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Deux de la vague, ou l'histoire du désamour entre Truffaut et Godard


AFP
Mardi 11 Janvier 2011

C'est l'histoire d'une amitié, une vraie amitié, de celles qui finissent mal : la Nouvelle Vague a uni puis désuni François Truffaut et Jean-Luc Godard, pères fondateurs d'un mouvement dans lequel ils finirent par ne plus se reconnaître, ni l'un ni l'autre.
"Deux de la vague", en salles françaises dès ce mercredi, raconte cette histoire de désamour artistique, écrite par Antoine de Baecque, historien du cinéma, et réalisée par Emmanuel Laurent. Pour qu'elle soit complète, il faut ajouter un troisième personnage : Jean-Pierre Léaud qui fut l'enfant-acteur des deux et que le divorce intellectuel de ses "pères" laissa un temps sur le sable de cette nouvelle vague retirée.
Tout commence avec "Les 400 coups", Palme d'or du Festival de Cannes 1959. Truffaut et Léaud/Antoine Doinel viennent de naître à la célébrité. Dans la foulée, Truffaut et Claude Chabrol - autre père fondateur de la vague - décident d'aider un jeune réalisateur timide et intimidé, à monter son premier film, intitulé "A bout de souffle".
Un an plus tard, Godard est à son tour révélé. Un bout du scénario de ce film culte - qui, raconte Godard, est l'histoire d'un homme attiré par la mort et d'une femme qui ne l'est pas - a été écrit par Truffaut.
A l'inverse, le court métrage "Histoire d'eau", commencé par l'auteur des 400 coups, sera terminé par celui d'A bout de Souffle. En somme, les deux cinéastes font la paire et conjuguent leurs forces pour secouer la France gaulliste, empesée et chagrine, pour casser le cinéma de papa.
Ils se vouent alors une vraie admiration réciproque. Truffaut n'écrit-il pas à propos de son ami qu'il est "le plus grand cinéaste du monde", "profond, profond, profond comme Ingmar Bergman et insolent comme personne".
L'un et l'autre enchaînent les succès, avec des films qui vont devenir mythiques, de "Jules et Jim" au "Mépris", de "Tirez sur le pianiste" à "Pierrot le fou".
Surgit Mai 68, les deux amis sont au premier rang sur la Croisette pour dénoncer "le ridicule" d'un festival de Cannes qui se poursuivrait tandis que la France est en grève générale.
Mais imperceptiblement, le ton de Truffaut, le discours de Godard ne s'accordent plus tout à fait. Le premier veut faire du cinéma autrement, le second un autre cinéma. Le premier tourne "La nuit américaine", le second a déjà signé "La Chinoise" et va bientôt entamer un long travelling solitaire vers un cinéma de stricte obédience marxiste-léniniste.
"La nuit américaine" est donc le film de la rupture entre les deux hommes. Violente, brutale, sans concession, sans retour. "Probablement personne ne te traitera de menteur, aussi je le fais. Ce n'est pas plus une injure que fasciste, c'est une critique", écrit Godard à Truffaut fin mai 1973.
La réponse arrive un mois plus tard, plus brutale encore : "Selon moi, tu te conduis comme une m…", "Je me contrefous de ce que tu penses de la Nuit américaine", écrit Truffaut dans une longue lettre qui trace aussi la frontière invisible entre deux cinémas, celui qui plaît au public, celui qui fascine la critique. Celui qui renoue avec le cinéma populaire, celui qui ose l'expérimental.
Godard et Truffaut avaient quatre grands maîtres en commun : Howard Hawks, Alfred Hitchcock, Jean Renoir et Roberto Rossellini. Leurs œuvres respectives sont venues ajouter deux noms immenses au cinéma mondial qu'ils ont à leur tour inspiré, de David Lynch à Quentin Tarentino en passant par Steven Spielberg.


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