Hassan Hammouche: Le théâtre est une machine productive qui contribue au développement


​Cette année, le monde a célébré le 27 mars la Journée mondiale du théâtre, toujours dans le contexte de la pandémie de la Covid-19 qui a eu des répercussions sur le secteur des arts, y compris le théâtre Dans cet entretien, le président de la Fédération marocaine des troupes de théâtre professionnelles, Hassan Hammouche, répond à quelques questions de la MAP sur l'état du secteur du théâtre dans le Royaume, notamment à l'aune de la pandémie et après la disparition d' un grand nombre de ses pionniers au cours de l'année dernière, passe en revue la présence du théâtre marocain sur la scène arabe et dévoile les recommandations de l'instance qu 'il préside pour promouvoir cet art au Maroc.

Libé
Mardi 30 Mars 2021

Cette année, le monde célèbre la Journée mondiale du théâtre en pleine pandémie. Comment évaluez-vous l'impact de celle-ci sur le secteur dans le Royaume et le soutien annoncé par le ministère de tutelle à cet égard ?

La Journée mondiale du théâtre intervient cette année au moment où le théâtre marocain est "dans un état de stagnation et d'asthénie au niveau de la production et de la promotion". La pandémie, qui a frappé de plein fouet de nombreux secteurs, a fortement affecté le secteur du théâtre, qui est déjà fragile, de par les effets psychologiques et sociaux que ses professionnels subissent, notamment ceux qui n'ont d'autre revenu que ce qu'ils gagnent du secteur artistique en général et théâtral en particulier. En dépit du fait que le ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports ait annoncé une aide exceptionnelle, cela n'a pas atteint les objectifs escomptés.

Le théâtre marocain a perdu nombre de ses pionniers au cours de l'année dernière, à l'instar de Touria Jabrane, Abdeljabbar Louzir, Hassan Lamniï ou encore Ahmed Baddouj. Qu'a perdu le théâtre après la disparition de tous ces vétérans ? Et quel intérêt peut-on tirer de leurs œuvres ?

Toute disparition est absolument une perte, surtout quand il s'agit de noms qui ont marqué de leur empreinte le mouvement théâtral et qui sont devenus des icônes. Maintenant, il faut penser sérieusement à tirer profit des œuvres laissées par les pionniers et en faire bénéficier les générations futures. C'est le passé qui enrichit le présent et bâtit le futur. Le théâtre en particulier et les arts et la littérature en général, ne peuvent exister sans passé, sans histoire ni mémoire. Tous les noms qui nous ont quittés font partie de l’histoire et de la mémoire de notre culture et de notre patrimoine théâtral créatif.

Toujours dans le même sillage, peut-on aujourd'hui parler d'une jeunesse capable de porter le flambeau, notamment en termes de formation ou de capacité à offrir de bonnes performances qui confirmeraient que le théâtre marocain se porte bien ?
On peut être d'accord sur les grands problèmes rencontrés par le secteur du théâtre, et qui sont principalement liés aux lois réglementaires, que ce soit la loi sur le statut de l'artiste, sur la structuration des troupes théâtrales "professionnelles", des établissements dédiés aux spectacles (théâtres et salles), ou encore l'aide et ses problématiques liées aux objectifs et aux mécanismes procéduraux. Mais nous convenons également que le Maroc dispose désormais de compétences institutionnelles (troupes de théâtre) et de créateurs avec la capacité, non seulement de porter le flambeau, mais de rendre la présence du théâtre marocain forte au niveau régional et international. Peut-être, l'une des caractéristiques les plus importantes des nouvelles générations est qu'elles ont créé un champ théâtral diversifié, marqué par la diversité de ses expériences et de leurs auteurs, ce qui rend le théâtre marocain fort en termes de recherches thématiques liées aux convictions intellectuelles et de recherche esthétique qui établit une relation entre la forme et le contenu.

Quid de la présence du théâtre marocain sur la scène arabe ?
Parler du théâtre marocain et de sa présence sur la scène arabe nous amène à évoquer un point fondamental, à savoir que ceux qui suivent ces dernières années le plus grand événement théâtral organisé par l'Institut arabe du Théâtre (ATI), en l’occurrence le Festival arabe du théâtre, notent la présence forte et distinguée du théâtre marocain, notamment au niveau de la créativité. Il convient également de mentionner que, dans ce cadre, le Maroc a remporté le Grand Prix de ce festival pendant deux années consécutives. Il s'agit des pièces de théâtre "Kharif" (automne) en 2017, réalisée par Asmae Houri et interprétée par la troupe "Anfass", et "Solo" (seul) en 2018, mise en scène par Mohamed El Hor et interprétée par la troupe Akoun. En outre, il est aussi important de noter que le Maroc a été pionnier dans le domaine de la recherche théâtrale au cours des quatre dernières années.

Quelles sont les principales propositions de la Fédération marocaine des Troupes de Théâtre professionnelles pour promouvoir le théâtre dans le Royaume ?
Depuis sa création en 2012, la fédération n'a pas manqué de chercher à contribuer à la structuration et à l'organisation du secteur théâtral, pour développer une véritable industrie théâtrale avec toutes ses composantes intellectuelles, créatives et même économiques. Le théâtre est une machine productive qui contribue au développement, y compris ce qui est lié à l'aspect humain et aux aspects matériels.

De ce point de vue, nous avons toujours fait des propositions pratiques en fonction des décisions issues de nos conférences et de nos conseils centraux et de tout ce qui est débattu au sein du bureau national et des sections régionales. Parmi les questions les plus importantes que nous avons débattues et que nous discutons toujours, il y a celle de l’évaluation rationnelle du soutien théâtral depuis 1998 jusqu'à maintenant, afin de pouvoir en tirer des conclusions susceptibles de nous permettre de développer une feuille de route claire, ainsi que celle de la révision structurelle du cahier des charges en termes de sa structure juridique et de son contenu.

La Fédération appelle également à l'établissement d'un agenda pour la saison théâtrale, car il s'agit d'un contrat entre les troupes et ceux impliqués dans leurs projets artistiques, ainsi que les organismes de soutien et le public. En outre, nous mettons l'accent sur l'impératif de réhabiliter les espaces théâtraux pour devenir des espaces appropriés, productifs et accueillants pour la représentation théâtrale.
 


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