Entretien avec l’écrivaine marocaine Meriem Bekkali : «Le roman épistolaire reflète un moment mystérieux»


Propos recueillis par Mohamed El Bouazzaoui
Lundi 22 Août 2011

Entretien avec l’écrivaine marocaine Meriem Bekkali : «Le roman épistolaire reflète un moment mystérieux»
Titulaire d’un doctorat en langue et littérature françaises et d’une licence en droit  public, Meriem Bekkali est une intellectuelle polydisciplinaire. Elle s’investit de manière rigoureuse l’écriture littéraire, mais elle est aussi artiste peintre. Son premier ouvrage critique s’intitule «Le  transit mémorial dans -Un Eté à Stockholm- de Khatibi». Elle a publié également un recueil et un roman qui portent respectivement  comme  titres " Conversation de l'ombre et du soleil" et «Solitude de la lettre». A présent, elle est commissaire judiciaire divisionnaire au tribunal administratif de Fès et elle peint également à ses moments d'inspiration. Entretien.
 
Libé : Comment êtes-vous venue à l’écriture?

Meriem Bekkali : L’écriture est un moment des plus mystérieux. Le plus souvent, elle est une sorte de réaction à un vécu particulier. J’ai commencé à réagir avec l’écriture depuis l’âge de seize ans. Ainsi, j’ai écrit respectivement en arabe et en français des poèmes, nouvelles et pensées. J’ai suivi mes études en langue et littérature françaises et j’ai aimé et continue d’aimer la critique littéraire. La littérature épique que mon défunt père m’a fait découvrir quand j’étais encore enfant à travers les «Sira » du roi SayfIbnu Di Yazan, de Antara, d’Abu Zayd al Hilali, entre autres, qu’il nous contait oralement,  m’a beaucoup marquée et ses personnages fantastiques m’ont longuement bercée.

Pourquoi le choix de la langue française ? Ne seriez-vous pas tentée d’écrire en arabe ?

Cela est dû,  sûrement,  à mes études en langue et littérature françaises. Mais, j’écris aussi en langue arabe qui est pour moi la langue de la poésie par excellence.

Pourriez-vous nous dire sur quoi  porte votre essai sur Khatibi ?

Par cette absence de contrat entre le narrateur et le lecteur, on comprend la réaction de Khatibi contre ce lieu commun qui fait du récit un lieu d’admiration. Pour savoir comment l’auteur suspend l’attention de son lecteur comme l’y invite le roman, nous avons étudié comment s’opère le changement des séquences et des paragraphes…

Vous avez commencé par la poésie avant de vous essayer au roman. Laquelle des deux expériences vous a le plus marquée ?

Chaque expérience a une spécificité particulière. L’une n’empiète pas sûrement sur l’autre. Elles interagissent cependant entre elles. Le poème peut relater à sa façon une histoire et un roman peut contenir des poèmes ou être poétique par moments.

«Solitude de la lettre» est un roman épistolaire. Pourquoi avez-vous opté pour ce choix scriptural?

Il s’est imposé plutôt à moi. Ce genre d’écriture reflète un moment mystérieux. C’est un cas de force majeure. Je crois que l’épistolaire permet de prolonger la réflexion, la méditation et d’approfondir le questionnement sur soi et sur l’Autre. Il s’agit d’une polyphonie libérée.

Qui a le plus d’attrait sur vous, est-ce  l’écriture ou la peinture ?

L’écriture a bien évidemment le plus d’attrait sur moi. Dans la peinture (comme d’ailleurs le plus souvent dans l’écriture), je me trouve rarement en train de dessiner, poussée par une force bizarre pour découvrir en fin de compte que j’ai extériorisé une partie étrange de moi-même comme ce visage qui reflète refus, timidité et tristesse. Des images/tableaux qui s’offrent parfois à moi m’ont poussée à vouloir absolument les visualiser. Cette situation m’a motivée pour suivre des cours de peinture et acquérir les techniques nécessaires..

Quel regard portez –vous sur l’écriture féminine au Maroc ?

Un regard d’admiration. L’écriture féminine marocaine est riche et engagée. Je veux dire qu’il y a beaucoup de courage dans les écrits féminins.  Les femmes écrivaines marocaines sont loin de s’abstenir sur de nombreux points touchant leurs conditions et leur futurs, elles expriment au contraire librement leurs désirs et pensées et militent ainsi pour dépasser leurs vécus douloureux et imposer leur  façon d’être. Je fais allusion à Badia Hadj Nasser, Leila Houari et Farida El Hany Mourad entre autres.

Par quoi meublez-vous votre temps en ce mois sacré?

Je suis partagée entre le travail, les tâches ménagères et la lecture, outre l’atmosphère spirituelle à laquelle se livre tout croyant en ce mois sacré.

Et vos  dernières lectures ?

« L’idiot » de Dostoïevski, «Le pouvoir des commandes mentales » de Theron Q. Dumont, des poèmes de Nadine Grelet et d’Ahmed El Inani.

Des productions en perspective?

Oui,  à présent je travaille de front sur deux recueils : l’un en arabe, l’autre en français.


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