Développements diplomatiques positifs mais mitigés
Cet échange qui a duré une trentaine de minutes, vient esquisser un début de règlement de ladite crise et un retour à la normale. Les deux chefs d’Etat «ont annoncé mercredi des «engagements» pour rétablir une confiance durement éprouvée», rapporte l’Agence française de presse (AFP).
Il est à rappeler que la crise en question a été qualifiée par les observateurs et experts des relations internationales de crise diplomatique la plus grave entre les EtatsUnis et la France depuis la position française hostile à la guerre d’Irak en 2003.
Lors d’un point de presse, le porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, a indiqué que la conversation était «amicale» et que Joe Biden «espérait» que cet entretien marquerait «une étape vers un retour à la normale» entre les deux alliés. Il sera, d’ailleurs, suivi à New York, où se tient l’Assemblée générale annuelle de l’ONU, d’un tête-à-tête entre les ministres des Affaires étrangères français et américain, Jean-Yves Le Drian et Antony Blinken, a annoncé une responsable américaine. Les deux dirigeants, Joe Biden et Emmanuel Macron, quant à eux, ont décidé de se retrouver «à la fin du mois d’octobre» en Europe en marge des travaux du G20 qui se tiendront à Rome les 30 et 31, puis à la COP26 qui aura lieu, début novembre à Glasgow, en Ecosse. En attendant, ils lanceront «un processus de consultations approfondies visant à mettre en place les conditions garantissant la confiance».
A cet effet, le président Emmanuel Macron a décidé que l’ambassadeur de France aux Etats-Unis d’Amérique, «rappelé pour consultations» à l’issue du déclenchement de la crise, Philippe Etienne, retournerait à Washington «la semaine prochaine».
«Les messages sont bons», avec la reconnaissance qu’il aurait fallu «mieux communiquer», a estimé, dans un commentaire de ces derniers développements, le directeur pour l’Europe du cercle de réflexion Atlantic Council, Benjamin Haddad. «Les Américains ont compris que le choc principal à Paris ne venait pas tant de l’aspect commercial que de la rupture de confiance», a-t-il souligné.
Là-dessus, tranchant avec le ton très virulent des déclarations françaises de ces derniers jours, le communiqué commun précise d’une manière très mesurée que «l’engagement de la France et de l’Union européenne dans la région indo-pacifique revêt une importance stratégique». Dans ce même ordre d‘idées, Joe Biden a également jugé «nécessaire que la défense européenne soit plus forte et plus performante «pour contribuer à la sécurité transatlantique et compléter «le rôle de l’OTAN», un sujet marqué, dans le passé, par une certaine ambivalence de l’attitude des Etats-Unis alors qu’il est une priorité française.
D’autre part, la crise a suscité un débat intense en France et dans d’autres pays de l’Union européenne, sur la nécessité géostratégique d’évoluer vers une plus grande souveraineté européenne en matière de défense pour parvenir à s’affranchir du parapluie américain.
A ce propos, précisément, le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, a estimé que la crise des sous-marins avait montré que l’Union européenne ne pouvait «plus compter» sur les Etats-Unis pour garantir sa protection ».
«La première leçon qu’il faut tirer de cet épisode, c’est que l’Union européenne doit construire son indépendance stratégique. L’épisode afghan et l’épisode des sous-marins montrent que nous ne pouvons plus compter sur les Etats-Unis d’Amérique pour garantir notre protection stratégique», a-t-il déclaré à France Info.
«Les Etats-Unis n’ont plus qu’une seule préoccupation stratégique, la Chine, et contenir la montée en puissance de la Chine». Autant l’ancien président Donald Trump que l’actuel Joe Biden «estiment que leurs alliés (…) doivent être dociles. Nous, nous estimons que nous devons être indépendants», a martelé Bruno Le Maire.
Il faut que nos partenaires européens ouvrent les yeux», a-t-il ajouté, faisant allusion au soutien apporté par le Danemark aux Etats-Unis, à contre-courant des critiques exprimées par les différents responsables européens à la suite de la décision australienne de rompre le contrat passé avec le français Naval Group, au profit d’un partenariat avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
Par ailleurs, les dirigeants de l’Union européenne ont été quasiunanimes à déplorer, avec virulence, le traitement «inacceptable» de la France et «un manque de loyauté».
En effet, lors d’une réunion à «huis clos», les ministres des Affaires étrangères des 27 pays membres de l’Union européenne ont apporté leur «soutien» et «clairement leur solidarité à l’égard de la France», d’après le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.
Rachid Meftah