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En Libye, une population déconcertée par une interminable transition


Libé
Mardi 14 Décembre 2021

La Libye va-t-elle enfin achever son interminable transition après une décennie de chaos? Rien n'est moins sûr pour de nombreux Libyens, déconcertés par un processus politique qui bat de l'aile et une présidentielle de plus en plus hypothétique. "Je ne suis pas très optimiste. Il y a beaucoup de divergences et rivalités entre régions et il n'est pas sûr que les résultats soient acceptés", déclare à l'AFP Khaled Al-Turki, 25 ans, avec en arrière-plan le port de Tripoli et la Méditerranée. "S'il y avait eu un candidat capable de rassembler, nous aurions été optimistes. Mais ce n'est pas le cas", indique cet employé du bureau local d'une organisation internationale. En février 2011, dans le sillage du Printemps arabe et grâce à l'appui de l'Otan, les Libyens ont lancé une révolte qui a renversé Mouammar Kadhafi, le "Guide" qui dirigeait le pays depuis 1969. Mais depuis la fin de la révolte avec la mort de Mouammar Kadhafi tué par des rebelles en octobre 2011, la Libye est minée par les rivalités entre les principales régions, le poids des milices et les ingérences étrangères, aux dépens d'une population exsangue malgré les immenses ressources énergétiques du pays. "La sécurité doit être la priorité. Aucun objectif ne pourra être atteint sans sécurité", estime Khaled Al-Turki. Son collègue Adam ben Fayed est du même avis: "La priorité doit être la sécurité, mais pour cela, il faudrait que la parole du (futur) président soit entendue par tous les Libyens". S'il "espère que les problèmes tels que les coupures d'électricité, le manque de liquidités et les infrastructures seront réglés", ce Tripolitain de 25 ans estime qu'"aucun candidat ne fait l'unanimité" . Censée ouvrir une nouvelle page, l'élection présidentielle prévue le 24 décembre est entourée d'incertitudes avec la persistance des désaccords entre camps rivaux et des tensions. Et les candidats les plus en vue sont clivants. Une décennie de conflit a épuisé les Libyens. La valeur de la monnaie locale, le dinar, a fortement baissé, les prix de l'immobilier ont flambé, les coupures d'électricité sont devenues chroniques. D'interminables files d'attente s'étirent devant les guichets bancaires, des dizaines d'automobilistes patientent des heures devant les stations d'essence. Le long de la corniche de Tripoli, les ossatures rouillées des grues trônent sur les carcasses de plusieurs bâtiments inachevés, envahis par les herbes folles, témoins d'une économie à l'arrêt. "Nous voulons un président qui se soucie des pauvres (...), capable d'unifier le pays", lance Khalifa Ramadan Al-Nakoua, un retraité croisé à Tripoli. "Nous espérons que l'électricité ne sera plus coupée car nous sommes un pays pétrolier." Le secteur névralgique de l'énergie, qui du temps de Mouammar Kadhafi permettait de financer une sorte d'Etat providence, a pâti du conflit: pétrole dilapidé, infrastructures endommagées ou non entretenues, blocus... "Le sort des élections demeure inconnu", observe Abdessalam al-Mabrouk, un fonctionnaire de 47 ans au ministère de l'Economie, épaisse barbe poivre et sel. Les mêmes doutes sont partagés à Benghazi, la grande ville de la Cyrénaïque située à quelque 1.000 kilomètres à l'est de la capitale. Berceau de la révolution, cette ville a subi de plein fouet les violences qui ont suivi, vivant au rythme des attentats, combats et assassinats. Dans la vieille ville, des murs criblés de balles et des bâtiments défigurés rappellent que la guerre est passée par là. Zakaria Mahjoub, 32 ans, officier d'état civil à Benghazi, critique les candidats à la présidentielle: le Premier ministre par intérim Abdelhamid Dbeibah "n'a pas tenu sa promesse d'unir les Libyens et se présente maintenant à la présidentielle" alors qu'il s'était engagé à ne pas le faire. "Les autres candidats ont, soit participé à gâcher la fête, soit sont très controversés". Et d'ajouter: "Si ces élections se tiennent à la date prévue, ce que je ne crois pas, les camps rivaux accepteront-ils les résultats ou retournerons-nous à la case départ, aux divisions et aux combats?".


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