Durcir le cadre légal d’un chantier national mais aussi international

Colloque national sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme


Rachid Meftah
Jeudi 16 Décembre 2021

Lors d’un colloque national organisé à Rabat par l’Autorité nationale du renseignement financier (ANRF) autour du thème : «Les enquêtes financières parallèles sur les délits de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme à la lumière de la loi n° 12-18», le président de ladite instance, Jawhar Nfissi, a souligné que l’efficacité de toute politique de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est tributaire de la capacité des autorités et des structures compétentes à priver les criminels des revenus provenant de leurs crimes.

Le président de l’ANRF a déclaré, à ce sujet, que la réalisation de cet objectif exige de traquer et d’identifier les fonds et les avoirs des criminels et de prendre les mesures nécessaires pour les saisir ou les confisquer, mesures qui devront mener à activer la procédure parallèle d’enquête financière et à appliquer les obligations légales liées à la saisie, au gel et à la confiscation, de manière à empêcher la disparition de  ces fonds et avoirs et leur intégration dans le circuit économique légal, a-t-il précisé.

M. Nfissi a indiqué, par ailleurs, que la création des brigades régionales de la police judiciaire, chargées de mener des investigations sur les délits financiers, a contribué effectivement et de manière fort significative au développement des enquêtes financières parallèles, ainsi qu’au traçage, à la saisie et à la confiscation des fonds résultant de ces délits, faisant observer que l’élargissement des compétences des tribunaux de première instance de Casablanca, de Fès et de Marrakech ainsi que du tribunal de première instance de Rabat, pour inclure les crimes liés au blanchiment des capitaux est de nature à permettre d’atteindre l’efficacité requise pour traiter ces affaires dans les limites de délais raisonnables.

A cet égard, Jawhar Nfissi a, en outre, relevé que les organismes des renseignements financiers, de même que les autorités judiciaires et les services de sécurité, constituent une source riche et précieuse d’informations qui favoriseraient l’action des structures compétentes et les aideraient à mener à bien leurs enquêtes, rappelant à cet effet le rôle important joué par l’Autorité nationale du renseignement financier en usant de la base de données, d’ores et déjà, disponible pouvant aider à fluidifier la collecte de preuves à l’occasion des enquêtes diligentées sur le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
Jawhar Nfissi
L’efficacité de toute politique de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est tributaire de la capacité des autorités et des structures compétentes à priver les criminels des revenus provenant de leurs crimes
Là-dessus, «la coopération entre l’Autorité et les agences chargées des investigations et des enquêtes est l’une des exigences de base du Groupe d’action financière international (GAFI), citées notamment dans les recommandations 30 et 31 qui mettent l’accent sur le processus d’évaluation et de suivi», rappelle-t-il.

Et de développer que la nature de ces crimes perpétrés, nécessite de la part des autorités, en charge des enquêtes, une bonne maîtrise des techniques et des méthodes de blanchiment de capitaux et de financement des opérations terroristes, des transactions bancaires complexes et des transferts transcontinentaux mettant en avant l’importance de l’acquisition de  connaissances précises sur les similitudes et les différences entre les délits et crimes de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.

Par ailleurs, bien que les organisations terroristes puissent utiliser les canaux de blanchiment d’argent pour financer leurs opérations, il existe de nombreuses autres sources et méthodes auxquelles ces organisations peuvent recourir, y compris des activités «légales», a-t-il averti.

D’autre part, relevant en outre que les délits et crimes de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme revêtent généralement une dimension internationale, M. Nfissi a expliqué que « pour que les enquêtes soient exhaustives et pour pouvoir ainsi poursuivre toutes les personnes impliquées et assurer la traçabilité des fonds liés aux crimes, la coopération internationale doit être activée en veillant à ce que les demandes de coopération judiciaire internationale et d’extradition soient traitées avec la célérité et l’efficacité requises.

De son côté, ayant pris part à cette conférence nationale qui a regroupé des magistrats, des membres du parquet général, des officiers de la police judiciaire, des juristes, des universitaires spécialistes et des experts, le procureur général du Roi près la Cour de cassation, président du ministère public, El Hassan Daki, a affirmé, dans son intervention, que les enquêtes financières parallèles constituent un critère essentiel pour mesurer l’engagement de l’Etat dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, conformément aux règles fixées par le groupe d’action financière international, notant que c’est là, un facteur déterminant dans l’évaluation des pays, en la matière, au niveau international.

La Présidence du ministère public accorde une grande importance à ces enquêtes, en incitant le parquet à charger la police judiciaire de mener parallèlement des investigations financières en faisant l’inventaire des biens immobiliers et mobiliers des prévenus et de leurs comptes bancaires et en vérifiant le lien entre le crime et les biens, en plus d’utiliser les conclusions de l’évaluation nationale des risques pour orienter la recherche vers les crimes sous-jacents à haut risque, a souligné le président du ministère public.
El Hassan Daki
La criminalité financière est généralement caractérisée par la complexité et la difficulté d’en établir la preuve, ce qui nécessite une combinaison de méthodes d’investigation classiques, d’investigation financière parallèle ainsi que des techniques spéciales d’investigation
Dans le même ordre d’idées, pour M. Daki, les procureurs  sont tenus de demander l’assistance de l’Autorité nationale du renseignement financier concernant toutes les preuves et informations pouvant servir l’investigation et aider à mettre en œuvre les procédures de saisie et de gel dans les affaires de blanchiment d’argent, de financement du terrorisme et de crimes sous-jacents dans le strict respect des droits d’autrui.

Il n’a pas manqué d’évoquer, à cet égard, les nouveautés introduites par la loi n° 12-18 modifiant et complétant le code pénal et la loi n° 43-05 (…).

Dans cette optique, le procureur général près la Cour de cassation a fait observer que les modifications législatives et judiciaires, de même que les mécanismes institutionnels, bien que nécessaires, ne suffisent pas à eux seuls à réduire les risques émergents d’infractions de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, à identifier les auteurs et les traduire en justice, mettant en relief l’importance de consentir de gros efforts en matière de qualification et de développement des aptitudes et compétences des divers acteurs intervenant dans ce domaine, particulièrement les services  chargés de mener les investigations et les enquêtes (…)

« La criminalité financière est généralement caractérisée par la complexité et la difficulté de fournir la preuve, ce qui nécessite une combinaison de méthodes d’investigation classiques, d’investigation financière parallèle ainsi que des techniques spéciales d’investigation », a souligné M. Daki.

Ainsi, l’on observe que le dispositif législatif et judiciaire marocain relatif à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, adopté dans un contexte, par ailleurs, politiquement caractérisé au niveau international par les actes terroristes qui ont ébranlé le monde, vise essentiellement et rigoureusement à consolider et améliorer les dispositifs préventifs mis en place pour réaliser les objectifs préconisés dans cette grande bataille.

Tous les acteurs concernés, magistrature, services de sécurité, autorités administratives, responsables financiers,  banquiers et autres se doivent de s’impliquer entièrement dans ce grand chantier politique, économique et social, vecteur fondamental de l’épanouissement, de la sérénité et de la stabilité …

Rachid Meftah


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