. Même si c'est en dépassant les délais constitutionnels", avance le politologue Hamza Haddad.

Le président doit être élu dans les 30 jours suivant la première séance du nouveau Parlement, qui a eu lieu le 9 janvier. La date limite étant largement dépassée, "nous sommes face à une violation de la Constitution", relève le juriste Ahmed al-Soufi.

La Cour fédérale, plus haute instance judiciaire du pays, a ensuite fixé au 6 avril le délai pour élire le président. Mais les juges ne peuvent donner que leur avis et non prendre l'initiative politique. La Cour, insiste M. Soufi, "n'a d'autre autorité que de constater la violation de la Constitution".

La clef de la sortie de crise n'est donc pas dans les mains de la loi, mais de la politique.
Le Parlement pourrait s'auto-dissoudre et de nouvelles élections législatives seraient convoquées. Pour ce faire, au moins un tiers des députés doivent se saisir et présenter le projet à leurs pairs qui doivent l'approuver par la majorité plus une voix.

Mais Hamza Haddad juge cette option assez peu probable, "car il n'y a pas de volonté politique". "Et comme l'a montré la participation au cours des deux dernières élections législatives, l'appétit des Irakiens pour aller voter est très faible".


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