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Hôpital Sidi Mohammed Ben Abdallah d’Essaouira : Le service des maladies mentales perd la boule


Abdelali khallad
Vendredi 20 Mars 2009

Depuis un an et demi, la province d’Essaouira a été dotée d’un service des maladies mentales au sein de l’hôpital Sidi Mohammed Ben Abdallâh.
Une structure hospitalière qui a toujours fait défaut à cette province qui compte quatre cent mille habitants. Avant, les malades mentaux étaient obligés de se déplacer vers d’autres villes pour être admis dans des structures spécialisées, avec toutes les charges financières que cela implique.
Le service des maladies mentales  qui est régi par le Dahir de 1959 relatif à la protection et au traitement des malades mentaux, se compose de deux pavillons avec une capacité d’accueil de 40 malades.
Le placement des malades composés essentiellement de vagabonds, de sans domicile fixe, et de malades en voyage pathologique, se fait de façon libre suite à la demande du patient ou de sa famille, ou de façon officielle par  réquisition de la police en ville, ou du caïd dans le milieu rural, ou du procureur du Roi suite au comportement dangereux du patient estimé représenter un danger public.
A cet effet, le service des maladies mentales assure une fonction thérapeutique et privative de liberté à la fois. Cette grande responsabilité qui repose sur le staff médical nécessite évidemment des moyens humains, financiers et matériels dans les normes pour pouvoir faire aboutir les projets thérapeutiques des patients. 
 Certes, la création de ce service  représente un grand acquis pour les infrastructures sanitaires de la province d’Essaouira, cela ne doit en aucun cas justifier les anomalies qui entravent son bon fonctionnement. Des problèmes en masse  font le lot quotidien du staff médical et des patients  dont  les vies restent exposées à des dangers permanents.
Un médecin femme et douze infirmiers, c’est le nombre total du staff médical du service à Essaouira, un nombre insignifiant et insuffisant pour faire fonctionner les deux pavillons du service. De ce fait, le pavillon des femmes reste toujours fermé faute de ressources humaines ; cependant, le médecin est obligé d’assurer simultanément les soins et les consultations aux patients au sein du service et de l’unité ambulatoire des maladies mentales sise  au centre de santé Al Bannay.
Les caractéristiques et les composantes du bâtiment constituent un grand handicap pour le bon fonctionnement du service. Rien ne laisse présager que cette structure a été  réalisée pour assurer l’hospitalisation des malades mentaux, à commencer par les façades vitrées des locaux qui constituent un vrai danger pour la vie des malades qui peuvent se faire  mal à tout moment de surexcitation, puis la hauteur du mur qui ne dépasse pas deux mètres, contrairement aux normes exigeant un minimum de trois mètres. De ce fait, un malade mental affaibli par le traitement et les calmants peut se faire massacrer facilement en faisant le mur de l’hôpital. Pire, les interrupteurs  se trouvent à l’intérieur même des dortoirs des malades, un constat intolérable et contradictoire avec le principe de centralisation des interrupteurs au sein des services et hôpitaux prenant en charge cette catégorie. Les fenêtres des dortoirs ne sont pas protégées par des barreaux.  Cela constitue un autre facteur d’insécurité qui fait le lot quotidien des patients et du staff médical du service.
Contrairement aux structures similaires, le service des maladies mentales ne dispose pas d’une cour où les malades peuvent se défouler et s’exprimer librement. Résultat: le staff médical n’a pas l’occasion de soumettre les patients à l’observation pour mieux évaluer l’évolution de leurs états de santé. D’autre part, le service ne dispose que d’un seul isoloir, le corps soignant se trouve à chaque cas d’hospitalisation dans une situation très critique, car tout patient excité doit être placé le premier jour dans un isoloir pour lui donner le temps de se calmer tout en évitant de  mettre en péril  les vies des autres patients.
 Certes, la qualité des repas est dans les normes, mais la quantité reste insuffisante. Pourtant,  la plupart des patients ne reçoivent pas de visites familiales, chose qui les rend dépendants à 100% de la cuisine du service qui doit faire plus d’efforts pour subvenir aux besoins alimentaires des patients qui avalent une quantité considérable  de calmants et stimulants. 
Vient le côté le plus tragique de cette situation insoutenable : le problème de pénurie des médicaments qui continuera à ternir l’image de nos hôpitaux toutes spécialités confondues. Certaines spécialités ne supportent pas le moindre retard ou rupture brutale, telles la pneumopathie et les maladies mentales et psychologiques. Toute rupture du traitement conduit directement à la dégradation de l’état de santé psychique du patient dont le projet thérapeutique repose surtout sur la régularité du traitement et des soins durant et après le stade d’hospitalisation. L’incident survenu le mois dernier au sein de l’unité ambulatoire des maladies mentales Al Bannay en est l’illustration. Un malheureux schizophrène qui n’a pas reçu sa dose de traitement à cause d’une sérieuse pénurie de médicaments, a semé une vraie pagaille dans le bureau de l’infirmière qui, paniquée,  a pris la fuite.
Pour plusieurs observateurs, ces irrégularités ne sont que le résultat de la stratégie adoptée par le ministère de la Santé qui a décidé d’intégrer les services des maladies mentales dans les hôpitaux classés Segma pour se débarrasser du fardeau des budgets alloués aux  hôpitaux des maladies mentales sous prétexte de mettre fin à la stigmatisation des malades mentaux. Une stratégie qui a allégé la pression sur le budget général du ministère, tout en mettant les charges de fonctionnement des services sur le compte des hôpitaux. Mais cette situation arbitraire ne peut justifier en aucun cas le déficit  des services qui assurent un service médical, humanitaire, social, voire sécuritaire. L’accès  aux soins est l’un des droits les plus élémentaires qu’une société digne se doit d’assurer à ces citoyens. A cet égard, l’Etat doit assumer toute sa responsabilité envers ces malades en perte d’équilibre mental et psychique.


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