Emploi et pouvoir d'achat. Les parents pauvres du PLF 2025

Comme réponse aux revendications sociales, ce serait plutôt jouer avec le feu


Hassan Bentaleb
Lundi 21 Octobre 2024

Emploi et pouvoir d'achat. Les parents pauvres du PLF 2025
« Révision du barème progressif de l’IR, réduction d’impôt pour charges familiales, exonération des indemnités de stage, amélioration de l’IR pour les revenus fonciers, réforme des retraites complémentaires… », telles sont les principales mesures fiscales proposées par la note de présentation du projet de loi de Finances 2025 (PLF 2025).
 
Prévisions
 
Ainsi en matière d’impôt sur le revenu (IR), ladite note propose le relèvement de la première tranche du barème relative au revenu net exonéré de 30.000 dirhams à 40.000 dirhams, ce qui va permettre d’exonérer tous les revenus salariaux inférieurs à 6.000 dirhams par mois ainsi que de réduire les taux d’imposition de 1 à 3% sur les autres tranches.

Concernant la réduction d’impôt pour charges familiales, le montant annuel passe de 360 à 500 dirhams par personne à charge, avec un plafond relevé à 3.000 dirhams. Idem pour les exonérations des indemnités de stage qui vont s’étendre à tous les stagiaires pour une période de 12 mois. Si le stagiaire est embauché en CDI, une exonération de 12 mois sur les salaires plafonnés à 10.000 dirhams est proposée. 

S’agissant de l’amélioration de l’IR pour les revenus fonciers, les contribuables pourront opter pour un taux d’imposition libératoire de 20% au lieu du taux progressif. Il y aura également la création d’une nouvelle catégorie de revenus imposables. Cette catégorie inclura les revenus inexpliqués, les gains de jeux et autres revenus non catégorisés.
Quant à la réforme des retraites complémentaires, l’exonération des retraites complémentaires nécessitera un contrat d’au moins 8 ans, sauf en cas de décès ou d’invalidité.

En outre, ladite note prévoit une clarification sur l’imposition des profits fonciers lors d’expropriations en instaurant une retenue à la source proposée sur les indemnités d’expropriation. Elle prévoit également une exonération temporaire de la TVA  sur l’importation de certains animaux vivants et produits agricoles en 2025 pour soutenir les prix alimentaires.

Parmi les mesures prévues, il faut s’attendre à une augmentation de la part de la TVA allouée aux collectivités territoriales. Cette part passera de 30 à 32%. Il y aura également l’inclusion des sociétés en participation et Groupement d’intérêt économique (GIE) dans le champ de l'impôt sur les sociétés (IS).  Les sociétés en participation de plus de 5 associés et les GIE seront soumis à l’IS.
 
Pression
 
Pourtant, nombreux sont les observateurs qui constatent que le PLF 2025 ne contient aucune mesure concrète pour endiguer la flambée des prix à la consommation, alors que cette hausse continue à affecter les ménages, particulièrement les plus vulnérables, sans qu'aucune solution structurelle ne soit proposée. Pour eux, le gouvernement semble davantage focalisé sur la réduction du déficit budgétaire, qu'il souhaite ramener à environ 4,5% du PIB, plutôt que sur la protection du pouvoir d'achat des citoyens.

«Cette réduction devrait s'opérer à travers une «meilleure gestion des dépenses publiques» et une «révision des subventions», des termes qui peuvent sembler prometteurs mais qui cachent une réalité bien différente», nous a indiqué un économiste. Et de poursuivre : «En effet, lorsque le gouvernement parle de rationalisation des dépenses, il est peu probable que cela concerne une véritable optimisation des coûts dans les ministères ou les administrations publiques. Au contraire, les coupes budgétaires s'annoncent principalement dans les secteurs sociaux, ceux-là mêmes qui affectent directement la vie quotidienne des citoyens, comme la santé, l'éducation, et les aides sociales. Ces secteurs, déjà sous pression, risquent de subir de nouvelles restrictions, aggravant ainsi les inégalités sociales et économiques dans le pays ».
 
Austérité
 
Un autre économiste nous a expliqué qu’en adoptant cette approche, « le gouvernement montre clairement qu’il poursuit une politique conforme aux recommandations du Fonds monétaire international (FMI), dont les priorités sont souvent orientées vers la réduction du déficit et l’équilibre macroéconomique, plutôt que vers le bien-être social ».

«Cette soumission aux préceptes du FMI se manifeste notamment par les mesures d'austérité, bien connues pour peser davantage sur les couches sociales les plus fragiles», explique-t-il. Et de préciser : «L’un des éléments phares de cette austérité réside dans la révision des subventions. Il est prévu que les subventions sur les matières premières, comme le gaz, le sucre et la farine, soient progressivement supprimées ou fortement réduites. Ces produits de base, essentiels pour les ménages à faibles revenus, verront leurs prix grimper encore davantage, rendant leur accès plus difficile. La suppression des subventions sur le gaz, par exemple, aura des répercussions directes sur les dépenses énergétiques des familles, déjà confrontées à la hausse des coûts de l'électricité et des carburants. Le sucre et la farine, des ingrédients essentiels dans l’alimentation quotidienne, connaîtront probablement le même sort, entraînant une inflation des prix des produits alimentaires de base ».
 
Précarité
 
Selon toujours ce même interlocuteur, « ces décisions révèlent une vision économique où la réduction du déficit prend le pas sur les impératifs sociaux ». « Certes, la gestion des finances publiques est un enjeu crucial, mais elle ne doit pas se faire au détriment de la population, en particulier des plus démunis. Ce modèle de politique économique, axé sur des coupes dans les subventions et les dépenses sociales, ne fera qu’accentuer la précarité des populations déjà fragilisées par les crises économiques et sociales » indique-t-il. 

Pour plusieurs experts, la stratégie gouvernementale, alignée sur les recommandations du FMI, pourrait certes améliorer les indicateurs macroéconomiques à court terme, mais à quel prix? Selon eux, «les réformes proposées, loin de répondre aux besoins urgents des citoyens, risquent de creuser encore plus le fossé entre les riches et les pauvres, accentuant les tensions sociales. Une véritable politique de relance économique devrait prendre en compte non seulement l’équilibre budgétaire, mais aussi la protection des classes moyennes et défavorisées, afin de construire une société plus équitable ».

Hassan Bentaleb


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